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VENGEANCE FATALE

— Que voulez-vous donc faire ?

— Arrêter les troupes à St-Denis d’abord ; mais ne t’occupe pas de ce que je fais, vois seulement à ce que je t’ai dit.

— C’est bien, docteur.

Et les deux hommes se séparèrent pour vaquer chacun à sa besogne.

Le lecteur a sans doute déjà reconnu le messager qui arrivait de Sorel. C’était Pierre Hervart marié à Mathilde Gagnon depuis plus de trois mois. Quant au personnage qui lui avait donné des ordres avec une autorité qui, comme le lecteur a pu s’en apercevoir, révélait l’homme habitué au commandement, nous ferons bientôt sa connaissance,

Pierre n’avait jamais vu Raoul de Lagusse, et il avait toujours ignoré l’aventure à la suite de laquelle Mathilde l’avait connu chez le père Pouliotte. Mais il n’en était pas de même pour celle-ci. Elle l’avait encore vu environ huit jours avant son mariage avec Pierre, pendant un voyage que Raoul avait fait sur la rivière Richelieu, et avant de partir, après lui avoir réitéré sa demande lui-même, il l’avait menacée de sa vengeance si elle épousait Pierre.

Cependant, par un hasard fatal, elle n’avait jamais voulu parler de cet incident à son époux.

Elle craignait qu’en le lui communiquant, il ne s’exposât à des dangers qui pourraient lui être funestes ; et elle croyait que les menaces de Raoul n’étaient que l’effet du dépit et de la colère. N’entendant plus parler de lui, elle s’était bien vite tranquillisée. Mais elle avait tort de se croire ainsi en sûreté, car le serpent