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SALOMON


par écrit de toutes ces compositions. III Reg., iv, 3233. — Eu dehors des livres canoniques, des livres apocryphes ont été mis sous le nom de Salomon. Sur les Psaumes dits de Salonwn, voir Viteau, Les Psaumes de Salomon, in-8°, Paris, 1910. Cf. col. 840 ; E.-E. Geiger, Der Psalter Salomo’s, Augsbourg, 1871 ; Ryle and James, TFaXpiotSoXojjnovToc, Cambridge, 1891 ; Gebhardt, TaXiJ.01 Eoàoh, mvtoç, Leipzig, 1895 ; Schûrer, Geschichle des jûdîschen Volkes, t. iii, p. 150-156. — Les wîou’de Salomon, qui font suite au livre gnostique intitulé IliffTi ; Soçi’a, se présentent comme la continuation des psaumes précédents, mais sont l’œuvre d’un chrétien gnostique. Cf. Mùnter, Odse gnosticse Salotnoni tributse, Copenhague, 1812 ; Ryle and James, op. cit., p. xxiii-xxvh. — La réputation de science et d’habileté laissée par Salomon fit encore mettre sous son nom toutes sortes de livres de magie. Josèphe, Ant. jud., VII, ii, 5, dit à ce sujet : « Dieu lui accorda la connaissance de l’art contre les mauvais démons, pour l’utilité et la guérison des hommes. Il composa des incantations pour l’adoucissement des maladies, et il laissa des formules d’adjuralions au moyen desquelles on chasse si bien les démons qu’ils ne reviennent plus jamais ; ce mode de guérison produit encore ses effets parmi nous. » Josèphe en cite des exemples. Origène, ïn Matth., xxvi, 63, t. xiii, col. 1757, dit que, chez les Juifs, « les démons sont ordinairement adjurés au moyen des adjurations écrites par Salomon. Mais il arrive que ceux qui emploient ces adjurations ne se servent pas toujours des livres composés pour cela. » Parmi les chrétiens, la croyance au pouvoir des formules salomoniennes contre les démons persista très longtemps. Au ive siècle, on montrait au pèlerin de Bordeaux, à Jérusalem, une crypte dans laquelle Salomon torturait les démons. Cf. Tobler, Palestine descriptiones, Saint-Gall, 1869, p. 3. En 494, le pape Gélase condamna, parmi les livres apocryphes, une Contradiclio, ou Interdictio Salomonis. Il existe encore un livre d’origine chrétienne intitulé Testamentum Salomonis, roulant sur les mêmes sujets. Cf. Fabricius, Codex., 1. 1, p. 1036. En conséquence de cette croyance sur le pouvoir de Salomon contre les démons, son nom revient fréquemmentdans les anciennes formules magiques : SoLou-ûv os 81&>x£t, Solomon teprosequitur, « Salomon te chasse ». Cf. Schûrer, Geschichte, t. iii, p. 299-304. Bien entendu, l’attribution de ce pouvoir magique à Salomon n’a aucune base sérieuse dans la Bible. VII. Les égarements de Salomon. — 1° Leur cause.

— Le règne de Salomon, si glorieusement commencé, finit dans des conditions lamentables. L’historien des Rois raconte seul les égarements du prince ; l’auteur des Paralipomènes les passe sous silence. Le fils de Sirach, après avoir résumé les titres de gloire de Salomon, ajoute tristement, Eccli., xlvii, 19-21 :

Tu t’es livré aux femmes…

Tu as imprimé une tache à ta gloire

Et tu as profané ta race,

Attirant ainsi la colère sur tes enfants.

Je sens une cruelle douleur pour ta folie ;

Elle a été cause que l’empire fut partagé

Et que d’Éphraïm se leva le chef d’un royaume rebelle.

La Sainte Écriture n’incrimine pas les richesses, les dépenses somptuaires et le luxe de Salomon, bien que ces causes aient contribué à amollir son cœur et aient singulièrement favorisé son malheureux penchant pour les femmes. Par sa faute, sans nul doute, toute sa sagesse échoua devant ce dernier genre de séduction. La loi permettait la polygamie, mais elle mettait le roi en garde contre ses excès : « Qu’il n’ait pas nn grand nombre de femmes, de peur que son cœur ne se détourne ; qu’il ne fasse pas non plus de grands amas d’argent et d’or. » Deut., xvii, 17. Salomon paraît avoir pris le contrepied de cette recommandation. Il eut

