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par les combler si l'on ne prenait le soin de les nettoyer. La mer jette également dans les ports, dans les anses, dans tous les lieux où ses eaux sont plus tranquilles, des vases et des sédimens. Les courans amassent entre eux ou jettent sur leurs côtés le sable qu’ils arrachent au fond de la mer, et en composent des bancs et des bas-fonds.

Stalactites.Certaines eaux, après avoir dissous des substances calcaires au moyen de l’acide carbonique surabondant dont elles sont imprégnées, les laissent cristalliser quand cet acide peut s’évaporer, et en forment des stalactites et d’autres concrétions. Il existe des couches cristallisées confusément dans l’eau douce, assez étendues pour être comparables à quelques unes de celles qu’a laissées l’ancienne mer. Tout le monde connaît les fameuses carrières de travertin des environs de Rome, et les roches de cette pierre que la rivière du Teverone accroît et fait sans cesse varier en figure. Ces deux sortes d’actions peuvent se combiner ; les dépôts accumulés par la mer peuvent être solidifiés par de la stalactite : lorsque, par hasard, des sources abondantes en matière calcaire, ou contenant quelque autre substance en dissolution, viennent à tomber dans les lieux où ces amas se sont formés, il se montre alors des aggrégats où les produits de la mer et ceux de l’eau douce peuvent être réunis. Tels sont les bancs de la Guadeloupe, qui offrent à la fois des coquilles de terre, et des squelettes humains. Telle est encore cette carrière d’auprès de Messine, décrite par de Saussure, et où le grès se reforme par les sables que la mer y jette, et qui s’y consolident.

Lithophytes.Dans la zone torride, où les litophytes sont nombreux en espèces et se propagent avec une grande force, leurs troncs pierreux s’entrelacent en rochers, en récifs, et, s’élevant jusqu’à fleur d’eau, ferment l’entrée des ports, tendent des pièges terribles aux navigateurs. La mer, jetant des sables et du limon sur le haut de ces écueils, en élève quelquefois la surface au dessus de son propre niveau, et en forme des îles qu’une riche végétation vient bientôt vivifier[1].

  1. Voyez les Observations faites dans la mer du Sud, par R. Forster.