Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/506

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seul par lui-même ; tous les êtres tiennent de lui leur existence ; il les soûtient tous ; il n’a jamais été vu des yeux mortels, & il voit toutes choses ».

Qu’on lise encore ce passage du philosophe Maxime de Madaure, dans sa lettre à saint Augustin. « Quel homme est assez grossier, assez stupide, pour douter qu’il soit un Dieu suprème, éternel, infini, qui n’a rien engendré de lemblable à lui-même, & qui est le pere commun de toutes choses » ? Il y a mille témoignages que les sages abhorroient non seulement l’idolâtrie, mais encore le polithéïsme.

Epictete, ce modele de résignation & de patience, cet homme si grand dans une condition si basse, ne parle jamais que d’un seul Dieu : voici une de ses maximes. « Dieu m’a créé, Dieu est au-dedans de moi ; je le porte par-tout ; pourrois-je le souiller par des pensées obscènes, par des actions injustes, par d’infâmes desirs ? Mon devoir est de remercier Dieu de tout, de le louer de tout, & de ne cesser de le benir qu’en cessant de vivre ». Toutes les idées d’Epictete roulent sur ce principe.

Marc-Aurele, aussi grand peut-être sur le trône de l’empire romain qu’Epictete dans l’esclavage, parle souvent à la vérité des dieux, soit pour se conformer au langage reçu, soit pour exprimer des êtres mitoyens entre l’Etre suprème & les hommes. Mais en combien d’endroits ne fait-il pas voir qu’il ne reconnoît qu’un Dieu éternel, infini ? Notre ame, dit-il, est une émanation de la divinité ; mes enfans, mon corps, mes esprits viennent de Dieu.

Les Stoïciens, les Platoniciens admettoient une nature divine & universelle ; les Epicuriens la nioient ; les pontifes ne parloient que d’un seul Dieu dans les mysteres ; où étoient donc les idolâtres ?

Au reste, c’est une des grandes erreurs du Dictionnaire de Moréri, de dire que du tems de Théodose le jeune, il ne resta plus d’idolâtres que dans les pays reculés de l’Asie & de l’Afrique. Il y avoit dans l’Italie beaucoup de peuples encore gentils, même au septieme siecle : le nord de l’Allemagne depuis le Vezer n’étoit pas chrétien du tems de Charlemagne ; la Pologne & tout le Septentrion resterent long-tems après lui dans ce qu’on appelle idolâtrie : la moitié de l’Afrique, tous les royaumes au de là du Gange, le Japon, la populace de la Chine, cent hordes de Tartares ont conservé leur ancien culte. Il n’y a plus en Europe que quelques lapons, quelques samoïedes, quelques tartares, qui ayent persévéré dans la religion de leurs ancêtres. Article de M. de Voltaire. Voyez Oracles, Religion, Superstition, Sacrifices, Temples.

IDOLOTHYTES, s. m. (Théolog.) c’est le nom que S. Paul donne aux viandes offertes aux idoles, & que l’on présentoit ensuite avec cérémonie, tant aux prêtres qu’aux assistans, qui les mangeoient couronnés. Il y eut entre les premiers chrétiens difficulté au sujet de la manducation de ces idolothytes, & dans le concile de Jérusalem il leur fut ordonné de s’en abstenir ; cependant comme les viandes qui étoient offertes aux idoles, étoient quelquefois vendues au marché, & présentées ensuite aux repas des chrétiens, les plus scrupuleux n’en vouloient pas, quoiqu’alors ce ne fût plus un acte de religion. S. Paul consulté sur cette question, répondit aux Corinthiens que l’on en pouvoit manger, sans s’informer si cette viande avoit été offerte aux idoles ou non, pourvû que cela ne causât point de scandale aux foibles. Cependant l’usage de ne point manger des idolothytes a subsisté parmi les chrétiens, & dans l’apocalypse ceux de Pergame sont repris de ce qu’il y avoit parmi eux des gens qui faisoient manger des viandes qui avoient été offertes aux idoles. Dans la primitive église il est défendu aux chré-

tiens, par plusieurs canons des conciles, de manger

des idolothytes. Actor. j. 15. I. Corinth. j. 8. Apocalyps. 2.

