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sés dans la critique pour démêler la vérité du mensonge, assez sages pour ne donner aucune confiance ni aux prétendus ossemens humains ni à toutes les relations de l’antiquité sur l’existence des géans, ne laissent pas que d’être ébranlés par les récits de plusieurs navigateurs, qui rapportent qu’à l’extrémité du Chily vers les terres Magellaniques, il se trouve une race d’hommes dont la taille est gigantesque, ce sont les Patagons. M. Frezier dit avoir appris de quelques espagnols, qui prétendoient avoir vû quelques-uns de ces hommes, qu’ils avoient quatre varres de hauteur, c’est-à-dire neuf à dix piés.

Mais on a très-bien observé que M. Frezier ne dit pas avoir vû lui-même quelques-uns de ces géans ; & comme les relations vagues des Portugais, des Espagnols, & des premiers navigateurs hollandois, ne sont point confirmées par des voyageurs éclairés de ce siecle ; que de plus elles sont remplies d’exagérations ou de faussetés en tant d’autres choses, on ne sauroit trop s’en défier.

Enfin il est contre toute vraissemblance, comme le remarque l’auteur de l’histoire naturelle, « qu’il existe dans le monde une race d’hommes composée de géans, sur-tout lorsqu’on leur supposera dix piés de hauteur ; car le volume du corps d’un tel homme seroit huit fois plus considérable que celui d’un homme ordinaire. Il semble que la hauteur ordinaire des hommes étant de cinq piés, les limites ne s’étendent guere qu’à un pié au-dessus & au-dessous ; un homme de six piés est en effet un homme très-grand, & un homme de quatre piés est très petit : les géans & les nains qui sont au-dessus & au-dessous de ces termes de grandeur, doivent donc être regardés comme des variétés très-rares, individuelles & accidentelles ».

L’expérience nous apprend que lorsqu’il se rencontre quelquefois parmi nous des géans, c’est-à-dire des hommes qui ayent sept à huit piés, il, sont d’ordinaire mal conformés, malades, & inhabiles aux fonctions les plus communes.

Après tout, si ces géans des terres Magellaniques existent, ce que le tems seul peut apprendre, « ils sont du-moins en fort petit nombre ; car les habitans des terres du détroit & des îles voisines sont des sauvages d’une taille médiocre ».

On lit dans les journaux que le P. Joseph Tarrubia, espagnol, a fait imprimer tout récemment (1756) une giganthologie, dans lequel ouvrage il prétend réfuter le chevalier Hans-Sloane, & prouver l’existence des géans sur des monumens d’antiquité indienne : mais en attendant que quelqu’un se donne la peine d’examiner la valeur de pareils monumens, qui selon toute apparence ne seront pas plus authentiques que tant d’autres en ce genre ; le lecteur curieux d’une bonne giganthologie physique, fera bien d’étudier celle du même chevalier Hans-Sloane, qui n’a pas plû au bon pere espagnol ; elle est insérée dans les Transact. philosoph. n°. 404 ; & par extrait, dans le suppl. du dict. de Chambers. (D. J.)

Géans, (Mytholog.) enfans de la Terre qui firent la guerre aux dieux : Hésiode fait naître ces géans du sang qui sortit de la plaie d’Uranus ; Apollodore, Ovide, & les autres poëtes les font fils de la terre, qui dans sa colere les vomit de son sein pour faire la guerre aux dieux exterminateurs des Titans.

Ces géans, disent-ils, étoient d’une taille monstrueuse & d’une force proportionnée à cette prodigieuse hauteur ; ils avoient cent mains chacun, & des serpens au lieu de jambes. Résolus de déthroner Jupiter, ils entreprirent de l’assiéger jusque sur son throne, & entasserent pour y réussir le mont Ossa sur le Pélion, & l’Olympe sur le mont Ossa, d’où ils essayerent d’escalader le ciel, jettant sans cesse contre les dieux de grands quartiers de pierre, dont les unes

qui tomboient dans la mer, devenoient des îles, & celles qui retomboient sur la terre faisoient des montagnes. Jupiter effrayé lui même à la vûe de si redoutables ennemis, appella les dieux à sa défense ; mais il en fut assez mal secondé ; car ils s’enfuirent tous en Egypte, où la peur les fit cacher sous la figure de différentes especes d’animaux.

