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SAMUEL


m, 19-21. — Après s’être emparés de l’Arche, les Philistins furent bientôt obligés de la renvoyer en Israël. Elle demeura à Carialhiarim, chez Abinadab, pendant vingt ans. Durant ce temps, Samuel attendait l’ordre de Dieu pour agir. Les Israélites, toujours sous le joug des Philistins, se tournèrent enfin vers Jéhovah pour implorer leur délivrance. Samuel leur déclara que le salut ne leur viendrait que quand ils rejetteraient les dieux étrangers et les Astartés, pour ne plus servir que Jéhovah. Ils s’y décidèrent. Le prophète les fit alors assembler à Masphath, dans la tribu de Benjamin, voir Maspha 4, t. IV, col. 838, un peu au nord de Jérusalem. Voir la carte, t. i, col. 1588. Là, le peuple fit pénitence, en répandant des libations d’eau, en jeûnant tout un jour et en avouant ses péchés, et Samuel jugea les enfants d’Israël, c’est-à-dire leur signifia les volontés divines. En apprenant ce rassemblement, les Philistins montèrent contre les Israélites, qui, pris de peur, conjurèrent Samuel de crier vers Jéhovah en leur faveur. Celui-ci accéda à leur désir. Il offrait un agneau en holocauste et implorait Jéhovah, quand les Philistins commencèrent leur attaque. Dieu déchaîna contre eux le tonnerre et les mit en déroute. Josèphe, Ant. jud., VI, ii, 2, suppose aussi un tremblement de terre. Les Israélites n’eurent plus qu’à les poursuivre, et ils les talonnèrent jusqu’à un endroit situé au-dessous de Bethchar, où Samuel plaça une pierre commémorative qu’il appela Ében-Ézer, « Pierre du secours », à cause de l’aide prêtée par Dieu à son peuple. Voir Ében-Ézer, t. ii, col. 1526. Ainsi châtiés, les Philistins s’abstinrent de renouveler leurs attaques. Les villes qu’ils avaient prises, d’Accaron à Geth, retournèrent à Israël avec tout leur territoire. Les Amorrhéens eux-mêmes, c’est-à-dire les Chananéens demeurés dans le pays, se tinrent tranquilles. —Samuel jugea Israël tout le temps de sa vie. Cette judicature ne comportait évidemment pas l’exercice d’un pouvoir très compliqué, à une époque où « il n’y avait pas de roi en Israël et où chacun faisait ce qui lui semblait bon. » Jud., xxi, 21. Elle devait, du reste, se continuer même sous la royauté. Le prophète résidait dans le pays de ses parents, RamathaïmSophim, où il bâtit un autel à Jéhovah. I Reg., vii, 17. Chaque année, il faisait sa tournée par Bethel, Galgala et Masphath, et là il jugeait Israël, c’est-à-dire rendait la justice, réglait les différends et prenait les mesures commandées par l’intérêt local ou la lai religieuse, appuyant ainsi l’autorité des anciens. IReg., vii, 1-7. Il le faisait avec un désintéressement et une équité que ses compatriotes furent unanimes à reconnaître. I Reg., xii, 4.

2° L’institution de la royauté. — Treize ans après la défaite des Philistins à Masphath, Samuel devenu vieux établit ses fils juges sur Israël. Mais ceux-ci n’avaient pas le désintéressement de leur père ; âpres au gain, ils sacrifiaient fa justice à leur cupidité. Une pareille situation rappelait d’assez près celle qui s’était produite pendant les dernières années d’Héli. Les anciens d’Israël redoutèrent les conséquences qu’elle pouvait entraîner. Ils s’entendirent alors pour adresser au prophète la requête suivante : « Établis sur nous un roi pour nous juger, comme en ont toutes les nations. » Tous les peuples qui entouraient Israël avaient, en effet, des rois à leur tête, et il semblait aux anciens que le régime royal leur donnerait plus de garanties pour la défense du pays contre ses ennemis et pour l’administration de la justice. Peut-être se souvenaient-ils aussi que l’établissement de la royauté avait jadis étéprévu par Moïse. Deut., xvii, 14-20. Toutefois, ils ne font aucune allusion à cette ancienne disposition de la loi. Leur demande déplut à Samuel, qui paraît l’avoir considérée comme un acte de défiance à son égard. Le Seigneur consola Samuel en lui disant : « Ce n’est pas toi qu’ils rejettent, c’est moi, pour que je ne règne plus