700 femmes de premier ordre et 300 concubines. III Reg., xi, 3. Dans le Cantique, VI, 8, il n’est encore question que de 60 reines, 80 concubines et de jeunes filles sans nombre. Il est difficile de se faire une idée de ce qu’un pareil troupeau entraînait de dépenses, d’intrigues, de préoccupations, de difficultés, de tentations pour le présent et de menaces pour l’avenir. Le pire est que le monarque n’écoutait que sa passion, et ne tenait pas compte de la loi qui interdisait certaines unions. « Ne traite pas avec les habitants du pays de Chanaan, de peur que tu ne prennes de leurs filles pour tes fils, et que leurs filles, se prostituant à leurs dieux, n’entraînent tes fils à se prostituer aussi à leurs dieux. » Exod., xxxiv, 15, 16. Salomon courut au-devant du péril et y succomba. Parmi les étrangères qu’il admit auprès de lui, outre la fille du pharaon, il y avait des Moabites et des Ammonites, dont les compatriotes étaient exclus pour toujours de la société israélite, Deut., xxiii, 3 ; des Édomites, d’une race exclue seulement jusqu’à la troisième génération, Deut., xxiii, 7, 8 ; des Sidoniennes et des Héthéennes, que frappait l’exclusion portée contre toutes les filles de Chanaan. Ces femmes détournèrent le cœur de Salomon déjà vieux, c’est-à-dire âgé de cinquante à soixante ans, pendant les dix dernières années de sa vie. Aucune influence mauvaise n’est attribuée à l’épouse égyptienne, d’ailleurs éloignée de ses dieux. Mais les autres étrangères prétendirent rendre un culte à leurs dieux nationaux, les Sidoniennes à Astarté, les Ammonites à Melchom, les Moabites à Chamos, les Ammonites à Moloch. Par complaisance pour elles, Salomon laissa faire. Il bâtit même, à l’est de Jérusalem, sur le mont du Scandale ou de la Perdition, des hauts-lieux à Astarté, à Chamos et à Melchom, que Josias détruisit plus tard. IV Reg., xxiii, 13. Là, les étrangères brûlaient des parfums et offraient des sacrifices. Dès lors, « le cœur de Salomon ne fut pas tout entier à Jéhovah, » il alla « après d’autres dieux », se partageant ainsi entre Jéhovah et les idoles. III Reg., xi, 1-10. Sans doute, ces expressions n’impliquent pas une participation personnelle et directe au culte de grossières idoles, et quand le prophète Ahias dit plus tard : « Ils m’ont abandonné et se sont prosternés devant Astarté, Chamos et Melchom, » III Reg., xi, 33, ses paroles peuvent viser le personnel de la cour et les Israélites qui partageaient le culte rendu aux idoles par des épouses aimées etpuissantes. S. Augustin, De Gen. ad lit., xi, 59 ; In Ps., cxxri, 2, t. xxxvii, col. 453, 1667 ; Cont. Faust., xxii, 81, t. xlii, col. 453, croit que Salomon immola réellement aux idoles. S’il n’en vint pas lui-même à cet excès, il n’en fut pas moins gravement coupable de tolérer et de favoriser des pratiques si scandaleuses et si attentatoires aux droits sacrés de Jéhovah, qui l’avait comblé de tant de dons et, par deux fois, s’était manifesté à lui. III Reg., xi, 9. Bien qu’il gardât la foi en Jéhovah, c’était vraiment se détourner de lui que d’agir de la sorte.

2° Leur châtiment. — Dieu fit signifier à Salomon, probablement par le prophète Ahias, la punition réservée à son crime persévérant. Il serait épargné de son vivant, à cause de David ; mais le royaume passerait à un autre que son fils après sa mort ; celui-ci n’en garderait qu’une tribu, et encore en considération de David et de Jérusalem que Jéhovah avait choisie. Dès lors Adad l’Édomite et Razon de Damas devinrent plus menaçants. Le prophète Ahias avertit Jéroboam de la part que Dieu lui réservait, en lui promettant une maison stable s’il restait fidèle au Seigneur. Informé de ce qui lui était destiné, Jéroboam commença un mouvement de révolte contre Salomon. Celui-ci chercha à le faire mourir. Mais le révolté s’enfuit en Egypte, pourn’en revenir qu’à l’avènement deRoboam. IIIReg., xi, 11-40. Voir Jéroboam, t. iii, col. 1301 ; Roboam, t. v, col. 1103. Comme l’indique le fils de Sirach, Salomon