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SOSICURŒ, (Géog. anc.) peuple de l’Inde, en-deçà du Gange, & selon Ptolomée, l. VII. c. j. dans le golfe Colchique. Castald dit que le nom moderne est Jacamcuri. (D. J.)

SOSIPOLIS, s. m. (Mythol. grecq.) dieu des Eléens. Pausanias raconte que les Arcadiens ayant fait une grande irruption en Elide, les Eléens s’avancerent contre eux pour éviter la prise de leur capitale. Comme ils étoient sur le point de livrer bataille, une femme se présenta aux chefs de l’armée, portant entre ses bras un enfant à la mamelle, & leur dit, qu’elle avoit été avertie en songe que cet enfant combattroit pour eux. Les généraux éléens crurent que l’avis n’étoit pas à négliger ; ils mirent cet enfant à la tête de l’armée, & l’exposerent tout nud ; au moment du combat cet enfant se transforma tout-à-coup en serpent, & les Arcadiens furent si effrayés de ce prodige, qu’ils se sauverent ; les Eléens les poursuivirent, en firent un grand carnage, & remporterent une victoire signalée.

Comme par cette avanture la ville d’Elis fut sauvée, les Eléens donnerent le nom de Sosipolis à ce merveilleux enfant, bâtirent un temple à sa gloire, & instituerent une prêtresse particuliere pour présider à son culte. Le temple étoit double : la partie antérieure étoit consacrée à Lucine, qui selon l’opinion des Eléens, avoit singulierement présidé à la naissance de Sosipolis. Tout le monde jouissoit d’une entrée libre dans cette partie du temple ; mais dans le sanctuaire du dieu, personne n’y entroit que la prêtresse qui même, pour exercer son ministere, se couvroit la tête d’un voile blanc.

Les filles & les femmes restoient dans le temple de Lucine, chantoient des hymnes & brûloient des parfums en l’honneur du dieu d’Elide. On représentoit ce dieu sous la forme d’un enfant avec un habit de plusieurs couleurs, & semé d’étoiles, tenant d’une main une corne d’abondance.

On peut croire que les chefs des Eléens pour effrayer leurs ennemis, & donner du courage à leurs troupes, s’aviserent du stratagême d’exposer un enfant à la tête du camp, & de substituer ensuite avec adresse, un serpent à la place. Enfin on fit intervenir la religion pour soutenir une ruse qui avoit si bien réussi. Voilà le premier tome de la Pucelle d’Orléans.

Jupiter est aussi quelquefois nommé Sosipolis, c’est-à-dire sauveur de la ville. (D. J.)

SOSPELLO, (Géog. mod.) petite ville des états du roi de Sardaigne, dans le comté de Nice, entre Nice & Cony. Elle fut prise en 1692 par les François, qui la rendirent au duc de Savoie par la paix de 1696.

Raynaud (Théophile), l’un des fameux jésuites du xvij. siecle, naquit à Sospello, passa presque toute sa vie en France, & mourut à Lyon en 1663, à 79 ans, selon M. Gallois.

Le P. Raynaud étoit extrèmement laborieux, comme le prouve le nombre de livres qu’il a composés. Il en publia quelques-uns qui furent à son grand regret, flétris par l’inquisition ; mais il déchargea sa colere sur les Jacobins, par un ouvrage où il ramassa une infinité de choses tirées de leurs écrits, qui n’avoient pas été censurées, quoiqu’elles le méritassent. On ne sauroit nier qu’il n’eût l’esprit satyrique, l’imagination vive & une mémoire prodigieuse. Son style est obscur, à cause qu’il affecte de se servir de termes difficiles à entendre, & de mots tirés du grec.

Il maltraita les Jansénistes qui ne l’ont pas épargné à leur tour ; mais les Carmes l’ont beaucoup loué, & ils lui rendirent les honneurs funebres dans tous les couvens de leur ordre. Ce fut à cause de l’ouvrage qu’il avoit fait sur le scapulaire. Guy Patin étoit aussi

de ses bons amis, & trouvoit beaucoup de doctrine dans tous ses ouvrages ; ce n’est pas un petit éloge, car l’édition qu’on en a faite à Lyon en 1665, comprend 20 volumes in-fol. & ce qui est fort étrange, le libraire ne s’y est pas ruiné.

