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d’un fossé ou vuidange, nécessaire pour l’écoulement des eaux de tout un canton : 3°. les charges de police, telles que l’obligation de faire balayer les rues, chacun au-devant de sa maison, ou de les arroser dans les chaleurs, d’allumer les lanternes, la fonction de collecteur, celle de commissaire des pauvres, de marguillier, le devoir de guet & de garde, le logement des gens de guerre : on pourroit aussi comprendre dans cette classe la fonction de prevôt des marchands, celle d’échevin, & autres semblables, mais que l’on connoît mieux sous le titre de charges municipales : 4°. on appelle aussi charges publiques, certains engagemens que chacun est obligé de remplir dans sa famille, comme l’acceptation de la tutele ou curatele de ses parens, voisins, & amis.

Chacun peut être contraint par exécution de ses biens d’acquitter toutes ces différentes charges, lorsqu’il y a lieu, sous peine même d’amende pécuniaire pour certaines charges de police, telles que celles de faire balayer ou arroser les rues, allumer les lanternes.

Charges réelles ou foncieres, sont celles qui sont imposées en la tradition d’un fonds, & qui suivent la chose en quelques mains qu’elle passe. Voyez ci-devant Charges foncieres & Loyseau, tr. du déguerpissement.

Charges d’une succession, donation ou testament, (Jurispr.) sont les obligations imposées à l’héritier, donataire, ou légataire, les sommes ou autres choses dûes sur les biens, & qu’il doit acquitter, comme de payer les dettes, acquitter les fondations faites par le donateur ou testateur, faire délivrance des legs universels ou particuliers ; comme aussi l’obligation de supporter ou acquitter un douaire, don mutuel, ou autre usufruit, de payer une rente viagere, souffrir une servitude en faveur d’une tierce personne, & autres engagemens de différente nature, plus ou moins étendus, selon les conditions imposées par le donateur ou testateur, ou les droits & actions qui se trouvent à prendre sur les biens de la succession, donation, ou testament. Comme il y a des charges pour la succession en général, il y en a aussi de communes à l’héritier, & au légataire ou donataire universel, telles que les dettes, auxquelles chacun d’eux contribue à proportion de l’émolument. Il y a aussi des charges propres au donataire & légataire particulier ; ce qui dépend des droits qui se trouvent affectés sur les biens donnés ou légués, & des conditions imposées par le donateur ou testateur.

Charges universelles, sont celles qui affectent toute une masse de biens, & non pas une certaine chose en particulier ; telles sont les dettes d’une succession, qui affectent toute la masse des biens, de maniere qu’il n’est point censé y avoir aucun bien dans la succession que toutes ces charges ne soient déduites. Loyseau, tr. du déguerpissement, liv. l. ch. xj. & liv. IV. & VI. traite au long de la nature de ces charges universelles, & explique en quoi elles different des rentes foncieres. (A)

* Charge, (Arts méch. Comm. &c.) On donne ce nom à différentes fonctions honorables auxquelles on éleve certains particuliers, dans les corps & communautés de marchands & d’artisans. Voyez aux articles Grand-juge, Juré, Syndic, Doyen, Consul, &c. les prérogatives de ces charges.

Charge, terme d’Architecture ; c’est une maçonnerie d’une épaisseur reglée, qu’on met sur les solives & ais d’entrevous, ou sur le hourdi d’un plancher, pour recevoir l’aire de plâtre ou le carreau. Voyez Aire. (P)

Charge, terme d’Architecture ; c’est, selon la coûtume de Paris, art. 197. l’obligation de payer de la

part de celui qui bâtit sur & contre un mur mitoyen pour sa convenance, de six toises une, lorsqu’il éleve le mur de dix piés au-dessus du rez-de-chaussée, & qu’il approfondit les fondations au-dessous de quatre piés du sol. (P)

Charge, en terme d’Artillerie, est ordinairement la quantité de poudre que l’on introduit dans un canon, un fusil, ou un mortier, &c. pour en chasser le boulet, la balle, ou la bombe. Voyez Canon, Mortier, & Fusil.

On charge le canon en introduisant d’abord au fond de l’ame de la piece une quantité de poudre du poids du tiers ou de la moitié de la pesanteur du boulet : elle se met avec un instrument appellé lanterne. Voyez Lanterne. C’est une espece de cueillere de cuivre rouge, montée sur un long bâton, qu’on nomme hampe. On met sur la poudre un bouchon de foin qu’on presse ou refoule fortement avec le refouloir. Sur ce foin on pose immédiatement le boulet ; & pour qu’il y soit arrêté fixement, on le couvre d’un autre bouchon de foin bien bourré, ou refoulé avec le refouloir. On remplit ensuite de poudre la lumiere de la piece, & on en met une petite traînée sur sa partie supérieure, qu’on fait communiquer avec celle de la lumiere. L’objet de cette traînée est d’empêcher que l’effort de la poudre de la lumiere, en agissant immédiatement sur l’instrument avec lequel on met le feu à la piece, ne le fasse sauter des mains de celui qui est chargé de cette opération : inconvénient que l’on évite en mettant le feu à l’extrémité de la traînée. Dans les nouvelles pieces, pour empêcher que le vent ne chasse ou enleve cette traînée, on pratique une espece de rigole ou petit canal d’une ligne de profondeur, & de six de largeur ; il s’étend depuis la lumiere de la piece jusqu’à l’écu des armes du Roi. On prétend que M. du Brocard, tué à la bataille de Fontenoy où il commandoit l’artillerie, est l’auteur de cette petite addition au canon.

Le canon étant dirigé vers l’endroit où on veut faire porter le boulet, on met le feu à la traînée de poudre ; elle le communique à celle de la lumiere, & celle-ci à la poudre dont le canon est chargé : cette poudre, en s’enflammant, fait effort en se raréfiant pour s’échapper ou sortir de la piece ; & comme le boulet lui oppose une moindre résistance que les parois de l’ame du canon, elle le pousse devant elle avec toute la force dont elle est capable, & elle lui donne ainsi ce mouvement violent & prompt dont tout le monde connoît les effets.

Nos anciens artilleurs pensoient qu’en chargeant beaucoup les pieces, on faisoit aller le boulet plus loin ; & leur usage étoit de les charger du poids des deux tiers, & même de celui du boulet entier, pour lui donner le mouvement le plus violent.

Mais on a reconnu depuis, du moins en France, que la moitié ou le tiers de la pesanteur du boulet étoit la charge de poudre la plus convenable pour le canon.

Si toute la poudre dont le canon est chargé pouvoit prendre feu dans le même instant, il est clair que plus il y en auroit, & plus elle imprimeroit de force au boulet : mais quoique le tems de son inflammation soit fort court, on peut le concevoir partagé en plusieurs instans : dès le premier la poudre commence à se dilater, & à pousser le boulet devant elle ; & si elle a assez de force pour le chasser du canon avant qu’elle soit entierement enflammée, ce qui s’enflamme ou se brûle ensuite ne produit absolument aucun effet sur le boulet. Ainsi une charge d’une force extraordinaire n’augmente point le mouvement du boulet, & le canon doit seulement être chargé de la quantité de poudre qui peut s’enflammer pendant que le boulet parcourt la longueur de