Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/464

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelquefois par le vomissement des vers & des insectes.

Le vomissement est souvent sanguinolent ; on rend alors le sang tout fluide, il est souvent épais, noirâtre ; cela arrive sur-tout dans la maladie noire d’Hippocrate, dans l’inflammation & l’engorgement de l’estomac.

Souvent le vomissement est stercoreux, parce que le mouvement retrograde de l’estomac & des intestins rappelle de ces cavités les matieres stercorales, il y a des vomissement où l’on évacue du pus & une matiere sanieuse. On voit des malades rendre par le vomissement des masses charnues & membraneuses qui s’étoient engendrées dans leur estomac.

On voit que la cause prochaine qui dispose au vomissement est la stimulation ou le tiraillement des fibres nerveuses de l’estomac & du duodenum, ou la matiere qui cause ce tiraillement est dans ces parties mêmes, ou dans d’autres plus éloignées, mais qui correspondent à celles-ci par des nerfs, de là naît la distinction du vomissement en symptomatique & en idiopathique, la cause matérielle de celui-ci est dans l’estomac même ou dans le duodenum ; celle de l’autre ou du symptomatique est plus éloignée, elle réside dans les intestins inférieurs, les conduits biliaires, les reins, la tête, ou quelqu’autre partie distante ou prochaine de l’estomac, elle dépend principalement du concours des parties, de la sympathie des nerfs ; c’est ainsi que les douleurs du foie, de la rate, des reins, de la vessie, les rétentions d’urine, la colique néphrétique, l’affection cœliaque, la hernie entérocele, épiplocele, périplocele, causent les vomissemens.

Le symptomatique est plus ordinaire que l’idiopathique, il paroît occasionné par le renversement des mouvemens des nerfs & des esprits, ce qui provient des chatouillemens différens ; c’est ainsi que l’imagination frappée de quelque chose de désagréable excite au vomissement ; c’est ainsi que les vers dans le nez, dans les intestins produisent le vomissement : Une plaie dans le cerveau excite le même symptome.

Prognostic. Le vomissement critique en général est salutaire. Le symptomatique est mauvais ; le pire de tous est celui que cause une acrimonie subtile qui irrite les nerfs.

Le vomissement violent avec toux, douleur, obscurcissement de la vue, pâleur, est dangereux ; car il peut causer l’avortement, une descente, repousser la matiere arthritique, dartreuse, érésypélateuse, vérolique sur quelques parties nobles, au grand détriment du malade ; il occasionne quelquefois la rupture de l’épiploon, le vomissement devient mortel dans ceux qui sont disposés aux hernies, ou qui en sont attaqués, car il y produit un étranglement.

Les vomissemens bilieux poracés, érugineux, sont effrayans ; ils menacent d’inflammation.

Le vomissement causé par des vers qui corrodent l’estomac, sur-tout si l’on rend des vers morts, & qu’il y ait cessation des symptomes les plus formidables, avec des convulsions violentes dans les membres, c’est l’indication d’un sphacele qui détruit les vers & les malades.

Le vomissement fétide n’augure jamais rien de bon, attendu qu’il indique une corruption interne.

Le vomissement de sang continué long-tems & violent ne peut que terminer bientôt la vie du malade.

Le vomissement qui dure depuis six mois & plus, qui est accompagné de chaleur & de fievre lente avec extenuation par tout le corps, donne lieu de soupçonner oue l’estomac est ulcéré.

Souvent le vomissement se guérit de lui-même, parce qu’il détruit la cause morbifique qui le produisoit ; c’est ainsi que les matieres peccantes étant éva-

cuées & emportées cessent d’irriter l’estomac. Dans

ce sens l’émétique est salutaire dans le vomissement, & le proverbe qui dit vomitus vomitu curatur, se trouve vrai. C’est le sentiment d’Hippocrate, Epid. l. VI. & la maxime qui dit que les contraires se guérissent par les contraires, n’est pas moins vraie dans ce cas.

Le traitement du vomissement demande que l’on emporte les causes qui le produisent, & que l’on emploie ensuite les remedes calmans, restaurans & prophilactiques : ainsi la premiere indication consiste à évacuer la matiere peccante par le vomissement, si cette voie est nécessaire.

On commence dans l’acrimonie par saigner le malade, pour diminuer la contraction spasmodique de l’estomac, c’est ce qui se pratique aussi dans le vomissement de sang, dans la chaleur d’entrailles ; ensuite on ordonne l’émétique en lavage, le tartre stibié, comme nous l’avons dit en son lieu (voyez Émétique) ou l’ipécacuanha, à la dose de six grains, lorsque la matiere peccante est une humeur glaireuse qui corrode & irrite les tuniques de l’estomac. Ce végétal résineux opere de même dans le vomissement, que dans la dyssenterie, contre laquelle il est regardé comme spécifique.

On peut encore évacuer & calmer tout-à-la-fois par un purgatif ordonné de la façon suivante. Prenez de manne deux onces, de catholicon double une once, de sirop violet une once, d’eau de pavot rouge six onces ; faites du tout une portion purgative & calmante.

La seconde indication dans le vomissement consiste à calmer les spasmes, les convulsions & les tiraillemens de l’estomac par les remedes appropriés.

Dans le vomissement bilieux, on évacuera la bile surabondante, on la délayera par les amers, les purgatifs minoratifs, comme la casse, la manne, la rhubarbe, le rapontic & autres.

Dans le vomissement de sang, on emploiera la saignée réitérée, on évitera l’émétique, à-moins qu’il n’y eût saburre ; on emportera ce mal par les eaux acidules, les aposèmes & les juleps astringens & anodins.

Mais on doit prendre garde de tourmenter le malade par les remedes astringens dans aucun vomissement ; si l’on n’a pas eu le soin auparavant d’emporter les matieres âcres & irritantes, autrement on fatigueroit beaucoup, & on ne feroit qu’attirer des inflammations sur l’estomac ou les intestins. Ainsi dans le vomissement sympathique & symptomatique, il faut songer avant toutes choses à attaquer la cause éloignée qui produit le vomissement. Ainsi, on doit commencer par soulager le mal de tête, la migraine, les plaies, les contusions du cerveau, les convulsions des méninges ; on emportera la fievre, les vers, la colique néphrétique, on remettra la hernie, on fera rentrer le sac herniaire, s’il est possible, on procurera le rétablissement des évacuations ordinaires, dont la suppression auroit pu causer le vomissement ; c’est ainsi que l’écoulement des menstrues, le flux hémorroïdal rétabli guérissent le vomissement causé par leur suppression.

Dans le vomissement avec cardialgie continuelle & accompagné de vapeurs, ou précédé de spasme & de convulsion, on ordonnera les remedes antispasmodiques, tels que les teintures de castor, les huiles de succin, les teintures de fleurs de tilleul, de pivoine, l’eau de cerise noire, l’opium & ses préparations, les gouttes d’Angleterre, l’huile douce de vitriol, le souffre anodin de vitriol.

Dans le vomissement avec ulcere à l’estomac, on aura soin de penser à cet ulcere ; pour remplir les indications qu’il présente, & soulager le malade autant qu’il est possible, on doit éviter tout aliment âcre,