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SEPTANTE (VERSION DES)


Alphonse Tostat, niait l’inspiration des Septante. Au xvie siècle, Sixte de Sienne l’admettait, Bibliolheca sancla, 1. VIII, hær. xiii, ainsi que Ange Rocca. Opéra, t. i, p. 276 ; t. ii, p. 8. Le futur cardinal Sirlet, en 1546, s’appuyait sur l’autorité de Philon ; mais, en 1575, Bellarmin lui exposait dans une lettre le sentiment opposé, fondé sur la comparaison critique du texte des différents livres. H. Hôpfl, Kardinal Wilhelm Sirlets Annotationen zum Neuen Testament, dans les Biblische Studien, Fribourg-en-Brisgau, 1908, t. xiii, fasc. 2, p. 6, note. Bellarmin avait donc changé d’avis. Cf. J. delà Servière, La théologie de Bellarmin, Paris, 1908, p. 16. Dans la préface à l’édition romaine de 1587, Pierre Morin écrivait encore des Septante : Constat enim eos Interprètes, natione quidem Judseos, doctos vero grsece, trecentis uno plus annis ante Christi adventum, cum in Egyplo regnaret Ptolemxus Philadelphus, Spiritu Sancto plenos sacra Biblia interprétais esse, et de leur version : nimirum quse instinclu quodanx divinitalis elaborata bono generis humani prodierit in luceni. D’autres écrivains du même siècle et du siècle suivant ont maintenu ce sentiment, qui n’est plus reçu aujourd’hui par personne et qui n’a jamais été dans l’Église qu’une opinion particulière.

Le Talmud de Babylone, traité Meghilla, i, fol. 9 a, admet la légende des 72 cellules. Les Samaritains l’admettent aussi. Voir un extrait de la Chronique samaritaine, dans Silvestre de Sacy, Chrestomathie arabe, t. i, p. 347, 348.

Jusqu’au xvie siècle, la Lettre d’Aristée fut tenue pour authentique. Louis Vives émit le premier des doutes dans une note sur le De civitate Dei, xviii, 42, de saint Augustin, Bâle, 1522. Son sentiment finit par prédominer. Voir t. i, col. 963-964. Il n’est plus nécessaire aujourd’hui de prouver l’inauthenticité de cette Lettre. On sait depuis longtemps que Démétrius n’était plus en charge sous le règne de Ptolémée Philadelphie ; il avait été banni d’Alexandrie immédiatement après la mort de Ptolémée Lagus. Voir Hemippus, cité par Diogène Lærce, v, 78, dans Millier, Fragmenta hist. grsec., t. iii, p. 47. La victoire navale, remportée par Philadelphe sur Antigone, n’a probablement pas eu lieu. L’intervention officielle du roi et celle du grandprêtre paraissent invraisemblables. La distinction des tribus n’existait plus depuis la captivité des Juifs à Babylone. On se demande seulement si la Lettre pseudonyme est purement fictive et constitue un roman historique, ou bien si la fiction ne contient pas quelques faits réels. Nous nous efforcerons plus loin d’en dégager le fond historique. Il n’est plus nécessaire non plus de prouver la non-inspiration des Septante. Il suffit de noter que cette inspiration n’a jamais été enseignée par l’Église. Elle a été admise par quelques Pères seulement sur la foi de la légende des cellules séparées et dans le dessein de justifier contre les Juifs qui s’appuyaient exclusivement sur la « vérité hébraïque », les passages et les leçons, propres à la traduction grecque. Saint Jérôme l’a vivement combattue et saint Chrysostome n’en a pas parlé. Les modernes la rejettent avec raison et se rangent au sentiment de saint Jérôme, suivant lequel les traducteurs grecs ont été des interprètes et non des prophètes. F. Vigouroux, Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. i, p. 81-84.

