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dont la partie inférieure applatie embrasse le dessous des brancards, & la supérieure terminée en vis est reçue dans un écrou que l’on manœuvre avec une clé percée d’un trou quarré qui embrasse le corps de l’écrou.

La piece de bois à refendre ayant donc été amenée sur le chariot, & l’extrémité par laquelle le sciage doit finir ayant été posée sur un coussinet, ou sur l’entretoise du chariot qu’elle couvre d’environ deux pouces, on place un coussinet sous cette même piece à l’extrémité par laquelle la scie doit entrer, sur lequel on l’affermit : ce coussinet est fendu verticalement par autant de traits qu’il y a de feuilles de scie, & dans lesquels pour lors les feuilles sont engagées de toute leur largeur, & encore deux ou trois pouces au-delà. C’est sur cet excédent que repose la piece de bois que l’on veut débiter, où elle est affermie par quelqu’un des moyens indiqués ci-dessus.

Au dessous & tout le long des deux brancards sont fixées deux cramailleres de fer dentées dans toute leur longueur ; les dents de ces cramailliers engrenent dans des lanternes de même métal fixées sur un arbre de fer horisontal, qui porte une roue dentée en rochet. C’est par le moyen de cette roue que le chariot, & par conséquent la piece de bois dont il est chargé, avancent à la rencontre de la scie.

Le rochet dont on vient de parler est poussé du sens convenable pour faire avancer le chariot sur la scie à chaque relevée, & cela par une bascule dont l’extrémité terminée en pié de biche, s’engage dans les dents du rochet pour empêcher celui G de rétrograder. Il y a un cliquet ou volet mobile à charniere sur le plancher, & disposé de maniere à retomber dans les dentures à mesure qu’elles passent devant lui. Voyez les fig. & leur explication en Charpenterie.

C’est du nombre plus ou moins grand des dents du rochet, que dépend le moins ou le plus de vitesse du chariot, & par conséquent du sciage. Cette vitesse doit être moindre quand le chassis porte plusieurs scies que quand il n’en porte qu’une, puisque la résistance qu’elles trouvent est proportionnelle à leur nombre. On refend de cette maniere des troncs d’arbres jusqu’en dix-huit ou vingt feuillets de trois ou quatre lignes d’épaisseur, qu’on appelle feuillets d’Hollande, & dont les Menuisiers, Ebénistes, &c. font l’emploi.

Reste à expliquer comment, lorsque la piece est sciée sur toute sa longueur à un pouce ou deux près, la machine s’arrête d’elle-même : pour cela il y a une bascule par laquelle la vanne qui ferme le coursier est tenue suspendue, & le coursier ouvert : la corde par laquelle l’autre extrémité de la bascule est tenue abaissée, est accrochée à un déclict placé près d’une des coulisses du chassis de la scie, & tellement disposée, que lorsque l’extrémité du chariot est arrivée jusque là, un index que ce même chariot porte fait détendre le déclict qui lâche la corde de la bascule de la vanne ; cette vanne chargée d’un poids venant à descendre, ferme le coursier & arrête par ce moyen toute la machine.

Pour amener les pieces de bois que l’on veut scier sur le chariot, il y a dans la cave du moulin un treuil armé d’une lanterne, disposé parallelement à l’axe de la roue à aubes. Ce treuil, monté par une de ses extrémités sur quelques-unes des pieces de la charpente qui, dans la cave du moulin, soutiennent les pivots de la roue à aubes & de la lanterne de la manivelle, est soutenu, du côté de la lanterne, par un chevron vertical ; l’extrémité inférieure de ce chevron, terminée en tenon, est mobile dans une mortoise pratiquée à une semelle, posée au fond de la cave du moulin ; l’extrémité supérieure du même chevron traverse le plancher par une ouverture aussi large que le chevron est épais, & longue autant

qu’il convient pour que la partie supérieure de ce chevron, poussée vers l’une ou l’autre extrémité de cette ouverture, puisse faire engrener ou desengrener la lanterne du treuil avec les dents de l’hérisson. On arrête le chevron dans la position où il faut qu’il soit pour que l’hérisson puisse mener la lanterne, soit avec une cheville qui traverseroit l’ouverture qui lui sert de coulisse, ou avec un valet ou étai assemblé à charniere à l’autre extrémité de la même coulisse, & dont l’extrémité, terminée en tranchant, s’engage dans des crans pratiqués à la face du chevron.

Lorsqu’on veut faire cesser le mouvement du treuil, il n’est besoin que de relever le valet & de repousser le chevron vers l’autre extrémité de la coulisse où il reste arrêté par son propre poids, sa situation étant alors inclinée, & la lanterne, n’engrenant plus avec l’hérisson, cesse de tourner.

La corde du treuil, après avoir passé, en montant obliquement sur le plancher du moulin, par une ouverture où il y a un rouleau, est étendue horisontalement le long des coulisses du chariot, & est attachée à un autre petit chariot monté sur quatre roues, sur lequel on charge les pieces de bois que l’on veut amener dans le moulin pour y être débitées ; la même corde peut aussi servir à ramener le chariot entre les longues coulisses, après que la piece de bois dont il est chargé auroit été débitée dans toute sa longueur. Pour cela il faut relever l’extrémité de la bascule qui engrene dans les dents du rochet & le cliquet qui l’empêche de rétrograder ; on amarre alors la corde du treuil à la tête du chariot, après cependant qu’elle a passé sur une poulie de retour ; &, relevant la vanne du coursier, la roue à aubes venant à tourner fera aussi tourner le treuil dont la lanterne est supposée engrener dans l’hérisson, & fera, par ce moyen, rétrograder le chariot dont les cremaillieres feront en même tems rétrograder le rochet, jusqu’à ce que la scie soit entierement dégagée de la piece qu’elle avoit refendue. En laissant alors retomber la vanne, elle fermera le coursier, & la machine sera alors arrêtée.

Dans les pays de montagnes où on trouve des chûtes d’eau qui tombent d’une grande hauteur, il y a des moulins à scier plus simples que celui dont on vient de voir la description. Ils n’ont ni hérisson ni lanterne, le mouvement de la scie dépendant immédiatement du mouvement de la roue à aubes, sur laquelle l’eau est conduite par une beuse ou canal de bois, dont l’ouverture est proportionnée à la grandeur des aubes qui peuvent être faites en coquilles, & à la quantité d’eau dont on peut disposer, ou on se sert d’une roue à pots dans lesquels l’eau est conduite par le même moyen.

Dans ces sortes de moulins, l’arbre de la roue porte la manivelle qui, par le moyen de la châsse, communique le mouvement à la scie. Le chariot & le reste est à-peu-près disposé de même.

La vîtesse de la scie est d’environ soixante-douze ou quatre-vingt relevées par minute, & la marche du chariot pendant le même tems est d’environ dix pouces ; ainsi, en une demi-heure, une piece de bois de vingt-cinq piés peut être refendue d’un bout à l’autre. Pour ce qui concerne la forme des dentures des scies, voyez l’article Scie & Scieur de long. (D)

Mouiin, en terme d’Epinglier-Aiguilletier, est une boîte de bois, longue & ronde, garnie de plusieurs bâtons comme une cage d’oiseau, & surpassée par un autre plus gros qui la traverse dans toute sa longueur. Ce bâton a à l’un de ses bouts une manivelle avec laquelle on tourne le moulin sur deux montans. Voyez les figures, Planches de l’Aiguillier-Bonnetier. Une de ces figures, même Pl. représente l’ar-