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SALOMON


3° Les instructions de David. — Instruit par cette seconde tentative d’usurpation, David, avant de mourir, tint à signaler à son jeune successeur les mesures qu’il aurait à prendre pour affermir sa royauté. Il lui fallait en premier lieu être fidèle au service de Jéhovah. Puis, il aurait à traiter sévèrement Joab, le meurtrier d’Abner et d’Amasa et le fauteur des prétentions d’Adonias ; il en serait de même pour Séméï, qui avait montré tant de violence contre lui. De tels personnages ne pouvaient être que des causes de trouble pour le nouveau règne. II Reg., ii, 1-9. David ajouta d’autres recommandations relatives à la construction du Temple futur. Il provoqua les offrandes de son peuple, en vue de l’œuvre à entreprendre, et demanda qu’on secondât son fils, encore jeune. I Par., xxix, 1. Il fit offrir devant (tout le peuple de grands sacrifices à Jéhovah, suivis de festins pendant lesquels Salomon fut de nouveau proclamé roi. On l’oignit encore et l’on fit de même pour Sadoc, qui devint grand-prêtre à la place d’Abiathar, compromis dans le complot d’Adonias. 1 Par., xxix, 20-25. David pouvait maintenant mourir : il laissait un successeur incontesté sur un trône affermi.’En faisant renouveler solennellement la cérémonie du sacre, hâtivement accomplie une première fois à la fontaine de Gihon, il avait assuré au nouveau roi la consécration définitive de sa royauté.

III. Les premiers actes du règne. — 1° Les mesures de rigueur. — Pour obéir aux instructions de son père, Salomon surveilla de très près ceux dont la conduite passée pouvait constituer une menace pour son autorité. Adonias, par de nouvelles intrigues, courut lui-même au-devant du châtiment. Il chercha à avoir pour femme Abisag, la Sunamite, la dernière qui avait appartenu à David. III Reg., i, 3, 4. C’était vouloir se créer un titre à la royauté. Salomon le fit mettre à mort, parce qu’il ne voulait pas que son règne fût troublé comme celui de son père l’avait été par la révolte d’Absalom. David avait eu des fils nombreux, dont beaucoup étaient les aînés de Salomon. Il y avait là un danger à écarter, car chacun d’eux pouvait se croire des droits à régner. En faisant périr résolument le plus audacieux, le roi donna à tous les autres un avertissement nécessaire et efficace. — Le grand-prêtre Abiathar avait trempé dans le complot d’Adonias et il avait été remplacé par Sadoc, du temps même de David. ï Par., xxix, 22. Salomon respecta sa vie, mais il le chassa, afin qu’il ne remplit plus ses fonctions. Ainsi se réalisait une prophétie de Samuel à Héli sur le sort réservé aux descendants de ce dernier. I Reg., ii, 30-36.

— Vint ensuite le tour de Joab, l’autre complice d’Adooias. Il eut beau chercher un refuge auprès de l’autel, comme avait fait jadis Adonias ; Salomon l’y fit frapper par Banaïas. — Restait Séméi, l’ancien adversaire de David. II Reg., xvi, 5-13. Il était de Bahurim, où il possédait de grandes propriétés, et commandait à mille hommes de Benjamin. Pour l’isoler de ceux qu’il aurait pu soulever, Salomon lui prescrivit de se fixer à Jérusalem et de ne jamais passer le Cédron, sous peine de mort. Séméi accepta la condition. Mais, trois ans après, il s’échappa pour aller chercher à Geth deux de ses esclaves qui s’y étaient enfuis. À son retour, il fut mis à mort par ordre du roi, conformément à la convention qu’il avait acceptée lui-même. — Ces exécutions peuvent sembler sévères ; mais il faut reconnaître qu’elles étaient justifiées et qu’elles assurèrent à Salomon et à la nation quarante années de tranquillité intérieure, malgré les causes de mécontentement qui se produisirent dans la suite du règne. Elles étaient d’ailleurs conformes aux mœurs orientales, dans un pays où l’autorité ne s’imposait efficacement que par la force. Par contre, Salomon n’eut garde d’oublier la recommandation que son père lui avait faite en faveur

de la famille de Berzellaï. II Reg., ii, 7. Voir Chamaam, t. ii, col. 516.

