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SINAÏ


nimr, qui habite dans les parties les plus élevées et les plus inaccessibles de la péninsule ; le loup, arabe : dîb ; le chacal, canis aureus ; le renard appelé par les Arabes abu’lhosein, canis famelicus ; le bouquetin, beden, cap ra s inai tica ; la gazelle, dorcas gazella ; le lièvre, lepus sinaiticus, arabe : arneb, etc. Les troupeaux des bédouins, chameaux, chèvres et moutons, trouvent une nourriture suffisante en différents endroits. — Parmi les oiseaux, nous citerons : le vautour égyptien, Neophron percnopterus, Linn. ; l’aigle ; le milan, Milvus segyptius, milvus migrant ; le faucon, Falco lanarius ; le coucou, Cuculus canorus ; le bulbul, Ixus xanthopygius ; le traquet, Saxicola œnanthe, sax, deserti ; la fauvette, la bergeronnette, l’alouette, le corbeau ; la perdrix, Caccabis saxatilis, caccabis heyii ; la caille commune, Colurnix comniunis, etc. Nous ne disons rien des insectes, mollusques, reptiles. Cf. Ordnance Survey of the Peninsula of Sinai, t. i, p. 251-272 ; H.Chichester Hart, op. cit., reproduit dans Survey of Palestine.

4° Population. — D’après ce que nous venons de dire, il est facile de voir que la péninsule sinaitique n’est pas le désert complet, sans eau, sans végétation, inhabitable pour l’homme. C’est le demi-désert, et le caractère de l’homme qui est venu y fixer sa tente correspond à celui de la nature. Simple dans ses goûts, il arrive à les satisfaire sans peine et sans grand travail, tirant des ressources naturelles du pays tout ce que réclament ses besoins. Amant passionné de la liberté, il erre, heureux et tranquille, à travers tous les chemins de la solitude, sans subir les contraintes de la vie sédentaire. Il préfère la pauvreté à la moindre sujétion. Peu vêtu, mal nourri, dormant sous le ciel, autour d’un feu de branchages, sans souci des variations de température, il a une santé d’une extrême résistance. Dans ce corps maigre et bien portant, l’esprit, dégagé de toute préoccupation scientifique comme de tout souci matériel, garde une fraîcheur et une vivacité qui rappellent l’enfant. Mais l’enfant se retrouve aussi dans l’impuissance à prévoir, l’incapacité d’agir avec ordre, sans cris et disputes. Tel est, en deux mots, le Bédouin du Sinaï. La population de la péninsule s'élève, d’après les évaluations les plus probables, à environ cinq mille personnes. Elle se divise en plusieurs tribus, réparties dans les différentes régions de la presqu'île. La fortune des Bédouins consiste dans les productions du sol et dans les animaux, chèvres, moutons, ânes et chameaux, qu’elles leur permettent d'élever. Leur principale ressource vient de la location de leurs chameaux aux voyageurs qui traversent le pays. Leur vie habituelle est celle des pasteurs nomades. Ils se déplacent par groupes dans les limites de leur territoire, et ont vite fait de planter leurs tentes noires en poil de chèvre et de chameau. Dans quelques endroits, notamment au voisinage des principales sources et des cours d’eau qui alimentent des plantations, la vie devient séden taire ou demi-sédentaire. C’est ce qu’on voit dans Youadi Nasb et surtout dans Vouadi Feirân, où les Bédouins habitent des huttes en pierre, non loin des ruines de la ville antique. — Sur les mœurs et coutumes des Bédouins du Sinaï, on peut voirW. E. Jennings-Bramley, The Bédouin of the Sinaitic Peninsula, dans le Palestine Exploration Fund, Quarterly Statement, 1905, p. 126-137, 211-219 ; 1906, p. 23-33, 103-109, 197205, 250-258 ; 1907, p. 22-33, 131-137, 279-284 ; 1908, p. 30-36, 112-116 ; 1909, p. 253-258 ; 1910, p. 140-149.

