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Etoilé, à la Monnoie, se dit d’un flanc qui recevant le coup de balancier, s’ouvre ou se casse par un défaut de recuite. Voyez Recuire.

ETOLE, s. f. (Hist. eccles.) ornement sacerdotal que les curés, dans l’Église romaine, portent par-dessus le surplis, & qui est, selon quelques-uns, une marque de la supériorité qu’ils ont chacun dans leur paroisse. Le P. Thomassin prétend au contraire que l’étole paroît plus affectée à l’administration des sacremens, qu’à marquer la jurisdiction. Thomass. Discipl. eccl. part. IV. liv. I. ch. xxxvij.

Ce mot vient du grec στολὴ, qui signifie une robe longue ; &, en effet, chez les anciens Grecs & Romains l’étole étoit un manteau commun même aux femmes, & nous l’avons confondu avec l’orarium, qui étoit une bande de linge dont se servoient tous ceux qui vouloient être propres, pour arrêter la sueur autour du cou & du visage, & dont les empereurs faisoient quelquefois des largesses au peuple romain, comme le remarque M. Fleury. Mœurs des Chrétiens, tit. xlj.

L’étole ainsi changée de forme, est aujourd’hui une longue bande de drap ou d’étoffe précieuse, large de quatre doigts, bordée ou galonnée, & terminée à chaque bout par un demi-cercle d’étoffe d’environ un demi-pié de large, sur chacun desquels est une croix en broderie ou autrement. Il y a aussi une croix à l’endroit de l’étole qui répond à la nuque du cou, & qui est garni d’un linge blanc, ou d’une dentelle de la longueur d’un pié ou environ. L’étole se passe sur le cou, & pend également par-devant perpendiculairement à droite & à gauche, tombant presque jusqu’aux piés, si ce n’est à la messe, où les prêtres la croisent sur l’estomac, & les diacres la portent passée en écharpe de l’épaule gauche sous le bras droit.

L’étole des anciens étoit, comme nous avons déjà dit, fort différente de celles d’aujourd’hui ; il paroît même que c’étoit quelquefois un ornement fort riche, & un habit de cérémonie que les rois donnoient à ceux qu’ils vouloient honorer : de-là ces expressions de l’Ecriture, stolam gloriæ induit eum. Les monarques d’Orient sont encore aujourd’hui dans l’usage de donner des vestes & des pelisses fort riches aux princes & aux ambassadeurs.

L’usage ou le droit qu’ont les curés de porter l’étole, n’est pas uniforme par-tout. Le premier concile de Milan ordonna aux prêtres de n’administrer les sacremens qu’en surplis & en étole ; ce que le cinquieme de la même ville, & celui d’Aix en 1585, enjoignirent même aux réguliers qui entendent les confessions. Les constitutions synodales de Roüen, celles d’Eudes de Paris, les conciles de Bude en 1279, de Roüen en 1581, de Reims en 1583, font assister les curés au synode avec une étole. Le concile de Cologne, en 1280, ne donne l’étole qu’aux abbés, aux prieurs, aux archiprêtres, aux doyens. Le synode de Nîmes ne donne pas non plus d’étole aux curés. En Flandres & en Italie les prêtres prêchent toûjours en étole. S. Germain, patriarche de Constantinople, dans ses explications mystiques des habits sacerdotaux, dit que l’étole représente l’humanité de Jesus-Christ teinte de son propre sang. D’autres veulent qu’elle soit une figure de la longue robe que portoit le grand-prêtre des Juifs. Thomass. Discipl. de l’Egl. part. IV. liv. I. ch. xxxvij. (G)

Etole, (Hist. mod.) ordre de chevalerie institué par les rois d’Arragon. On ignore le nom du prince qui en fut l’instituteur, le tems de sa création, aussi-bien que le motif de son origine, & les marques de sa distinction ; on conjecture seulement qu’elles consistoient principalement en une étole ou manteau fort riche, & que c’est de-là que cet ordre a tiré son nom ; les plus anciennes traces qu’on en trouve, ne

remontent pas plus haut qu’Alphonse V. qui commença à regner en 1416. Justiniani prétend que cet ordre a commencé vers l’an 1332.

