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et pressant, — n’allez pas vous figurer, je vous prie, que je vous ai fait des aveux aujourd’hui. Vous êtes un homme étrange, et je vous ai écouté par pure curiosité. Mais je n’ai rien avoué… n’oubliez pas cela.

— Suffit, je ne l’oublierai pas, — eh, comme il tremble ! Ne vous inquiétez pas, mon cher, je prends bonne note de votre recommandation. Promenez-vous un peu, seulement ne dépassez pas certaines limites. À tout hasard, j’ai encore une petite demande à vous faire, ajouta-t-il en baissant la voix, — elle est un peu délicate, mais elle a son importance : au cas, d’ailleurs improbable selon moi, où durant ces quarante-huit heures la fantaisie vous viendrait d’en finir avec la vie (pardonnez-moi cette absurde supposition), eh bien, laissez un petit billet, rien que deux lignes, et indiquez l’endroit où se trouve la pierre : ce sera plus noble. Allons, au revoir… Que Dieu vous envoie de bonnes pensées !

Porphyre se retira en évitant de regarder Raskolnikoff. Celui-ci s’approcha de la fenêtre et attendit avec impatience le moment où, selon son calcul, le juge d’instruction serait déjà assez loin de la maison. Ensuite il sortit lui-même en toute hâte.

III

Il était pressé de voir Svidrigaïloff. Ce qu’il pouvait espérer de cet homme, — lui-même l’ignorait. Mais cet homme avait sur lui un mystérieux pouvoir. Depuis que Raskolnikoff s’en était convaincu, l’inquiétude le dévorait, et à présent il n’y avait plus lieu de reculer le moment d’une explication.

En chemin, une question le préoccupait surtout : Svidrigaïloff était-il allé chez Porphyre ?