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fibres. Elle pousse d’abord six ou sept feuilles, & quelquefois davantage, longues, médiocrement larges, lisses, semblables à celles du lis, mais plus petites, ordinairement marquées en dessus de quelques taches d’un rouge brun, & quelquefois sans taches. Sa tige est haute d’environ un pié, ronde, striée, embrassée par une ou deux feuilles ; elle porte en sa sommité un long épi de fleurs agréables à la vue, purpurines, nombreuses, un peu odorantes, blanchâtres vers le centre, & parsemées de quelques points d’un pourpre foncé.

Chaque fleur est composée de six pétales inégaux, dont les cinq supérieurs forment, en se courbant, une sorte de coëffe. Elle commence par une maniere de tête ou de casque, & finit par une pointe aiguë comme un éperon. Les fleurs sont plus ou moins serrées dans l’épi. Quand la fleur est passée, le calice devient un fruit semblable à une lanterne à trois côtés, qui contient des semences aussi fines que de la sciure de bois.

Cette plante fleurit vers la fin de Mai : on la trouve fréquemment dans les prés & les broussailles. M. Vaillant, après avoir observé que quelquefois ses feuilles se couchent à terre, ajoute qu’il a compté jusqu’à quarante trois fleurs sur un pié.

L’orchis ou satytion à larges feuilles, orchis militaris major, I. R. II. 432. a la racine composée comme l’espece précédente, de deux bulbes, ou tubercules charnus, en forme de grosses olives. Elle pousse une tige à la hauteur de près d’une coudée, chargée en sa sommité d’un épi long, pyramidal, plus ou moins serré : il porte des fleurs amples, belles à la vue, blanchâtres en-dedans, pointillées de taches purpurines, plus rouges en-dehors, d’une odeur forte & désagréable, lesquelles représentent comme un homme armé, ou un soldat couvert d’un casque, sans mains & sans piés. Ses feuilles sont très amples, longues & larges tout-ensemble, & sortent de terre, comme la plûpart des orchis, dès le mois de Novembre.

Cette orchis fleurit en Mai. Ses fleurs ont une odeur de boue insupportable, & varient beaucoup pour la couleur. On lui trouve, de même qu’aux autres especes d’orchis bulbeux, une bulbe flasque, & l’autre pleine. C’est que tous les ans la bulbe de l’année précédente se flétrit, & qu’il en renaît une nouvelle à la place.

Jean Bauhin observe sur les orchis bulbeux qu’il faut prendre pour l’usage qu’on en veut faire, non les deux bulbes, mais la plus dure, la plus pleine, & celle qui a le plus de suc. Toutes les especes d’orchis contiennent beaucoup d’huile & de sel volatil. On en fait sécher les racines pour l’usage ; mais entre les préparations différentes des racines ou bulbes d’orchis, il nous paroît que la meilleure est celle qui est décrite par M. Geoffroy dans les mém. de l’acad. des Scienc. année 1740.

Il faut prendre les bulbes d’orchis les mieux nourries, leur ôter la peau, les jetter dans l’eau froide ; après qu’elles y ont séjourné quelques heures, on doit les cuire dans une suffisante quantité d’eau, & les faire égoutter : ensuite on les enfilera pour les faire sécher à l’air, choisissant pour cette préparation un tems sec & chaud. Elles deviennent ainsi transparentes, très-dures, & ressemblent à des morceaux de gomme adragant. On les peut conserver saines tant qu’on voudra, pourvu qu’on les tienne dans un lieu sec ; au lieu que les racines qu’on a fait sécher sans cette préparation, s’humectent & moisissent pour peu que le tems soit pluvieux pendant plusieurs jours.