Etole d’Or, (Ordre militaire à Venise.) ainsi nommé à cause d’une étole d’or que les chevaliers portent sur l’épaule gauche, & qui tombe jusqu’aux genoux par-devant & par-derriere, & large d’une palme & demie. Personne n’est élevé à cet ordre, s’il n’est patricien ou noble Vénitien. Justiniani remarque qu’on ignore l’époque de son institution.

Etonné, (Maçonnerie.) se dit d’une pierre, d’un mur, qui par une violente commotion a été dérangée de sa place.

* ETONNEMENT, s. m. (Morale.) c’est la plus forte impression que puisse exciter dans l’ame un évenement imprévû. Selon la nature de l’évenement, l’étonnement dégénere en surprise, ou est accompagné de joie, de crainte, d’admiration, de desespoir.

Il se dit aussi au physique de quelque commotion intestine, ainsi que dans cet exemple : j’eus la tête étonnée de ce coup ; & dans celui-ci : cette piece est étonnée, où il signifie une action du feu assez forte pour déterminer un corps à perdre la couleur qu’il a, & à commencer de prendre celle qu’on se proposoit de lui donner.

Etonnement de Sabot, (Manége, Maréchall.) secousse, commotion que souffre le pié en heurtant contre quelques corps très-durs ; ce qui peut principalement arriver lorsque, par exemple, le cheval, en éparant vigoureusement, atteint de ses deux piés de derriere, ensemble ou séparément, un mur qui se trouve à sa portée & derriere lui.

Cet évenement n’est très-souvent d’aucune conséquence ; il en résulte néanmoins quelquefois des maladies très-graves. La violence du heurt peut en effet occasionner la rupture des fibres & des petits vaisseaux de communication du sabot & des tégumens, ainsi que des expansions aponévrotiques du pié. Alors les humeurs s’extravasent, & détruisent toujours de plus en plus, par leur affluence, toutes les connexions. Ces mêmes humeurs croupies, perverties, & changées en pus, corrodent encore par leur acrimonie toutes les parties ; elles forment des vuides, elles donnent lieu à des fusées, & se frayent enfin un jour à la portion supérieure du sabot, c’est-à-dire à la couronne : c’est ce que nous appellons proprement souffler au poil.

Si nous avions été témoins du heurt dont il s’agit, la cause maladive ne seroit point du nombre de celles que nous ne saisissons que difficilement, & nous attribuerions sur le champ la claudication de l’animal à l’ébranlement que le coup a suscité ; mais nous ne sommes pas toujours certains de trouver des éclaircissemens dans la sincérité de ceux qui ont provoqué le mal, & qui sont plus ou moins ingénus, selon l’intérêt qu’ils ont de déguiser leur faute & leur imprudence : ainsi nous devons, au défaut de leur aveu, rechercher. des signes qui nous le décelent.

Il n’en est point de véritablement univoques, car la claudication, l’augmentation de la douleur, la difficulté de se reposer sur la partie, sa chaleur, l’engorgement du tégument à la couronne, la fievre, l’éruption de la matiere, capable de dessouder l’ongle, si l’on n’y remédie, sont autant de symptomes non moins caractéristiques dans une foule d’autres cas, que dans celui dont il est question. On peut cependant, en remontant à ce qui a précédé, & en examinant si une enclouûre, ou des scymes saignantes, ou l’encastelure, ou des chicots, ou des maladies qui peuvent être suivies de dépôts, ou une infinité d’autres maux qui peuvent affecter le pié de la même maniere, n’ont point eu lieu ; décider avec une sorte de précision, & être assûré de la commotion & de l’étonnement.

Dès le moment du heurt, où il n’est que quelques fibres lésées, & qu’une legere quantité d’humeur ex-