sur eux. » I Reg., viii, 7. Ces paroles ne supposent pas que les anciens aient réclamé la suppression de la théocratie. Il est probable qu’ils ne se rendaient qu’assez superficiellement compte de la place que tenaient les interventions divines dans la conduite de leur nation. Néanmoins, ils rejetaient Dieu en ce sens qu’au lieu de lui abandonner totalement le soin de leur défense, ils désiraient avoir à leur tête un roi qui veillât sur eux, comme les autres rois le faisaient pour leurs peuples. Le Seigneur commanda à Samuel d’exaucer le vœu des anciens. Par le fait de l’institution de la royauté, la théocratie fut amoindrie de tout le pouvoir extérieur qu’il fallut abandonner au roi, mais elle ne perdit rien de sa puissance effective, qui continua à s’exercer comme par le passé, ni de son influence directrice, dont les prophètes devinrent les organes auprès des rois et du peuple. — Sur l’ordre de Jéhovah, et pour faire sentir aux Israéiites les graves conséquences de leur requête, Samuel commença par énumérer les charges de toutes sortes qu’un roi ferait peser sur ses sujets. Le peuple persista dans son désir : il voulait être comme les autres nations, et avoir un roi pour le juger et le mener à la guerre. « Écoute leur voix et établis un roi sur eux, » dit Jéhovah. Samuel n’eut pius qu’à obéir. Il renvoya les hommes d’Israël dans leurs villes et attendit que Dieu lui indiquât l’homme de son choix. I Reg., viii, 1-22.

3° L’onction et l’élection de Saûl. — Cis, de la tribu de Benjamin, envoya un jour son fils, Saùl, chercher ses ânesses perdues. On conseilla à celui-ci d’aller consulter Samuel, le voyant, pour apprendre de lui où se trouvaient les animaux. On croyait donc que les prophètes pouvaient connaître et révéler les choses cachées, Jéhovah avait fait savoir à Samuel que le jeune homme qui viendrait le consulter était celui qu’il destinait à être roi. Quand Saùl parut, il lui indiqua encore qu’il était son élu. Samuel fit monter Saûl au haut-lieu où il allait offrir un sacrifice. Puis, il ie garda avec lui dans la salle du festin, où il lui donna la première place et une portion d’honneur. Ils redescendirent ensuite dans la ville, et Samuel s’entretint avec Saül sur le toit de sa maison. Le iendemain, ils sortirent ensemble de la ville, et Samuel, ayant pris une fiole d’huile, la versa sur la tête de Saùl et le baisa en disant : s Jéhovah t’oint pour chef sur son héritage. » Il lui indiqua où il trouverait ses ânesses, lui marqua plusieurs signes qui devaient s’accomplir à son égard et lui donna rendez-vous à Galgala pour la célébration de grands sacrifices. Peu après, Samuel convoqua le peuple à Masphath. Là, tous étant rangés par tribus, il procéda à l’élection du roi ; car ni lui ni Saùl n’avaient révélé ce qui s’était passé à Ramalhaïm. Le sort désigna successivement la tribu de Benjamin, la famille de Métri et Saûl, fils de Cis. Samuel ie présenta au peuple, qui s’écria : <i Vive le roi ! » Ensuite il exposa devant tous le droit de fa royauté, qui réglait les devoirs et les droits du roi, et if l’écrivit dans un livre, qu’il déposa devant Jéhovah, c’est-à-dire auprès de l’Arche. Enfin, il congédia tout le peuple. I Reg., îx, 1-x, 24.

III. Sous le RÉGNE de Saûl. — 1° L’abdication. — Saùl inaugura ses fonctions royales par une victoire remportée sur les Ammonites. Le peuple se réunit ensuite à Galgala, y acclama de nouveau Saûl, offrit des sacrifices d’actions de grâces et se livra à de grandes réjouissances. Samuel profita de cette assembtée pour abdiquer la judicature. Il fit d’abord constater le désintéressement et l’équité avec lesquels il s’était efforcé d’agir, retraça à grands traits l’histoire des bienfaits de Dieu à l’égard d’Israël, et assura que le peuple, ayant désormais un roi à sa tête, continuerait à être traité par Jéhovah comme précédemment, suivant sa fidélité aux préceptes divins. Il ajouta que,