Page:Dorchain - L’Art des vers, 1921.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée
L’Art des Vers

CHAPITRE PREMIER

VERSIFICATION ET POÉSIE

La plus haute dignité de l’homme est dans l’aspiration. L’heure à laquelle il se sent le plus noblement un homme est celle où, se détachant de son étroite personnalité, il aspire à une vie supérieure dont sa conscience ne lui fournit que des éléments confus encore, dont ses sens ne lui révèlent dans le monde qu’une grossière ébauche, à une vie où il y aurait plus d’ordre et plus de lumière, plus de joie, plus d’harmonie et plus d’amour. C’est de ce besoin que sont nés tous les arts, par lesquels l’artiste exprime pour lui d’abord, suscite et satisfait ensuite, chez les autres, cette aspiration sublime. Ainsi naquirent l’architecture, la statuaire, la peinture, la musique, la poésie enfin, dont on peut dire que, dans son sens le plus large, elle n’est pas à proprement parler un art, étant plutôt, caché au fond de tous les arts, ce principe d’aspiration lui-même, mais qui devient pourtant un art distinct, et le plus grand de tous, lorsqu’elle prend pour organe le Verbe ordonné selon des lois fixes et certaines, c’est-à-dire lorsqu’elle se confond avec ce dont je dois vous entretenir à cette place : l’Art des Vers.