Page:Dorion - Vengeance fatale, 1893.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
VENGEANCE FATALE

III

CHEZ MONSIEUR DARCY


Monsieur Darcy habitait avec ses deux filles une maison spacieuse sur la rue St-Alexandre, entre les rues Ste-Catherine et Dorchester. Après l’avoir reconduit chez lui ainsi que sa fille Hortense, après le théâtre, nous avons vu que Louis avait refusé d’entrer, prétextant l’heure avancée de la nuit. Mais là n’était pas pour lui la véritable raison de son refus. Il craignait bien plutôt de déranger Mathilde, sœur aînée d’Hortense, qu’on disait malade depuis quelque temps et qu’une indisposition avait retenue chez elle, le soir de la représentation de la « Grâce de Dieu ».

Bien peu de personnes, cependant, avaient connaissance de cette maladie, à l’exception de son père et de sa sœur. Louis la savait légèrement indisposée, et c’était tout ; il n’avait aucune idée de la cause qui la retenait, depuis quelque temps, aussi souvent chez elle. Pourtant rien n’était plus facile à expliquer.

En effet, ce n’était pas autant du corps que du cœur que Mathilde souffrait. Pendant un voyage à Québec, elle avait fait la connaissance d’un jeune homme qui faisait le même trajet qu’elle. Ce jeune homme, qui demeurait à Montréal, était Edmond Marceau.

Durant leur séjour dans la vieille cité de Champlain, Edmond avait vu Mlle Darcy deux ou trois fois et, après leur retour à Montréal, il lui avait fait un grand nombre de visites. Bref, il fut très assidu auprès d’elle pendant une couple de mois et un amour réciproque paraissait établi entre eux, lorsque tout à coup on