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VENGEANCE FATALE

— Grâce ! m’écriai-je en tombant à ses genoux, ce n’était pas mon intention de tuer cet homme.

Il commença par rire, puis devenant plus sérieux : Es-tu prêt à me suivre, demanda-t-il ?

— Si vous ne me dénoncez pas, répondis-je, je vous suivrai au bout du monde.

— C’est bien. Où demeures-tu ?

— À la Pointe-Claire.

— Alors retournons à la Pointe-Claire ; j’y demeurerai moi-même quelque temps, afin que nous puissions faire plus ample connaissance tous les deux. Seulement ne t’embarasse pas de ce cheval et de cette voiture ; ils ne pourraient qu’attirer des soupçons sur toi.

On supposa bien que cet homme s’était noyé, mais le cadavre ne fut pas retrouvé, quoique la rivière eût été sondée à plusieurs endroits ; les précautions que j’avais prises s’y opposaient. Dès ce jour j’appartins corps et âme à mon nouveau maître. Un an après je revenais habiter Ste-Anne.

Ici Louis interrompit Puivert.

— Vous ne lui avez pas demandé son nom, dit-il ?

— Si fait, je viens de vous dire qu’il se nomme Darcy.

— Mais il n’a pas toujours porté ce nom.

Le fermier fixa un regard défiant sur le jeune homme. Il ne comprenait pas comment Louis avait pu apprendre ce détail. Au lieu de répondre à la question de Louis, il reporta ses yeux dans la rue. La nuit était sombre et la rue silencieuse comme une tombe.

— Tu n’as pas répondu, fit Louis, fatigué de ce silence prolongé.

Puivert respira bruyamment. Raoul de Lagusse, dit-il enfin.