5° Voies de communication. — On sait que les deux golfes qui enserrent la péninsule sinaitique et s’avancent profondément dans les terres ont toujours été d’importantes voies de communication du monde oriental. De l’océan Indien et de la mer Rouge, on accédait, d’un côté, à la Basse-Egypte, de l’autre à la Syrie par la vallée d’Arabah, la mer Morte et la vallée du

Jourdain, ou, en coupant au nord-ouest, aux ports de la Méditerranée. Les extrémités septentrionales des deux golfes étaient reliées par une route qui traversait en droite ligne le désert de Tîh, et était une section de l’antique chemin de terre d’Egypte en Arabie. La Table de Peutinger compte de Clysma à Haila (Elath) une distance totale de 170 milles (255 kilomètres), et marque deux stations intermédiaires, Medeia (ouadi Mediléh) et Phara. Au milieu, au point appelé aujourd’hui Qala’at en-Nakhl, « le Fort du Palmier », se trouve une bifurcation, conduisant au nord vers la Palestine, au sud vers le djebel et-Tih, que l’on passe par des gorges difficiles et abruptes, le naqb er-Rakinéh, le naqb el-Varsah, le naqb et Mrêschi. C’est ainsi que d’anciens pèlerins arrivaient au couvent du Sinaï par Vouadi 'Arabah ; d’autres, partant de Jérusalem, gagnaient la région d’Hébron et de Gaza, puis se dirigeaient, par le désert de Tih, vers la sainte montagne, pour s’en aller ensuite en Egypte par la route ordinaire de la côte. La voie de Suez à 'Aqabah est caractérisée par l’extrême rareté de l’eau ; en dehors de Qala’at enNakhl, Bîr Kôresch, Bir eth-Themed, la végétation est nulle, et, par suite, le séjour même des nomades est impossible.

De Suez au Sinaï, les chemins sont naturellement tracés par les plaines et les vallées dont nous avons indiqué la formation géologique. Une fois sur la côte orientale du golfe, on s’avance le long d’une vaste plaine d’alluvion, dont le sol est composé de cailloux et de gravier. On arrive ainsi à 'Ayûn Mûsa, d’où le chemin se poursuit avec une extrême monotonie dans la direction du sud-est, coupant, à longs intervalles, des ravins peu profonds. Peu avant V ouadi el-Atha, la route se divise en deux branches, dont l’une se rapproche de la côte et la suit de plus en plus près jusqu’au djebel Hammam Fir'ûn et le Bas Abu Zeniméh ; l’autre se tient plus haut, mais parallèle à la première jusqu'à l’oasis de Gharandel, d’où elle continue par Y ouadi Guéséh. Au confluent de Youadi Schebeikéh et de Youadi Tayibéh, se trouve une bifurcation importante. Une route s’en va vers l’est, par Youadi Hamr, laissant à gauche le Sarbut el-Djemel, puis prend au sud-est, contourne, par Youadi Suwig, Sarâbît elKhâdim, se dirige enfin vers le couvent de sainte Catherine par les ouadis Khamiléh, Barak, Lebwéh, Berrah, etc. Une autre descend vers le sud, rejoint près de la côte le sentier littoral et suit le rivage jusqu'à la plaine à'el-Markha. De là, elle s’avance, parallèlement à la précédente, vers le même point, par les ouadis Schellal, Mokatteb, Feirân, Solaf. D’autres chemins s’y rattachent pour rejoindre Tôr, au sud. Enfin, du couvent de Sainte-Catherine, un sentier descend vers le même village de Tôr, par les ouadis Sebayéh, Tarfah, lsléh, et la plaine d’el-Qâ'ah.

Du Sinaï vers le nord-est, la route suit les ouadis Sa’al, el-Il udherah, et va rejoindre celle du plateau de Tih ; un embranchement, partant d’Aîn Hudherah, et touchant la côte à Aïn en-Nueibéh, remonte par le littoral jusqu'à 'Aqabah. Une autre se dirige vers le nord pour franchir le djebel et-Tih par l’une ou l’autre de ses passes. Une branche s’en détache pour retrouver la route du nord-est par les ouadis ez-Zelegah et el-'Aîn. Ces détails nous permettront de mieux comprendre l’itinéraire des Israélites à travers la péninsule.

IV. Histoire. — L’histoire de la péninsule sinaitique est en rapport avec sa situation, sa configuration physique et ses conditions de vie. Placée comme une sorte d'îlot entre l’Asie et l’Afrique, défendue d’un côté par le désert, des deux autres par la mer, elle se trouvait en dehors de la voie des nations de l’ancien inonde. La pauvreté du sol et des habitants ne pouvait tenter aucun conquérant. L’absence de villes, de monuments,