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SCRIBE


nith, iv, 2, fol. 68a, était venu de Babyloneen Palestine. Pauvre, il se louait à la journée pour son entretien et celui de sa famille, ainsi que pour payer ses frais d’instruction. Un jour, n’ayant pu payer son entrée dans l’école, il se hissa à la fenêtre pour entendre la leçon. Comme c’était en hiver, on l’y trouva bientôt tout engourdi. Il acquit des connaissances incroyables sur tous les sujets et devint l’un des docteurs les plus en renom. La douceur et la bonté formaient le fond de son caractère. Schammaï, au contraire, était la rigidité même. Son zèle intransigeant l’entraînait toujours à l’application la plus stricte de la loi. Il ne frayait pas, . comme Hillel, avec les Hérodes, et son patriotisme farouche le rendait plus populaire auprès de ceux qui abhorraient la domination étrangère. Il obligeait son fils en bas âge à jeûner le jour de la fête des Expiations. Un petit-fils lui étant né pendant la fête des Tabernacles, il fit enlever le plafond de la maison et le remplaça par des feuillages, afin que l’enfant observât la loi dès son entrée en ce monde. Sukka, ii, 8. Dès le troisième jour avant le sabbat, il évitait d’envoyer des lettres, afin qu’elles ne voyageassent pas le jour du repos. À un païen qui lui promettait de se convertir s’il pouvait lui enseigner la loi pendant qu’il se tiendrait sur un pied, il répondit par un coup de bâton. Hillel, au contraire, satisfit à la même demande en disant : « Ne fais pas à ton prochain ce que tu ne voudrais pas qu’on te fit ; c’est toute la loi, le reste en découle. » Bab. Schabbath, 31 a. Les deux docteurs exigeaient l’accomplissement intégral de la loi, mais l’un en restreignait autant que possible l’obligation, tandis que l’autre retendait au maximum. Dans bien des cas Cependant, Schammaï se montrait plus large qu’Hillel. Au fond, les deux docteurs tenaient surtout à ne pas donner les mêmes décisions ; quand l’un avait pris parti dans un sens, l’autre décidait dans un sens opposé ou différent. Ainsi, sur la question du divorce, Schammaï se montrait fort rigoureux, tandis qu’Hillel le permettait pour la cause la plus futile. Ce fut aussi Hillel qui inventa la wpouêoXvi, formalité qui permettait d’éluder la libération des dettes à l’année sabbatique. Voir Sabbatique (Année), col. 1302. Le même docteur se préoccupa de mettre par écrit la loi orale, c’est-à-dire l’interprétation de la loi mosaïque par les docteurs, ses devanciers. Il classa leurs sentences sous six titres différents et posa ainsi les bases de la Mischna. Au temps de Notre-Seigneur, le recueil rédigé par écrit sous sa direction existait probablement déjà. Hillel formula aussi sept règles d’interprétation qui furent développées par la suite. Ces règles, consignées dans le traité Sanhédrin, vii, étaient les suivantes : 1. Conclusion d’un sujet à un autre par a fortiori. — 2. Conclusion d’après l’analogie.. — 3. Examen d’un principe contenu dans un seul texte. —4. Comparaison des textes contenant des principes semblables. — 5. Solution d’un cas particulier d’après des cas généraux. — 6. Citation d’exemples. — 7. Sens général résultant de l’ensemble d’un passage. Ces règles étaient sages, mais leur application poussée jusqu’à l’outrance amena souvent des conclusions inacceptables. Hillel n’en exerça pas moins une très grande influence et ses disciples finirent par l’emporter sur ceux de son rival. Ils firent preuve d’une certaine tolérance à l’égard des chrétiens. Héritiers de la rigueur de leur maître, les disciples de Schammaï comptèrent sans nul doute au nombre de ceux qui poursuivirent le Sauveur avec le plus d’acharnement, en lui reprochant son relâchement. Les discussions entre Hillélistes et Schammaïstes furent des plus violentes. Elles frappèrent d’autant plus qu’à l’époque évangélique les scribes ne s’enfermaient plus dans leurs écoles, mais enseignaient dans les rues et les places publiques. Cf. Pesachim, ꝟ. 26, 1 ; Erubin, ꝟ. 29, 1 ; Moed Katon, t. 16, 1.