2° Le mariage avec la fille du pharaon. — L’historien des Rois place ce mariage au début du règne. III Reg., iii, 1. Salomon crut qu’il était de bonne politique de s’allier avec le pharaon d’Egypte. David avait jadis assujetti le pays d’Édom. Il Reg., viii, 13, 14. Mais un prince delà famille royale iduméenne, Adad, avait réussi à. fuir en Egypte, où le pharaon l’avait accueilli avec bienveillance et lui avait même accordé pour épouse une sœur de sa femme, la reine Taphnès. Quand Adad apprit la mort de David et l’exécution de Joab, il revint dans son pays, malgré les observations du roi d’Egypte, et « fit du mal » au royaume israélite, en même temps que Razon de Damas, « qui fut un ennemi d’Israël pendant toute la vie de Salomon. » III Reg., xi, 14-25. Pour empêcher Adad d’abuser contre lui de l’alliance égyptienne, Salomon songea naturellement à s’assurer un appui en Egypte même, où la puissance royale semble avoir été morcelée à cette époque. Salomon demanda sa fille à l’un des pharaons qui régnaient alors sur les bords du Nil et il l’obtint. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, p. 738, Il amena la princesse dans la cité de David, en attendant qu’il eût élevé le palais destiné à son habitation. Ce mariage n’était pas plus contraire à la loi mosaïque que la précédente union du prince avec Naama, l’Ammonite. Il eut des effets avantageux. Salomon dut à cette union la sécurité de ses frontières méridionales, de grandes facilités pour son commerce, la soumission efficace de la population philistine de la côte et la possession de places fortes, parmi lesquelles Gazer était la plus importante, et que le pharaon donna comme dot à sa fille. III Reg., ix, 16. Cf. Maspero, Histoire ancienne, t. ii, p. 738 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iii, p. 268 ; H. Vincent, Canaan, Paris, 1907, p. 464.

3° Le sacrifice de Gabaon. — Aussitôt après son mariage, Salomon organisa une grande démonstration religieuse à Gabaon. L’Arche avait été transportée par David dans la capitale. Mais comme le Temple n’était pas encore construit, on offrait des sacrifices à Jéhovah sur les hauts-lieux. Gabaon en était un, et c’est là que se trouvait alors le Tabernacle. Salomon offrit mille holocaustes sur l’autel de Gabaon ; car « il aimait Jéhovah, marchant selon les ordonnances de David, son père. » III Reg., iii, 3. Le fait d’offrir des sacrifices sur les hauts-lieux ne constituait pas une infraction à la loi mosaïque, bien que la Vulgate semble l’insinuer dans ce dernier texte. C’était une nécessité que le texte hébreu se contente de constater. À la suite de cette solennité religieuse, Salomon eut un songe dans lequel Jéhovah lui apparut et lui dit de demander ce qu’il voudrait. Le roi demanda la sagesse pour juger le peuple et discerner le bien et le mal. Jéhovah, satisfait de cette prière, l’exauça et promit par surcroît à Salomon toutes les prospérités. À la suite de ce songe, Salomon retourna à Jérusalem, se présenta devant l’Arche, offrit de nouveaux holocaustes et des sacrifices d’actions de grâces et donna un grand festin à toute sa cour. III Reg., iii, 4-15 ; II Par., i, 7-13.

4° Le jugement de Salomon. — Le roi eut bientôt l’occasion d’utiliser sa sagesse, quand deux femmes se présentèrent à son tribunal en se disputant la possession d’un enfant. Avec un merveilleux à-propos, il mit en jeu le sentiment maternel pour discerner immédiatement celle des deux femmes à laquelle appartenait l’enfant. Cet épisode est devenu si populaire qu’on en a retrouvé à Pompéi (en 1883) une représentation caricaturale (fig. 283).

IV. Le gouvernement de Salomon. — 1° L’adminisration. — David avait déjà constitué autour de lui tout un corps de fonctionnaires chargés d’administrer