IV. Origine d’après les vraisemblances historiques. — 1° La traduction grecque de la Bible hébraïque ne s’est pas faite d’un seul coup, et les divers livres ont été traduits par divers auteurs et à des époques différentes. Les interprètes n’ont pas suivi les mêmes principes de traduction ni employé les mêmes mots grecs pour rendre les mêmes termes hébraïques. Le Ps. xvii (héb. xviii) n’est pas traduit dans le psautier de la même manière qu’au IIe livre de SamueL, xxii. Les passages parallèles qu’on lit dans les Rois ou les

Paralipomènes, dans les Rois ou Jsaïe et Jérémie, dans les Psaumes et les Paralipomènes, appartiennent à des versions différentes. Le même terme a été différemment compris. Les noms divins n’ont pas été rendus de la même façon. Voir Loisy, Histoire critique du texte et des versions de la Bible, dans L’enseignement biblique, 1893, p. 21, 143-145. Ainsi encore d’Pw^b est toujours traduit ^uXtorieiij. dans le Pentateuque et le livre de Josué, et àXXô ?yXo ! dans les autres livres. nDs est rendu par -Kaaxa dans tous les livres, sauf les Paralipomènes et Jérémie où il est rendu par çadlz. >DiN est traduit par êyco s ?|it dans les Juges, Ruth et les Rois et par èyw seul partout ailleurs. T3D

est rendu dix-sept fois par xtv-’px, qui n’est que la forme grécisée du nom hébreu, et vingt fois par x19âpa, une fois par ô’pyava et une autre fois par 6aXTr, pcov. Voir F. Vigouroux, La Sainte Bible polyglotte, Paris, 1903, t. iv, p. 644, note 9. Sa : est rendu

ordinairement par vâSXa, dix fois par ^aXtiîptov, deux fois par ôpyâvov et une fois par ij/aXpid ; . lbid., p. 645, note 5. dh=in est traduit SïjXaxiiç ou 8-rp.oi dans le Pen tateuque, mais ç&m’ÇovTe ; , <pwiri<7wv dans les livres d’Esdras. n » sn devient àlffiua dans l’Exode et téXsiov

dans le I er livre d’Esdras. bnp est rendu trj’jxyu>ir,

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dans les quatre premiers livres de Moïse et dans les prophètes, mais êxxXï)<jt’a dans le Deutéronome (sauf une exception) et dans les derniers livres historiques. Beaucoup d’autres exemples ont été recueillis par Hody, De Bibliorum lextibus originalibus, versionibus grsecis et latina vulgata, Oxford, 1705, p. 204-217. Le caractère de la traduction, dans les différents livres, est très variable, tantôt libre, tantôt littéral à l’excès et très lourd. Saint Jérôme avait déjà remarqué que celle du Pentateuque était la plus fidèle. Liber hebraic. qusest. in Gen., prœf., t. xxiii, col. 937. Celle des autres livres historiques, quoique moins soignée que la précédente, l’emporte cependant en exactitude sur celle des livres poétiques. Pour ceux-ci, la traduction des Proverbes est la meilleure ; celle des Psaumes est trop littérale et peu poétique, quoique suffisante ; celle de l’Ecclésiaste est parfois inintelligible. On y trouve ait pour traduire nx. Celle de Job est très médiocre

dans les parties poétiques. Les livres des prophètes n’ont pas toujours été compris, et la version est obscure. Origène et saint Jérôme avaient constaté que celle de Jérémie est fort défectueuse. Celle d’Isaïe présente les mêmes défauts. Ézéchiel et les petits prophètes sont mieux interprétés. Daniel était si mal rendu que l’Église grecque adopta la version de Théodotion pour ce livre. Voir Trochon, Introduction générale, t. i, p. 372375. On n’a pas encore étudié le texte de tous les livres. Nous indiquerons plus loin les ouvrages publiés sur chacun d’eux au point de vue de la valeur critique.

2° La version du Pentateuque. — C’est la plus ancienne et la seule qu’Aristée, Philon, Josèphe et tous les Juifs aient attribuée aux Septante. Les critiques qui tiennent la Lettre d’Aristée pour purement fictive, n’admettent même pas qu’elle ait été faite sous le règne de Ptolémée Philadelphe. Gràlz retient seulement des sources helléniques et talmudiques qu’elle a eu un Ptolémée pour promoteur, et il ne voit que Ptolémée VI Philométor (180-145 avant Jésus-Christ), qui ait témoigné un véritable intérêt aux Juifs hellénistes et au judaïsme. Aussi place-t-il la version grecque du Pentateuque sous ce roi, ami des Juifs. Histoire des Juifs, trad. Wogu’e, Paris, 1884, t. ii, p. 406-407. Selon lui, Philométor en aurait chargé le Juif Aristobule. Sinaî et Golgotha, trad. Hess, Paris, I 1867, p. 81-84. Cf. Jeivish Quarterly Bevieiv, t. iii,