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1926
SYRIAQUES (VERSIONS)


le contrôle. Enfin, M me A. S. Lewis a réédité le texte du Sinaï avac les dernières corrections et additions et les variantes du texte de Cureton, The old Syriac Gospels or Evangelion da-Mepharreshê, Londres, 1910.

II. COMPARAISON DES ANCIENNES VERSIONS ! DiateS saron (T.), Pesckitto (P.), Cureton (Se), Sinaiticus (Ss.j. — Les manuscrits Se et Ss représentent pour

M. Burkitt l’évangile « des séparés » lj *-f ft V » « =

damefarresê) par opposition à l’évangile « des mêlés » ou diatessaron. Voici la synthèse que ce savant a mise en tête de son édition signalée plus haut ; voir aussi Urchristentum im Orient, von V. Crawford Burkitt, deutsch von Erwin Preuschen, Tubingue, 1907, in-8°, p. 25-51 ; R. Duval, La littérature syriaque, in-8°, Paris, 1907, p. 38-40. Le Diatessaron est la forme la plus ancienne de l’évangile syriaque. Il a été écrit primitivement en grec, probablement à Rome, par Tatien, 4e disciple de Justin le martyr, et traduit en syriaque durant la vie de Tatien, vers 170 de notre ère. Cela ne peut être plus tard que 172-173 ; quelques années avant que Hystaspe ne convertit Bardesane et que Palout ne fût ordonné comme évêque d’Édesse par Sérapion d’Antioche, car Sérapion était un grand adversaire des évangiles extracanoniques, cf. Eusèbe, H. E., VI, 12, t. xx, col. 545, et il n’est pas probable que Palout, ordonné et dirigé par lui, aurait permis l’introduction du Diatessaron, surtout de la part d’un homme à tendances hérétiques comme Tatien. Comme on peut l’attendre d’un document d’origine occidentale, le texte du Diatessaron est proche parent du Codex Bezse et des différentes formes de l’ancienne version latine. Tatien, aidé de ses compagnons, fut peut-être été le premier missionnaire de la vallée de l’Euphrate ; il aurait composé l’harmonie des Évangiles pour seconder leurs travaux et ce pourrait être là le premier Évangile que l’on ait connu à Édesse.

Le texte de l’Évangile « séparé » peut avoir été apporté d’Antioche par Palout, mais il trouva le Diatessaron en faveur et ne put le remplacer. Le texte de l’Évangile « séparé », en tant que traduction directe du grec, reproduit pour nous le texte qui « tait en usage à Antioche, à la fin du ue siècle, texte d’une grande valeur critique, très médiocrement représenté dans lès manuscrits grecs existants. L’emploi du Diatessaron par le traducteur a introduit des leçons qui appartiennent aux textes ayant cours dans les pays occidentaux. Ss et Se contiennent tous deux des leçons qui ont été rendues conformes au Diatessaron par les copistes. Se représente, en outre, un texte qui a été en partie revisé sur des manuscrits grecs postérieurs. La version du Nouveau Testament introduite par Palout comprenait les Actes et les Épîtres de saint Paul ; il apporta aussi une édition de l’Ancien Testament préparée d’après le grec surtout pour Isaïe et les Psaumes, et complétée par la traduction de quelques deutérocanoniques.

Enfin la Peschitto est une revision de l’Évangile « séparé » ayant surtout pour but de conformer davantage la traduction au texte grec lii, à Antioche, au commencement du ve siècle. Elle a été préparée par Rabboula, évêque d’Édesse de 411-435, et elle a été promulguée par son autorité pour être substituée au Diatessaron. Lorsqu’elle s’éloigne du Diatessaron et de l’ancienne version syriaque, elle représente donc le texte en usage à Antioche aux environs de l’an 400. Elle n’est d’ailleurs pas employée par les écrivains du siècle précédent comme Éphrem et Aphraate. M. Burkitt a déjà signalé quelques objections à sa théorie :