Au reste, le P. Raynaud a si souvent déguisé son nom à la tête de ses livres, que M. Baillet n’a pas eu le bonheur de pouvoir toujours découvrir cette supercherie. Hurtado moine espagnol, a jetté bien des railleries, non seulement sur les divers noms que prenoit le P. Raynaud, mais aussi sur les titres que ce pere donnoit à ses ouvrages. Il faut pourtant convenir que ses titres étoient quelquefois ingénieux. Qui ne voudroit lire, par exemple, un ouvrage intitulé, les spiritualités hétéroclites, & les anomalies de la piété. C’est le titre du quinzieme & du seizieme volume des œuvres de ce jésuite. Voilà donc, dira-t-on, des hétéroclites dans la religion, aussi bien que dans la grammaire ; y voilà des anomalies, aussi bien que dans la lune : on ne peut se dispenser d’acheter un ouvrage qui nous apprend des choses si singulieres. (D. J.)

SOSPITA, (Mythol.) c’est-à-dire salutaire ; surnom de Junon, parce qu’elle veilloit à la salubrité de l’air, dont l’intempérie cause les maladies. Cette déesse, qui est souvent prise pour l’air même, avoit trois temples à Rome sous le nom de Juno sospita, & les consuls, avant que d’entrer en charge, alloient lui offrir un sacrifice. (D. J.)

SOSSINATI, (Géog. anc.) peuples de l’île de Sardaigne. Strabon, lib. V. pag. 225. les compte au nombre des peuples montagnards qui habitoient dans des cavernes, & qui bien qu’ils eussent des terres propres à porter du blé, les négligeoient, aimant mieux piller les terres des autres, tantôt dans l’île, tantôt dans le continent opposé, sur-tout les terres des Pisans. (D. J.)

SOSSIUS, (Géog. anc.) fleuve de la Sicile, Ptolomée, l. III. c. iv. le marque sur la côte méridionale, entre la ville Pintia & l’embouchure du fleuve Isburus. Le nom moderne est Calia Bellota selon Fazel, & Pulici selon Léander. (D. J.)

SOT, FAT, IMPERTINENT, (Gram.) ce sont là de ces mots dans toutes les langues qu’il est impossible de définir, parce qu’ils renferment une collection d’idées qui varient suivant les mœurs dans chaque pays & dans chaque siecle, & qu’ils s’étendent encore sur les tons, les gestes & les manieres.

Il me paroît en général que l’épithete de fat, de sot & d’impertinent, prise dans un sens aggravant, n’indiquent pas seulement un défaut, mais porte avec soi l’idée d’un vice de caractere & d’éducation. Il me semble aussi que la seconde épithete attaque plus l’esprit, & les deux autres les manieres ; c’est en vain qu’on fait des leçons à un sot, la nature lui a refusé les moyens d’en profiter. Les discours les plus raisonnables sont perdus auprès d’un fat ; mais le tems & l’âge lui montrent quelquefois l’extravagance de la fatuité. Ce n’est qu’avec beaucoup de peine qu’on peut venir à bout de corriger un impertinent.

Le sot est celui qui n’a pas même ce qu’il faut d’esprit pour être un fat. Un fat est celui que les sots croient un homme d’esprit. L’impertinent est une espece de fat enté sur la grossiereté.

Un sot ne se tire jamais du ridicule, c’est son caractere. Un impertinent s’y jette tête baissée, sans aucune pudeur. Un fat donne aux autres des ridicules, qu’il mérite encore davantage.

Le sot est embarrassé de sa personne. Le fat est rempli de l’amour de la science, avec une sorte de hauteur pour les autres. L’impertinent passe à l’effronterie.

Le sot, au-lieu de se borner à n’être rien, veut être quelque chose ; au-lieu d’écouter, il veut par-