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SALOMON


plique pas aux deux autres passages. Il Reg., v, 14 ; I Par., xiv, 4. Il est donc probable qu’après avoir parlé de la mort du premier fils, l’historien des Rois passe sous silence les deux suivants, pour en venir immédiatement à celui qui fut le plus célèbre et dont il a à raconter l’histoire. — D’après Josèphe, Ant. jud., VII, xiv, 2 ; VIII, i, 1, Salomon était vsivtoitoç naï ; et véoç tV » j).ixf « v ïzi wv, encore très jeune, quand il eut à succéder à son père. Il serait monté sur le trône à quatorze ans et l’aurait occupé quatre-vingts. Ant. jud., VIII, vii, 8. Le second chiffre double celui de la Bible ; le premier ne peut donc inspirer confiance, ni suppléer au silence des auteurs sacrés sur la date de la naissance de Salomon. On ne peut davantage accepter l’assertion de S. Jérôme, faisant arriver Salomon sur le trône à douze ans. In Is., ii, 3, t. xxiv, col. 63. On suppose plus vraisemblablement que le prince avait une vingtaine d’années quand il devint roi. III Reg., m, 7. Cf. Meignan, Salomon, Paris, 1890, p. 20. Il naquit donc vers la vingtième année du règne de David qui dura quarante ans. À cette date, David régnait depuis treize.ans à Jérusalem. III Reg., Il, 11. Il est à croire que son union avec Bethsabée n’avait pas tardé longtemps après son installation dans la nouvelle capitale. Entre la huitième et la vingtième année de son règne, David avait eu le temps, par conséquent, d’avoir plusieurs fils de Bethsabée, et Salomon serait en réalité le plus jeune d’entre eux.

2° Son nom. — Le nom de Salomon vient de sâlôm, qui signifie « paix » et « santé ». Comme les Hébreux s’inspiraient souvent des circonstances pour choisir un nom à leurs enfants, il y a lieu de penser que le nom de Salomon reflète une époque de prospérité et de paix dans le règne de David, telle que celle qui s’écoula entre la guerre contre les Ammonites et la révolte d’Absalom. Il signifie « pacifique », comme le grec E ! pï]vatoç, Irénée, et l’allemand Friedrich, Frédéric. Il avait été choisi par David ; il prévalut sur celui de Yedîdydh, « aimé de Jéhovah », que lui attribua le prophète Nathan. II Reg., xii, 25.

3° Son éducation. — Plusieurs influences heureuses s’exercèrent sur la jeunesse du prince. David, dont les premières années avaient été si dures, si mouvementées, si périlleuses, fit élever son fils dans le calme de sa nouvelle cour. Il veilla à ce qu’une éducation en rapport avec sa condition lui fût donnée. On instruisit donc le jeune prince aussi bien qu’on pouvait le faire à cette époque. Les indications de la Sainte-Écriture sur la suite de son règne montrent qu’on lui apprit la science des lois, la poésie, la science naturelle de l’époque et cette philosophie à la fois théorique et pratique qui se formulait en sentences brèves, mais de forme originale et vive. Cette culture ne pouvait produire que d’excellents effets sur une intelligence éveillée et heureusement douée, comme était celle du jeune prince. Sa mère, Bethsabée, paraît avoir été, à la suite de sa faute et de son repentir, une femme de sens et de bon conseil. Elle exerça sur son jeune fils une influence profitable, que ne gênaient en rien les habitudes de la cour de David. Car les rois israélites n’imposaient nullement aux femmes cet esclavage et cet abaissement qui étaient de règle dans les harems orientaux. Bethsabée put donc se consacrer en toute liberté au soin physique et moral de son fils. Elle y fut puissamment aidée par le prophète Nathan, qui avait salué dans l’enfant naissant le » bien-aimé de Jéhovah », et qui aidera un jour le jeune homme à recueillir la couronne paternelle. Le prophète s’appliqua sans nul doute, de concert avec David sincèrement revenu à la fidélité envers Dieu, à développer la piété dans le cœur du prince. Ses efforts furent couronnés de succès, au moins pendant la jeunesse et la première partie du règne de Salomon. — À cet enseignement théorique

