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XIII
LA MAISON DU BOUQUET BLANC


C’est la fin du dîner. Qu’on serait bien s’ils se taisaient. La lumière jaune de la bougie danse dans une bouteille vide. Il reste un peu de vin au fond des quarts, un vin blond, un peu trouble, qui poisse les doigts et caresse la gorge. Dans l’âtre, de grosses solives se consument en pétillant.

Penché sur une bassine fumante, rouge et luisant de sueur, Sulphart attentif prépare notre vin chaud. Il a retroussé ses manches jusqu’aux coudes et largement ouvert sa chemise sur sa poitrine velue. À son côté gauche pendillent six épingles nourrice mises en brochette : le seul insigne qu’on n’ait pas volé aux soldats. Lemoine est assis devant le feu, sur un billot, ses larges mains inutiles tombées placidement jointes entre ses genoux, et il regarde faire son copain avec un petit sifflement qui n’a l’air de rien mais où Sulphart, susceptible, devine une critique.

— T’espère pas m’apprendre à faire du vin chaud,