Un ancien oracle avoit prononcé que les géans seroient invincibles, & qu’aucun des dieux ne pourroit leur ôter la vie, à-moins qu’ils n’appellassent quelque mortel à leur secours. Jupiter ayant défendu à l’Aurore, à la Lune & au Soleil d’annoncer ses desseins, devança la Terre qui cherchoit à soûtenir ses enfans, & par l’avis de Pallas fit venir Hercule pour combattre avec lui ; à l’aide de ce héros, il extermina les géans Encélade, Polybetès, Alcyonée, Porphyrion, les deux Aloïdes, Ephialte, Othus, Eurytus, Clytius, Tithyus, Pallas, Hippolitus, Agrius, Thaon, & le redoutable Typhon, qui seul, dit Homere, donna plus de peine aux dieux que tous les autres géans ensemble. Jupiter après les avoir défaits, les précipita jusqu’au fond du Tartare, ou, suivant d’autres poëtes, il les enterra vivans, soit sous le mont Ethua, soit en différens pays ; Encélade fut enseveli sous la Sicile, Polybetès sous l’île de Lango, Othus sous l’île de Candie, & Typhon sous l’île d’lschia.

Ces prétendus géans de la fable n’étoient, suivant plusieurs de nos Mythologistes, que des brigands de Thessalie qui vinrent attaquer Jupiter sur le mont Olympe où ce prince avoit fait bâtir une forte citadelle : ce mont Olympe, ajoûtent-ils, a été pris par les plus anciens poëtes pour le Ciel, & parce que les monts Ossa & Pélyon, qui sont peu éloignés de l’Olympe, servoient de retraite à ces bandits qui s’y étoient fortifiés, & qui de-là tenoient en respect la garnison de l’Olympe, on imagina de leur faire entasser montagnes sur montagnes, pour atteindre jusqu’au ciel.

Mais quoique cette explication soit généralement adoptée, je croirois plûtôt que toute la fable des géans n’est qu’une tradition défigurée de l’histoire de Typhon & d’Osiris. On sait qu’il y avoit en Egypte des monumens plus anciens que les fables des Grecs, des villes sondees & un culte établi en l’honneur des mêmes animaux dont leurs poëtes nous disent que les dieux prirent la figure, en se retirant de frayeur dans ce pays là. (D. J.)

Géans, (ossemens de) Hist. nat. nat. Voyez Ossemens fossiles.

Géans, (pavé des) Hist. nat. Lythol. en anglois Giant’s causeway. Voyez Pavé.

GEARON, (Géog.) ville de Perse au Tarsistan, entre Schiras & Bander-Congo, dans un terrein qui produit les meilleures dattes de toute la Perse. Long. 72. 32. latit. 28. 25. (D. J.)

GEASTER, s. m. (Hist. nat. bot.) genre de plante ronde, composée de deux écorces, dont la premiere est découpée jusqu’à la base en forme d’étoile à plusieurs rayons ; l’autre n’est ouverte qu’au sommer par un orifice étoilé, rayonné, ou frangé : la substance du fruit adhere à la seconde écorce, & se trouve placée avec des semences & des filamens dans plusieurs cellules. Ajoûtez au caractere de ce genre, que dans le tems de la maturité la substance du fruit & les semences sortent au-dehors, comme dans le lycoperdon, par l’ouverture dont il a été fait mention. Nova plantar. americ. genera, &c. par M. Micheli. (I)

GEBHA, (Géog.) ancienne ville ruinée de Barbarie au royaume de Fez dans la province d’Errif, à huit lieues de Vélez du côté du levant. Il y a tout près de cette ville un cap que les anciens nommoient le cap des oliviers, à cause de la quantité d’oliviers sauvages qui y sont. Ptolomée donne à Gebha 9d. de long. & 34d. 56′. de latit. (D. J.)