s’ajoutèrent les leçons de l’expérience. Les guerres de David étaient terminées quand Salomon vint au monde. Celui-ci n’acquit donc de connaissances militaires qu’au contact des vaillants hommes qui avaient guerroyé avec son père. Si jeune pourtant qu’il fût alors, il dut être témoin attentif et douloureusement impressionné de la révolte d’Absalom, de la fuite et des épreuves deson père et des calamités qui furent la conséquence de l’ingratitude de son frère aine. — Des chiffres transcrits par les auteurs sacrés, résulte un fait qui nelaisse pas que d’étonner. Salomon régna quarante ans. III Reg., xi, 42. Son fils Roboam avait quarante et un ans quand il lui succéda. III Reg., xiv, 21 ; II Par., xii, 13. Il était donc né un an avant que Salomon ne devint roi, ce qui suppose une chose très naturelle en soi, lemariage du jeune prince vers l’âge de dix-huit ans. Mais Roboam avait pour mère Naama, l’Ammonite. III Reg., xiv, 21 ; II Par., xii, 13. Les Ammonitesétaient exclus à jamais de l’assemblée d’Israël. Deut., xxill, 3. Bien que les mariages avec des Chananéennes fussent seuls formellement défendus, Deut., vii, 3, ceux que l’on contractait avec d’autres étrangères n’étaient pas vus de bon œil, au moins après la captivité. I Esd., ix, 1, 2 ; x, 1-17. Néhémie dit même à ceux qui avaient épousé des Azotiennes, des Ammonites et des Moabites : « N’est-ce pas un péché de ce genre qu’a commis Salomon, roi d’Israël ? » II Esd., xiii, 26. Comment David, Bethsabée et Nathan ont-ils. laissé le jeune Salomon prendre une étrangère plutôt qu’une fille d’Israël ? On l’ignore. Toujours est-il que la chose ne dut pas paraître alors aussi anormale que dans la suite, car les historiens sacrés ne font aucuneremarque à ce sujet.

II. Inauguration du règne. — 1° Désignation de Salomon. — Dieu avait promis à David que sa postérité régnerait après lui et qu’un fils, qui lui succéderait, bâtirait une maison à son nom. II Reg., vii, 12, 13. Mais ce successeur n’avait pas été désigné tout d’abord. Aussi l’un des fils que David avait eus à Hébron, Absalom, le troisième d’entre eux, né de Maaca, fille du roi de Gessur, intrigua-t-il pour s’assurer la succession de son père. II Reg., xv, 1-6. Il finit même par se révolter ouvertement, obligea.David à s’enfuir au delà du Jourdain, s’installa à Jérusalem, mais ensuite fut défait dans la forêt d’Éphraïm et périt de la main de-Joab. II Reg., xviii, 6-15. Cette révolte décida probablement David à prendre des mesures pour désigner son successeur. Il promi^ à Bethsabée que son fils Salomon serait roi après lui. III Reg., i, 13. Lui-même attribua ensuite ce choix à Jéhovah, sans doute parce que-Nathan avait contribué à le lui inspirer. I Par., xxviii, 5, 6. Mais ce choix ne paraît pas avoir été divulgué au moment où il fut arrêté. Les intrigues du frère aîné de-Salomon, Àdonias, hâtèrent l’avènement du fils de Bethsabée au trône. Voir Adonias, t. i, col. 224.

2° Sacre de Salomon. — David ayant été prévenu. qu’Adonias se faisait proclamer roi, le prêtre Sadoc et le prophète Nathan, sur son ordre, firent monter Salomon sur la mule du roi, et, accompagnés de la garderoyale, commandée par Banaïas, et d’une foule de peuple, ils le conduisirent à la fontaine de Gihon, . située dans la vallée du Cédron, à quatre cents mètres au-dessus d’En-Rogel. Voir la carte, t. iii, fig. 249, col. 1355. Là, le prêtre Sadoc oignit Salomon, on sonna de la trompette, tout le peuple cria : Vive le roi Salomon ! et on reconduisit le prince avec de grandes acclamations pour le faire asseoir sur le trône. — Le bruit des trompettes et, aussitôt après, la nouvelle de ce qui venait d’être accompli terrifièrent Adonias, qui courut saisir les cornes de l’autel, pour se garantir contre une exécution possible. Exod., xxi, 14. Salomon l’épargna, à condition qn’il se montrât loyal et se tint tranquille. III Reg., i, 38-53.