3° Les scribes postérieurs. — Après Hillel et Schammaï, parurent Simon, fils d’Hillel, sur lequel on n’a que des données problématiques, Gamaliel I er, contemporain de Notre-Seigneur, puis son fils Simon, dont la renommée fut extraordinaire. Cf. Josèphe, Bell, jud., IV, iii, 9 ; Vit., 38, 39, 44, 60. II vivait à l’époque de la guerre. Après la ruine de Jérusalem, les scribes se réunirent à Jabné et à Tibériade. Ils cessèrent dès lors d’être en contact direct avec les chrétiens. Cf. Schiirer, Geschichte, t. ii, p. 351-366 ; Stapfer, La Palestine au temps de J.-C, Paris, 1885, p. 273-296. — Parmi les anciens scribes, plusieurs furent sans nul doute des hommes de haute vertu, comme, par exemple, Esdras, Simon le Juste, etc. L’Église le suppose quand, dans l’antienne de Magnificat aux premières vêpres de la Toussaint, elle invoque, après les anges, « les patriarches, les prophètes, les saints docteurs de la loi, tous les apôtres, etc. »

4° Notre-Seigneur indépendant des scribes. — L’enseignement de Notre-Seigneur, malgré quelques maximes communes dans la forme, ne s’inspire en aucune manière de celui des scribes. On a tenté parfois de rapprocher Hillel de Jésus. Delitzsch conclut son écrit Jésus und Hillel, Erlangen, 1879, en disant : « Les tendances de l’un sont aussi loin des tendances de l’autre que le ciell’estde la terre. Hillel fait de la cas uistiquepour son peuple, Jésus fait de la religion pour l’humanité. » V. Les scribes dans le Nouveau Testament, — 1° Pendant l’enfance de Notre-Seigneur. — À l’arrivée des Mages à Jérusalem, Hérode consulta les princes des prêtres et les scribes pour savoir d’eux où le Christ devait naître. Matth., ii, 4. Les princes des prêtres et les scribes désignent ici le sanhédrin. Cette assemblée comprenait en effet des princes des prêtres, des scribes et des anciens. Voir Sanhédrin, col. 1459. À titre de membres du sanhédrin, les scribes sont souvent mentionnés dans l’Évangile, conjointement avec les deux autres ordres. Matth., xvi, 21 ; xx, 18 ; xxvi, 57 ; xxvii, 41 ; Marc, viii, 31 ; x, 33 ; xi, 18 ; Luc, ix, 28 ; xxra, 10 ; etc. — À l’âge de douze ans, Jésus resta à Jérusalem après les fêtes de la Pâque, au lieu de retourner à Nazareth avec ses parents. Au bout de trois jours, ceux-ci « le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs et les interrogeant. Et tous ceux qui l’entendaient étaient ravis de son intelligence et de ses réponses. » Luc., ii, 46-47. Les docteurs sont seuls nommés ici, à l’exclusion des prêtres et des anciens, parce que ces derniers ne s’occupaientpas d’enseignementet d’ailleurs n’avaient pas la compétence pour le faire. Jésus était assis au milieu des docteurs, non pas sur un de leurs sièges, mais à leurs pieds, comme Saùl aux pieds de Gamaliel, Act., xxii, 3, dans l’attitude qui convenait au disciple. Il interrogeait et il répondait, comme le faisaient habituellement les auditeurs des scribes. L’auteur de l’Évangile arabe de l’enfance, 50-52, prétend savoir que la discussion porta d’abord sur la question du Messie, puis sur la Loi et ses préceptes, les prophéties et leurs mystères, l’astronomie, etc. Il est possible que les interrogations et les réponses aient concerné principalement le Messie attendu ; c’est même assez probable. Toutefois l’Évangile n’en dit rien ; il se contente de noter l’effet produit par l’intelligence du divin Enfant. Il est certain d’ailleurs que, dans la circonstance, Jésus n’agissait ni par ostentation ni par vaine curiosité, mais pour « être aux affaires de son Père ». Luc, ii, 49. 2° Pendant la prédication de Notre-Seigneur. — Le Sauveur prêchait son Évangile sans avoir fréquenté les écoles des docteurs, Joa., vii, 15, sans avoir sollicité leur approbation et sans se rattacher à aucune de leurs traditions. Il était inévitable que, dans ces conditions, la susceptibilité des scribes fût froissée, que leur attention fût éveillée et que leur orgueil blessé suscitât à Notre-Seigneur des difficultés et des persécutions. C’est