IDON-MOULLY, s. m. (Botan. exot.) c’est le nom malabare d’une espece de prunier des Indes orientales, que les Botanistes appellent prunus indica, fructu umbilicato, pyriformi, spinosa, racemosa, ce qui suffit pour le distinguer des autres pruniers ; ajoutez qu’il s’éleve jusqu’à la hauteur de soixante & dix piés ; il est décrit dans l’Hort. malab. part. IV. tab. 18. p. 41. (D. J.)

IDRA, (Géog.) ville de Suede, capitale de la Dalécarlie, sur la riviere d’Elsinam : presque tous les habitans travaillent aux mines & aux forges.

IDRIA, (Géog.) ville d’Italie dans le Frioul, au comté de Goritz, avec un château. Cette ville, célebre par sa mine de vif-argent, appartient à la maison d’Autriche ; elle est de tous côtés entourée de montagnes, à 7 lieues N. E. de Goritz, 10 N. de Trieste. Long. 31. 35. lat. 46. 16.

La riche mine de vif-argent que cette ville possede dans son propre sein, est une chose bien curieuse. L’entrée de cette mine n’est point sur une montagne, mais dans la ville même ; elle n’a pas plus de 120 ou 130 brasses de profondeur. On en tire du vif-argent vierge & du simple vif-argent, & c’étoit certainement autrefois une des plus riches mines du monde en ce genre ; car il s’y trouvoit d’ordinaire moitié pour moitié, c’est-à-dire de deux livres une, & quelquefois même lorsqu’on en tiroit un morceau qui pesoit trois livres, on en trouvoit encore deux après qu’il étoit rafiné. Le détail que Brown en a fait comme témoin oculaire, en 1669, mérite d’être lû.

Etant descendu dans cette mine par une échelle qui avoit 89 brasses de long, il vit dans un endroit où l’on travailloit à la purification du vif-argent par le feu seize mille barres de fer, qu’on avoit achetées dans la Carinthie ; on employoit aussi quelquefois au même usage 800 barres de fer tout-à-la-fois, pour purifier le vif-argent dans seize fournaises ; on en mettoit 50 dans chaque fournaise, 25 de chaque côté, 12 dessus & 13 au-dessous ; le produit étoit tel, que M. Brown vit emporter un jour 40 sacs de vif-argent purifié pour les pays étrangers, objet de 40 mille ducats. On en envoyoit jusqu’à Chremnits, en Hongrie, pour s’en servir dans cette mine d’or ; chaque sac pesoit 315 livres. Il y avoit encore alors dans le château trois mille sacs de vif-argent purifié en réserve ; enfin, à force d’exploitations précipitées, on a presque épuisé la mine & le bois nécessaire pour le travail. (D. J.)

IDSTEIN, (Géog.) bourg ou petite ville d’Allemagne, dans la Wétéravie, résidence d’une branche de la maison de Nassau, à qui elle appartient ; elle est à 5 lieues N. E. de Mayence. Long. 25. 33. lat. 50. 9. (D. J.)

IDULIE, s. f. (Belles-lettres.) c’est ainsi qu’on appelloit la victime qu’on offroit à Jupiter le jour des ides, d’où peut-être elle a pris son nom. (D. J.)

IDUMÉE, s. f. (Géog. anc.) pays d’Asie, aux confins de la Palestine & de l’Arabie ; l’Idumée tire son nom d’Edom ou Esaü, qui y fixa sa demeure. Il s’établit d’abord dans les montagnes de Seïr, à l’orient & au midi de la mer Morte ; ensuite ses descendans, comme nous le verrons tout-à-l’heure, se répandirent dans l’Arabie Pétrée, dans le pays qui est au midi de la Palestine, & finalement dans la Judée méridionale, lorsque ce pays devint comme desert durant la captivité de Babylone ; ainsi quand on parle de l’étendue de l’Idumée, il faut distinguer les tems. Sous les rois de Juda les Iduméens étoient resserrés à l’orient & au sud de la mer Morte, au pays de Seïr ; mais dans la suite l’Idumée s’étendit