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SIMÉON (TRIBU DE)


Siceleg, dont la situation était importante, et qui des mains d’Achis, roi de Geth, passa à celles de David. I Reg., xxvii, 6.

Le territoire de Sitnéon, moins connu que celui des autres tribus, comprenait l’extrême sud de la Palestine, le Négéb ou « pays desséché ». C’est le prolongement de l’arête montagneuse qui traverse la Palestine, mais la ligne de faîte est brisée ; il n’y a plus que des sommets épars, beaucoup moins élevés que ceux de Juda, des plateaux séparés par des vallées parfois assez larges. Tels sont le djebel Urnm Rudjiim, le djebel Scheqâ'ib, le djebel et-Tûr, le dj. Zibliyéh, le dj. Hadiréh, le dj. Muzeiqah, le dj. Maderah. Cet enchevêtrement de hauteurs forme deux versants, l’un de la Méditerranée, l’autre de la mer Morte. Le premier est caractérisé par un réseau très long et très compliqué de torrents, qui coupent le terrain dans tous les sens. Les uns descendent des dernières pentes des montagnes de Juda, comme les ouadis esch-Schéri’ah, el-Khâlil, el Butni, Sau’eh, el-Milh. Les autres partent des sommets ou plateaux que nous venons de signaler, les contournent et se ramifient pour former des rivières qui s’unissent à leur tour. Citons les ouadis Ar'ârah, es-Séba', es-Sani, Ruheibéh, el-Abiad etc. Tous se déversent dans la mer par deux canaux principaux, Vouadi Ghazzéh, et Vouadi el-Arisch ou « Torrent d’Egypte ». Le second versant envoie ses eaux à la mer Morte, principalement par Vouadi Muhauwat et Vouadi Fiqriih. La fertilité du pays ne gagne rien à cette multitude de torrents, qui sont à sec la plus grande partie de l’année. S’il y a des coins verdoyants, quelques cultures, l’ensemble de la contrée a l’aspect désertique. C’est la région des nomades, et il en fut ainsi dès les temps anciens, à en juger d’après les noms de plusieurs localités, dans lesquels le mot Hdsdr, Hdsèr, rappelle le campement des tribus pastorales. Voir Haséroth, t. iii, col. 445. D’autres noms rappellent le désert, comme Hasersual, « le douar du chacal » ; Bethlebaoth, « la maison des lionnes ». Le pays était traversé par quelques routes, que suivaient les caravanes pour venir du golfe d’Akaba, du Sinaï, à Hébron et à Gaza. La route de l’Egypte le longeait dans sa partie occidentale. Des noms comme Bethmarchaboth, « la maison des chars ii ; Hasersusa, Hasersusini, « le village des chevaux », semblent indiquer certains relais ou certains entrepôts de matériel de guerre. Voir NÉGÉB, t. IV, col. 1557.

IL Histoire. — Placé à l’extrémité de la Palestine, Siméon n’a dans l’histoire qu’un rôle très effacé. Au premier recensement, la tribu comptait 59300 hommes en état de porter les armes. Num., i, 22-23. Elle occupait ainsi le troisième rang, .venant après Juda et Dan. Elle se trouvait, dans les campements et la marche au désert, au midi du tabernacle, avec Ruben et Gad. Num., ii, 12. Elle avait pour chef Salamiel, fils de Surisaddaï, Num., i, 6 ; II, 12, et ce fut par ses mains qu’elle fit l’offrande de ses dons, à la dédicace du tabernacle et de l’autel. Num., vii, 36. Parmi les explorateurs du pays de Chanaan, elle eut pour représentant Saphat, fils d’Huri. Num., xiii, 6. Ce fut le chef d’une de ses familles, Zambri, qui fut tué par Phinées avec la femme Madianite. Num., xxv, 14. Au second dénombrement, dans les plaines de Moab, elle ne comptait plus que 22200 hommes, avec l'énorme décroissance <le 37100, due sans doute à ce que beaucoup de Siméonites avaient péri pour avoir pris part, comme Zambri, au culte de Béelphégor. Nurn., xxvi, 14. Celui de ses princes qui devait travailler au partage de la Terre Promise fut Samuel, fils d’Ammiud. Num., xxxiv, 20. Elle fut désignée, avec Lévi, Juda, Issachar, Joseph et Benjamin, « pour bénir le peuple, sur le montGarizim, après le passage du Jourdain. » Deut., xxvii, 12. Elle prêta son secours à Juda pour attaquer les Chananéens. Jud., i, 3, 17. Lorsque David se rendit à Hébron pour

