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SYRIE


258. Enfin Maacha (hébreu -.Ma’âkâh), Gen., xxii, 24, est le nom même du royaume araméen signalé plus haut.

2° Documents égyptiens et assyriens. — Les tribus araméennes, dont nous venons de montrer l’origine et Fextension d’après la Bible, et celles que nous allons signaler d’après les monuments anciens, n’occupaient qu’une partie de la Syrie. Si nous prenons ce pays dans toute son étendue, nous devrons y reconnaître, à côté des descendants d’Aram, une foule d’autres peuplades, dont le mélange présente à la géographie et à l’histoire de sérieuses difficultés. L’Écriture elle-même nous donne l’idée de ce mélange, lorsqu’elle parle des tribus primitives du pays de Chanaan. VoirCHANANÉENl, t. ir, col. 539. L’embarras n’est pas moindre quand il s’agit de distinguer, d’après les autres documents anciens, les divisions du territoire. Pour l’intelligence de cet article, nous n’indiquons que les régions principales : au midi le Haru, correspondant, selon certains auteurs, à la terre de Chanaan (voir Palestine, Noms, t. iv, col. 1975), VAmurru dans le Liban et l’Anti-Liban, lejpattupusau nord, le Naharîn et leMitanni du côté de l’Euphrate. Grâce aux monuments égyptiens et assyriens, nous pouvons aujourd’hui reconstituer en grande partie la géographie des vieilles cités syro-palestiniennes, dont la Bible seule a longtemps gardé les noms. C’est ainsi, en particulier, que les listes de Thothmès III et de Séti I er, et les tablettes d’El-Amarna nous permettent de dresser la carte du pays dès les premières conquêtes égyptiennes. Voir pour la Palestine les cartes des différentes tribus. Pour l’étude de ces documents géographiques, on peut consulter les ouvrages suivants : H. Brugsch, Geographische lnschriften altàgyptischer Denkmâler, Leipzig, 1857-1860, t. ii, p. 17-77 ; A. Mariette, Les Listes géographiques des pylônes de Karnak, Leipzig, 1875 ; G. Ma ?pero, Sur lesnoms géographiques de la Liste de Thoutmos III qu’on peut rapporter à la Judée, à la Galilée, deux extraits des Transactions of the Victoria lnstitute, avec cartes, 1886, 1888 ; W. Max Mùller, Asien undEuropa, p. 143267 ; Die Paluslinalisle Thutmosis 111, Berlin, 1907, dans les Mitteilungen der Vorderasiatischen Gesellschaft ; H. Clauss, Die Stâdte der Elvmarnabriefeund die Bibal, dans la Zeitschrift des Deutschen Palâstina-Vereins, Leipzig, t. xxx, 1907, p. 1-79 ; P. Dhorme, Lespays bibliques au temps d’El-Amarna, dans laiîevue biblique, 1908, p. 500-519 ; 19C9, p. 50-73, 368-385.

Si nous revenons maintenantaux tribus araméennes, nous verrons que leurs plus anciens représentants dans les inscriptions cunéiformes sont les Alflamû ou Ahlamê. On les trouve mentionnés dans les Lettres d’El-Amarna. Cf. H. Winckler, Die Thontafeln von Tell El-Amarna, n. 291, p. 387. Mais il est probable que nous avons là un nom collectif pour l’ensemble des tribus nomades araméennes, qui parcouraient soit la Mésopotamie, soit les régions babyloniennes etélamites.

Ceux dont la mention revient le plus souvent dans les documents assyriens sont les Puqudu, dont le nom, Peqôd, se lit dans deux passages de la Bible : Jer., l, 21 ; Ezech., xxiii, 23. Voir Peqod, col. 123. Il est permis de les regarder comme la plus importante des tribus araméennes de Babylonie. Malgré cela, il est encore difficile de déterminer leur territoire avec certitude. Cependant on les place généralement sur la frontière élamito-babylonienne, le long du fleuve Vknû (le Choaspes des classiques, la Kerha actuelle). Voir la carte de Babylonie, t. i, col. 1361.

