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mulus[1], couramment exploitée seulement par les poêtes du siècle d’Auguste[2] : on peut en induire que, sous l’influence de la mythologie hellénique qui finit d’assimiler Mars à l’Arès des Grecs, le vocable de Quirinus devint la propriété du héros indigène Romulus, fils de Mars. Alors les divinités, tant du vieux Quirinus des Sabins que du Mars romain désigné par ce vocable, ne furent plus que des souvenirs archéologiques. Mommsen, d’ailleurs, a dit avec raison que, sauf l’inscription de l’an 204, il n’y a aucun témoignage positif pour affirmer la substitution de Mars lui-même au Quirinus primitif[3].

La fête des Quirinalia, qui tombait au 17 février, période où commençait à souffler le Favonius et dont on datait le printemps en Italie[4], coïncidait avec le dernier jour des fornacalia. celui que l’on nommait la Fête des Fous : Stultarum Ferine. Nous renvoyons à cet article[5], pour les rapports que cette fête a avec l’organisation des Curies. Nous n’avons aucun détail sur les pratiques propres aux Quirinalia. Ovide les rattache à la fondation du temple qui donna son nom à la colline du Quirinal[6]. Quant à la dédicace, elle était l’objet d’une fête spéciale fixée au 19 juin[7]. L’édifice, un des plus anciens de Rome, avait été restauré en 293 av. J.-C. par L. Papirius Cursor, qui en avait fait un monument magnifique pour l’époque[8] : tombé en ruines comme beaucoup d’autres sanctuaires consacrés aux dieux primitifs, il fut relevé par Auguste en l’an 16 av. J.-C.[9]. Quirinus avait, à Rome, d’autres temples, un notamment auprès de la porte qui lui était redevable de son nom[10].

Il n’existe aucune représentation figurée de Quirinus ; seule sa tête fut représentée sur des monnaies de la gens Memmia et son nom.se trouve sur des monnaies de la gens Fabia qui, à l’époque de l’invasion gauloise, offrait des sacrifices au dieu sur le Quirinal[11]. On ne trouve pas de trace de ce culte ailleurs en Italie, encore moins dans les lointaines provinces. J.-A. Hild.

QUIRITIUM JUS : jus p. 739].

QUOD JUSSU ACTIO. — Action donnée par le droit prétorien contre le père de famille à raison des engagements contractés sur son ordre [ou, selon une autre opinion, sur son adhésion et sa déclaration formelle d’assumer les conséquences de l’acte] par un fils de famille ou par un esclave soumis à sa puissance[12]. Le fils de famille avait pu s’obliger valablement jure civili ; mais le père n’était pas tenu de son obligation. L’esclave était en principe incapable de s’obliger. Pour donner du crédit aux mandataires naturels du père, le préteur accorda aux tiers l’action du contrat pour le tout in solidum, avec une modification, quod jussu, comme action adjecticiae qualitatis[13]. Le créancier agit ici jure praetorio ; la ratification donnée après coup par le père de famille a le même effet que son mandat[14]. Les jurisconsultes ont même fini par admettre, dans le cas où le préteur aurait accordé l’action quod jussu, une action civile ou condictio fondée sur l’équité, parce qu’il y a eu ici res credita de la part de celui qui a suivi la foi du maître[15]. G. Humbert [Ch. Lécrivain].

Bibliographie : [Accarias, Précis de droit romain, 3e éd. Paris, 1882, t. II, n° 278 ; Girard, Manuel de droit romain, Paris, 1890, p. 659-660].

QUORUM BONORUM. — Interdit restilutoire accordé par le préteur à l’héritier prétorien, bonorum possessor, pour obtenir la possession des choses corporelles héréditaires détenues soit par un tiers qui se prétendait héritier (possessor pro herede), soit par un possesseur pro possessore, dépourvu de titre[16]. Par cet interdit, le successeur prétorien triomphait au possessoire même contre l’héritier du droit civil et aussi contre celui qui, par dol, avait acquis par l’usucapio lucrativa pro herede, jadis autorisée au profit du possesseur même de mauvaise foi des choses héréditaires, et dont les effets n’avaient été anéantis que par un sénatus-consulte rendu sous Hadrien[17]. [Cet interdit, déjà connu de Cicéron[18], est sans doute la plus ancienne voie de droit donnée au bonorum possessor. Il n’était pas admissible contre ceux qui possédaient à d’autres titres particuliers ; et on avait dû créer l’interdit quod legatorum contre ceux qui avaient pris et possédaient les choses héréditaires pro legato. De même les effets d’une bonorum possessio spéciale, accordée par décret, étaient assurés par l’interdit ne vis fiat ei qui in possessionem missus erit[19]. L’interdit quorum bonorum assurait au possesseur l’avantage du rôle de défendeur à la pétition d’hérédité et l’avantage d’usucaper pro herede en l’absence d’héritier civil ou en cas d’inaction de sa part. Il devait prouver qu’il avait obtenu la bonorum possessio en fait et en droit[20], et qu’il n’avait pas perdu la possession une première fois acquise. Une loi de 374 déclare que la sentence en cette matière ne serait pas susceptible d’appel[21]. Quant aux effets, l’interdit ne tranchait pas la question d’hérédité[22].] Quand le possesseur avait la bonorum possessio cum re, il obtenait sans doute par l’interdit un succès définitif ; quand il ne l’avait que sine re, le vaincu pouvait intenter contre lui, avec les preuves nécessaires, la petitio hereditatis ; mais sous Justinien, à la suite de la fusion des droits prétorien et civil, la bonorum possessio fut toujours cum re, définitive, et on n’admit plus, comme à l’époque de Gaius, que le bonorum possessor pût l’emporter dans l’interdit sur le véritable héritier. G. Humbert [Ch. Lécrivain].