recevoir la royauté, Siméon lui donna 7100 hommes. I Par., xii, 25. — L'Écriture mentionne une double migration de la tribu. Plusieurs chefs, dont les noms sont signalés I Par., iv, 34-37, jouèrent un rôle important dans la première, qui eut lieu sous le règne d'Ézéchias, . roi de Juda. L’expédition fut dirigée du côté de Gador (plusieurs lisent Gerâr, Gérare, avec les Septante), où se trouvaient de beaux pâturages. Voir Gador, t. iii, col. 34. Elle s’empara aussi du territoire des Me'ùnîm, dans les montagnes de l’Idumée. Voir Maonites, t. iv, col. 704. La seconde migration transporta les Siméonites dans la montagne de Séir. 1 Par., iv, 39-43. La tribu, comme les autres séparées de Juda, était tombée dans l’idolâtrie, mais plusieurs de ses membres s’enfuirent pour rester fidèles au vrai Dieu, et nous les voyons s’unir à Asa pour immoler des victimes au Seigneur à Jérusalem. II Par., xv, 8-11. Josias vint y poursuivre le culte des faux dieux. II Par., xxxiv, 6. — Dans le nouveau partage de la Terre Sainte, d’après Ézéchiel, Siméon occupa le territoire du midi entre Benjamin et Issachar. Ezech., XLvm, 24, 25. Dans sa reconstitution idéale de la cité sainte, le même prophète, xlviii, 33, met au sud « la porte de Siméon », avec celles d’Issachar et de Zabulon. — Judith était de la tribu de Siméon. Judith, viii, 1 ; ix, 2. Pour sa généalogie, voir Judith, t. iii, col. 1823.

III. Caractère. — Le rôle effacé de Siméon dans l’histoire ne permet guère de découvrir et de tracer son caractère. De plus, la Bénédiction de Jacob, Gen., xlix, qui, pour les autres tribus, nous donne des notes si caractéristiques, ne comprend pour celle-ci que des reproches amers et un châtiment. Elle confond dans une même réprobation et une même peine Siméon et Lévi, à cause de leur fourberie et de leur cruauté à l'égard des Sichémites. Gen., xlix, 5-7 ; cf. Gen., xxxiv, 25-31. Pour la traduction du passage d’après l’hébreu, voir Lévi (Tribu de), t. iv, col. 201. La punition est celle-ci :

Je les diviserai dans Jacob,

Et je les disperserai dans Israël.

Siméon ne fut pas, comme Lévi, absolument privé de territoire et dispersé en Israël, mais il n’eut qu’une part dans l’héritage de Juda, et cette part fut la moins bonne de toute la terre de Chanaan. Relégué à la limite du désert, il ne trouvait point ce sol fertile où coulaient le lait et le miel, que s'étaient partagé ses frères. Dans cette situation, il n’eut point non plus à se mêler aux combats et aux événements qui illustrèrent d’autres tribus. Il est passé sous silence dans les Bénédictions de Moïse. Deut., xxxm. Pour quelles raisons ? On ne sait. Voir différentes conjectures dans F. de Hummelauer, Comment, in Deut., Paris, 1901, p. 535. Le manuscrit alexandrin et quelques autres portent bien, Deut., xxxiii, 6 b : KalEvjietiv sut<o tcoXùç sv àpiOpim, « et que Siméon soit grand par le nombre ». Mais ces paroles se rapportent à Ruben dans le texte original ; il y a là une correction que rien ne justifie. On a cherché une solution en modifiant et transposant certains versets du chapitre ; mais ces sortes d’hypothèses n’ont d’autre résultat que défaire violence au texte. Si nous pouvionsjuger le caractère de la tribu d’après celui du patriarche, son père, et d’après les quelques points de l’histoire, nous dirions qu’il fut violent, qu’il se distingua par une énergie plutôt brutale. Siméon veut venger l’honneur de sa sœur, mais il prend pour armes la ruse et la cruauté. Les incidents du désert montrent ses fils entraînés par des penchants grossiers. Cependant cette énergies’unit à la force de Juda pour la conquête de Cha. naan ; elle cherche une expansion dans les expéditions armées qui procureront aux émigrants de nouveaux

territoires. Enfin ' elle s’ennoblit dans le courage deJudith.

A. Legendre.