Les bulbes d’orchis ainsi préparées, se mettent en poudre aussi fine que l’on veut : on en prend depuis un scrupule jusqu’à une drachme, qu’on humecte

peu-à-peu d’eau bouillante ; la poudre s’y fond entierement, & forme un mucilage qu’on peut étendre par ébullition dans une chopine ou trois demi-setiers d’eau : l’on est le maître de rendre cette boisson agréable, en y ajoutant du sucre & de légers parfums. Cette poudre peut aussi s’allier au lait, qu’on conseille ordinairement aux malades attaqués de la poitrine. C’est un remede très-adoucissant, propre à réprimer l’âcreté de la lymphe, & convenable dans la phthisie, & dans les dyssenteries bilieuses. (D. J.)

ORCHITES, (Hist. nat.) nom donné par les Naturalistes à une pierre qui en renferme une autre qui a la forme d’un testicule. Elle se nomme aussi énorchites & triorchites. Diorchites est celle qui renferme deux pierres de cette forme ; triorchites, celle qui en renferme trois. Voyez Klein, nomenclator litologicus.

ORCHOMENE, (Géog. anc.) ancienne ville de Grece en Béotie, une des plus belles & de plus agréables de cette province. Elle porta d’abord le nom de Minyée, comme Pausanias nous l’apprend, & comme Pline nous le confirme, liv. IV. ch. viij. en ces mots, Orchmenus Minyæus antea dictus.

Orchomenus étoit située au couchant du lac Copaïde, à l’embouchure d’une riviere dans laquelle tomboit l’Hippocrene, si fameuse dans les écrits des poëtes. C’est encore à Orchomene qu’étoit la fontaine Acidalie, où les Graces venoient se baigner. C’est à Orchomene que les trois déesses avoient un temple, qui passoit pour un des plus anciens de toute la Grece ; enfin, c’est à Orchomene que Sylla, général de l’armée romaine contre Mithridate, sut par un trait mâle & délicat, rassurer le courage de ses troupes qui l’abandonnoient. Il s’arrêta seul, & leur dit : « Enfans, au moins de retour chez vous, quand on vous demandera où vous avez laissé votre général, n’oubliez pas de dire que c’est à Orchomene ». Il arrêta par ce peu de mots les fuyards, & gagna la bataille.

Il ne faut pas confondre l’Orchomene de Béotie avec l’Orchomene d’Arcadie. Homere, avant Pausanias, les a très-bien distinguées. Il caracterise cette derniere dans l’Iliade, B. v. 606. par l’épithete de riche en troupeaux. Cette Orchomene d’Arcadie, que Pline, liv. IV. ch. vj. appelle Orchomenum, étoit auprès de Phénée, le lac de Phénée entre deux, à l’orient du fleuve Ladon. (D. J.)

ORCHOMÉNOS, (Géog. anc.) riviere de Grece dans la Béotie, auprès du temple de Trophonius, qui, comme on sait, étoit dans le voisinage de Lébadie. Pline, liv. XXXI. ch. ij. parlant de cette riviere, dit qu’elle a deux sources, dont l’une donnoit de la mémoire, & l’autre procuroit l’oubli de toute chose. Il ne falloit pas s’y méprendre, quand on alloit y puiser de l’eau pour en boire.

ORCO, (Géog.) riviere d’Italie en Piémont. Elle a sa source dans les montagnes, au midi du duché d’Aouste, & va tomber dans le Pô, au-dessus & auprès de Chivas.

ORCOMENO, (Géog.) bourg de Grece en Livadie, au pays Atramelipa, à 5 lieues de la ville de Livadie. Il appartient aux Turcs. C’est l’ancienne Orchomene de Béotie, dont Homere, Pindare, Pausanias, Thucydide & Pline ont tant parlé, mais qui ne conserve que le seul nom de sa gloire passée, & le triste honneur d’être le débris d’une des plus anciennes villes du monde.

ORCOMOSION, (Géog. anc.) lieu de l’Attique, ou territoire d’Athenes ; c’est-là que fut jurée la paix entre les Amazones & Thésée. Le verbe grec ὀρϰωμοσεῖν, veut dire jurer une paix, une alliance, & ὀρϰωμόσιον signifie le serment prêté en pareilles occasions.