— a) Le canon de la Peschitto, qui ne comprend ni l’Apocalypse ni quatre Épîtres catholiques semble indiquer une origine plus ancienne. M. Burkitt répond que l’Église d’Antioche ne les admettait pas non plus, cf. Ca.non des Écritures, t. ii, col. 175, et que

l’ancienne Église syrienne n’admettait probablemen que « la loi, les prophètes, les évangiles, les lettres de Paul et les actes des douze Apôtres » dont la doctrine d’Addaï, conservée dans un manuscrit du vie siècle, dit : « Vous lirez ces livres dans l’église de Dieu et aucun autre. » Il s’ensuivrait que l’auteur de la Peschitto aurait déjà assez élargi le canon syrien en y introduisant trois Épîtres catholiques et que, même au v « siècle, on ne pouvait lui demander plus.— b) Rabboula, d’abord favorable à Nestorius, devint ensuite le champion de saint Cyrille, et il n’est pas vraisemblable que les nestoriensauraientadopté la Peschitto si cette version était de lui. M. Burkitt suppose qu’elle était faite et adoptée avant le concile d’Éphèse. — c) Les citations d’Aphraate, si elles ne concordent pas entièrement avec la Peschitto, diffèrent encore plus du texte de l’évangile « séparé ». Il pouvait citer de mémoire et être encore influencé par le Diatessaron. Saint Éphrem écrivait en vers et il est difficile de l’utiliser pour des discussions de détail. — d) Il a pu y avoir un grand nombre de recensions syriaques particulières, comme cela avait lieu, d’après saint Jérôme, pour le latin où chacun compilait à son gré son propre exemplaire, il ne serait donc pas impossible que l’évangile « séparé » et la Peschitto soient contemporains, au lieu d’être successifs, et qu’ils procèdent de trois remaniements simultanés du Diatessaron, les deux premiers (Se et Ssc) n’étant que des curiosités littéraires. La théorie de M. Burkitt ne s’impose pas.

IV. Versions plus récentes du Nouveau Testament.

— 1° La Philoxénienne et V Héracléenne. — a) Origine. — Comme nous l’avons dit pour l’Hexaplaire de l’Ancien Testament, la Peschitto différait encore en bien des points du texte grec reçu et ces différences devinrent surtout sensibles durant les controverses christologiques avec les Grecs. Philoxène, évêque de Mabboug de 485 à 523, chargea donc, vers 508, le chorévêque Polycarpe de faire sur le grec une traduction littérale de l’Ancien et du Nouveau Testament. Sa traduction du Nouveau Testament, revue à Alexandrie sur deux ou trois manuscrits grecs par Thomas d’Harkel (ou d’Héraclée), évêque de Mabboug, constitue l’Héracléenne conservée dans de nombreux manuscrits. Les dates de ces deux traductions sont l’an 508 et 616 de notre ère, d’après une note qui se trouve dans la plupart des manuscrits.

b) Les manuscrits. — Ici encore le travail de Polycarpe a jeté complètement effacé par celui de son successeur. M. Gwynn a publié, d’après un ms. du comte de Crawford, une ancienne version de l’Apocalypse qu’il croit représenter la traduction de Polycarpe (ou Philoxénienne), tandis que la version éditée par Louis de Dieu en 1627 appartiendrait à la revision de Thomas d’Harkel, The Apocalypse of St. John in a syriac version hitertho unknoivn, Dublin, 1897. M. J. H. Hall croyait trouver le vieil original de Polycarpe sur les Évangiles dans un ms. de Beyrouth ; il a donné une reproduction phototypique des quatrelettresqui manquent dans la Peschitto, The syrian Antilegomena Epistles, Baltimore, 1886. Cf. The Academy, 18 août 1877, col. 170. Nous ne parlerons donc plus que de l’Héracléenne. Il en reste de nombreux manuscrits. C. R. Gregory, Prolegomena, p. 853-859, mentionne 29 manuscrits des Évangiles, dix des Actes et des Épîtres catholiques ; et six qui contiennent l’Apocalypse. Il existe encore d’ailleurs d’autres manuscrits, cf. Revue biblique, 1907, p. 254-258, où M. Delaporte fait connaître un manuscrit d’Émèse, copié en l’an 841 de notre ère et analogue au manuscrit 268 du Vatican ; voir aussi Zeitschrift fur neutest. Wiss., 1905, p. 282. Il faut noter que les dates attribuées chez Grégory aux.tvangéliaires 25 et 27 sont celles de la rédaction et non celles des manuscrits qui sont plus récents. Le ms. 27