Bibliographie : Savigny, Verm. Schrift. Berlin, 1833, II. p. 216-320 ; Machelard, Théorie générale des interdits, Paris, 1854. p. 52 ; [Accarias, Précis de droit romain, 3e éd., 1882, t. II, nos 442, 458, 463, 467 ; Girard, Manuel de dr. romain, 1890, p. 787, 899-900].

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7-97. — CORBEIL. Imprimerie Éd. Cretz.
  1. Enn. ap. Cic. Rep. I, 41. 64 ; T.-Liv. I, 16 ; Dion. Hal. II, 36 ; cf. Preller-Jordan. II, 353.
  2. Hor. Od. III, 3, 15 ; Ov. Fast. II, 491 ; Luc. Phars. I. 197. Cf. Schwegler, Op. cit. p. 531. La légende des amours de Quirinus avec Hora, vieille divinité identifiée avec la Sabine Hersilia, est une fable inventée par Zénodote de Trézène, à qui Ovide l’emprunta ; Metam. XIV, 830 sq. ; cf. Plut. Quaest. rom. 40 ; Rom. 14 ; T.-Liv. I, 11, 2.
  3. Mommsen, C. inscr. lat. I, p. 22.
  4. Plin. Hist. nat. II, 122 ; XVI, 93 ; cf. Peler, Introd. aux Fast. d’Ovide, p. 22 sq.
  5. II, 2, p. 1254 ; cf. Varr. Ling. lat. VI, 13.
  6. A la légende aussi de l’apothéose de Romulus ; Fast. II, 491 ; 509 sq.
  7. Quirino in colle. Cal. Ven. Ov. Fast. VI, 796. Pour la topographie du temple, voir Becker, Topogr. p. 570 sq. ; Gilbert, Op. cit. I, p. 283 ; III, 369. Quirinus figurait dans la fête des volcanalia, le 23 août, à titre de génie secourable dans les incendies. Eph. epigr. I, p. 36, 230.
  8. Tit.-Liv. X, 46 ; il fut touché par la foudre en 207 ; Id. XXVIII, 11. Cf. Plin. Hist. nat. XV, 120 : deux myrtes plantés devant la façade symbolisaient sans doute l’union des Ramnes et des Sabins ; Preller-Jordan, I, 373.
  9. Mon. Anc. lat. IV. 6.
  10. Paul, p. 255 ; cf. Tit.-Liv. IV, 21 ; cf. Ov. Metam. XIV, 826 : trabeati forma Quirini.
  11. Mommsen, Roem. Muenzwesen, p. 642 ; Tit.-Liv. V, 46.
  12. QUOD JUSSU ACTIO. 1 Gai. 4. 70 ; Instit. 4, 7, 1 ; Dig. 15, 4, 1 ; C. Just. 4, 20, 1 ; C. Gregor. 3, 4 ; C. Th. 2. 31.
  13. Dig. 13, 4, 1.
  14. Dig. 15, 4, § 6, 5 ; 50, 17, 60.
  15. Instit. 4, 7, 8 ; Dig. 12, 1, 1, 29 ; 14, 3, 17 §, 3 ; 17, 2, 84 ; 12, 1, 9.
  16. QUORUM BONORUM. l Dig. 43. 2, 1-2 ; Inst. 4, 15, 3 ; Gai. 4, 144 ; 3, 34.
  17. Gai. 2, 52-57.
  18. Cic. Ad fam. 7, 21.
  19. Dig. 43-4.
  20. C. Just. 8. 2, 1.
  21. C. Th. 11, 36, 22.
  22. C. Just. 8, 2, 3.]