Après eux viennent les Gambulu, dont Sargon, Annales, 264, soumit six cantons, à la tête desquels il plaça un gouverneur. Lme colonie de ce peuple dut être transplantée, c’est-à-dire déportée par les rois assyriens dans le nord de la Syrie, où Procope, Bell. Pers., i, 18, signale les ra[160-jXoi. Il existe encore aujourd’hui entre ginnesrîn, au sud d’AIep, et l’Eu phrate un village dont le nom Gabbûl ou Djebbûl représente celui de l’ancienne Gabbula et celui de la iribu araméenne.’Les monuments de Théglathphalasar III, de Sargon et de Sennachérib mentionnent, outre celles-ci, une foule d’autres peuplades araméennes. Voir plus loin, Histoire, pour les références. Nous ne pouvons citer que les plus importantes. Le nom des Itu’a revient souvent dans certains documents, mais nous n’avons rien de fixe sur leur demeure. Les Ifamrânu habitaient peut-être dans le nord de la Babylonie, non loin de l’Euphrate ; leur nom a probablement survécu dans le djebel Hamrîn ou la ligne de hauteurs qui sépare la Babylonie et l’Assyrie. Les Ragarânu font penser à la ville d’Agranum que Pline, H.N., i, 30, place en Babylonie, à Y’Agrûnia’, Hagrûnia’, du Talmud. Cf. A. Neubauer, La géographie du Talmud, Paris, 1868, p. 347. Les Nabatu sont regardés par un certain nombre d’auteurs comme les ancêtres des Nabuthéens ou Nabatéens ; la question est discutée. Voir Nabuthéens, t. IV, col. 1444. En tout cas, il faut les distinguer des Nabaitai, mentionnés dans d’autres inscriptions. Les premiers sont des araméens, les seconds des arabes. Voir Næaioth, t. iv, col. 1430. Les Rabilu rappellent, par leur nom, celui d’un ancien roi de Pétra, Pao6v)Xoç, Poiê-qloi. Nous pouvons ajouter les tribus suivantes : Rubu’, Luhûatu, Rapiqu, Ru’a, Labdudu, etc. Cf. Frd. Delitzsch, Wo lag das Paradies ? p. 237-241 ; M. Streck, Keilinschriftliche Beitràge zur Géographie Vorderasiens, Berlin, 1906, dans les Mitteilungen der Vorderasiatischen Gesellschaft.

3° Auteurs gréco-romains. — Les géographes classiques nous donnent de la Syrie une description plus ou moins complète selon les limites qu’ils envisagent. L’ensemble des renseignements fournis par Strabon, XVI, ii, 1-33, Pline, H. N., v, 13-21, et Ptolémée, v, 15, peut se réduire aux divisions suivantes. — 1. Au nord était la Commagène, entre le Taurus et l’Euphrate, avecSamosate, aujourd’hui Samsat, comme capitale.— 2. Au-dessous, la Cyrrhestique, ainsi appelée du nom de sa capitale, Cyrrhus, probablement représentée aujourd’hui par la village de Corus, au nord-ouest de Killis. — 3. Venait ensuite la Chalybonitide, qui tirait également son nom de la ville principale, Chalybon, mot qui s’est transformé en Haleb ou Alep. — 4. Plus bas encore, la Chalcidique, de Chalcis, actuellement Kinnesrin, sa capitale. — 5. La Séleucide s’étendait le long de la Méditerranée, depuis le golfe d’Issus jusqu’à la Phénicie, depuis l’Amanus jusqu’à la Cœlé-Syrie. Elle était aussi appelée la Tétrapole, à cause de ses quatre villes principales : Séleucie, Antioche, Laodicée et Apamée, dont Ptolémée fait des cantons distincts. — 6. La Cœlé-Syrie, avec Héliopolis, Baalbek, comme’capitale. Voir Cœlé-Syrie, t. ii, col. 820. — 7. La Palmyrène comprenait la partie du désert bornée au nord par la Chalybonitide et la Chalcidique, . à l’est par l’Euphrate, au sud par le grand désert d’Arabie, à l’ouest par la Séleucide ou plus directement par l’Apamène. Voir Palmyre, t. iv, col. 2070. — 8. La Damascéne ou pays de Damas. — 9. La Batanée ou pays de Basan. Voir Basan, t. i, col. 1486. Ces contrées formaient la Syrie proprement dite ; mais, dans 1° suite des temps, on appliqua ce nom à tout le pays qui s’étend, du nord au sud, de l’Amanus à la frontière égyptienne, et, de l’ouest à l’est, de la Méditerranée à l’Euphrate et au désert syro-arabe. C’est ainsi que-Strabon, xvi, p. 749, renferme dans la Syrie la Phénicie et la Judée.

On voit, en somme, que les documents bibliques, assyriens et gréco-romains s’accordent pour placer les peuples araméens-syriens au nord et au nord-est de la Palestine, jusqu’à l’Euphrate principalement, bien que plusieurs tribus soient disséminées au delà du fleuve.