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SAGESSE (LIVRE DE LA)

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SAGESSE (LIVRE DE LA), livre deutérocanonique de l’Ancien Testament.

— I. Titre. — Ce livre porte dans la Bible grecque le nom de Soçia Soàomwv (ou SaXuigjLûvTQ ; , SoXo[a(Svtoç)i et dans la version syriaque celui de la « Grande Sagesse de. Salomon », parce qu’on l’attribuait au roi Salomon qui semble adresser un discours aux juges et aux grands de la terre, oi xpîvovre ; tt|V 1^, qui judicatis terram, Sap., i, 1, et aux rois, ta.au.zli, vi, 1 (2) ; TÙpavvoi, vi, 9 (10), et qui, vii, 1-7 ; ix, 7-8, par une figure de rhétorique parle comme s’il était Salomon lui-même. Le titre de « t Livre de la Sagesse », Liber Sapientise, vient de la Vulgate, qui a supprimé le nom de Salomon, parce que saint Jérôme reconnaissait que le fils de David n’en était pas l’auteur. Clément d’Alexandrie, Strom., iv, 16, t. viii, col. 1309, Origène, Ad Rom., vii, 14, t. xiv, col. 1141, l’appellent ^ 6da Soçiot ; Sapientia Dei ; Pseudo-Athanase, Synopsis S. S., 45, t. xxviii, col. 376, et saint Épiphane, De pond., 4, t. xliii, col. 214 ; navipetoç Eoçta, « la Sagesse renfermant toutes les vertus ». Cette dernière qualification a été aussi donnée par les Pères grecs aux Proverbes et à l’Ecclésiastique. C’est parce qu’on attribuait la Sagesse à Salomon qu’elle a été placée dans les Écritures après les autres livres salomoniens, les Proverbes, l’Ecclésiaste et le Cantique des Cantiques, et avant l’Ecclésiastique qui lui est antérieur comme date.

II. Auteur. — L’auteur du livre de la Sagesse est inconnu, 1° Le titre qu’il porte dans la Bible grecque l’a fait attribuer à Salomon par un certain nombre de Pères et d’auteurs ecclésiastiques. Clément d’Alexandrie, Strom., vi, 6, t. ix, col. 274 ; Origène, Comm.in Joa., xx, 21, t. xiy, col. 636 ; S. Hippolyte, Adv. Jud., „ 9, t. x, col. 793 ; S. Épiphane, Hser., lxiv, 54, t. xli, col. 1161 ; Tertullien, De prsescript. hser., 1 ; Adv. Valent. , %, t. 11, col. 20, 514 ; S. Cyprien, De mortal., 23 ; De exhort. martyr., xii, t. iv. col. 599, 673 ; S. Ambroise, De farad., xii, 54, t. xiv, col. 301. Clément d’Alexandrie cite néanmoins quelquefois des passages de la Sagesse sous le nom de 20<pi « , sans les attribuer à Salomon, comme il le fait dans l’endroit cité plus haut ; Origène semble douter de l’origine salomonienne du livre quand il écrit, Cont. Cels., v, 29, t. xi, col. 1225, l] âxiYpa(i.iiévr| SoXojiàSviro ; Soipia. Le Canon de Muratori porte : Sapientia ab amicis Salomonis in honore ipsius scripla. Voir Canon, 1. 11, col. 170. Saint Jérôme n’admet pas que Salomon ait écrit la Sagesse, Prsef.. in libros Salom., t. xxix, col. 404, il dit : Liber qui a plerisque Sapientia Salomonis inscribitur ; saint Augustin non plus, qui dit, De Civ. Dei, xvii, 20, t. xli, col. 554 : Sapientia ut Salomonis dicatur obtînuit consuetudo, non autem esse ipsius non dubitant doctiores. Salomon ne peut être l’auteur de la Sagesse, parce qu’elle a été écrite en grec par un auteur qui vivai plusieurs siècles après le fils de David, comme il sera dit plus loin. Voir IV (Langue), col. 1355.

Divers écrivains juifs et chrétiens ont cependant admis encore que Salomon était l’auteur du livre, tels que le rabbin Azaria de’Rossi, Me’ôr’Ênayîm, édit. de Vienne, 1829, p. 281 6, d’après lequel le livre de la Sagesse aurait été écrit en araméen par Salomon pour un prince de l’Orient ; le rabbin Gedalia, Salsélet hak-kabalâ, p. 104 ; le jésuite Tirin, qui admet que la Sagesse a été "composée en hébreu et conclut, Jn univ. S. Seript. Comm., Turin, 1883, t. iii, p. 5 : Longe probabilius videturipsummet Salomonem auctorem et scriptorem esse ; le commentateur catholique Schmid, Das Buch der Weisheit, 2e édit., Vienne, 1865, p. 41 sq.

2° Certains auteurs reconnaissent qu’il est impossible d’attribuer à Salomon lui-même la composition du livre de la Sagesse, mais frappés cependant de l’attribution qui lui en avait été faite par les Septante, ilsadoptent une opinion moyenne et pensent qu’il a été écrit par

un Juif alexandrin qui s’est servi d’écrits de Salomon aujourd’hui perdus. Auctor Sapientise imitatus [est] Salomonem ejusque sensa, forte etiam sententias et verba in libris hebraicis illius sévi sparsim reperlas collegit, ordinavit grsecaque phrasi et stylo expressif, dit Cornélius a Lapide, In lib. Sap. Argum., Comment. , édit. Vives, t. viii, p. 263 6. C’est l’opinion de Bonfrère, Prssloquia in S. S., vii, 3, dans Cursus S. S. de Migne, t. 1, col. 64 ; de Bellarmin, De verbo Dei, 1, 1& ; de Welte, Einleitung, 1. 11, 3, p. 187 ; de Vincenzi, Sessioir conc. Trid., t. iii, p. 69 ; de Haneberg, Geseh. der bibl. Offenbarung, 4e édit., 1876, p. 491 ; de Cornely, Introd. in libros sacros, t. ii, 2, 1887, p. 225. « Cette assertion, dit M. Lesêtre, Le livre de la Sagesse, 1880, p. 7, est aussi difficile à combattre qu’à prouver. Il est de toute évidence qu’un écrivain sacré, écrivant sur la sagesse, ne pouvait avoir une autre doctrine théologique que celle de ses prédécesseurs ; il y a donc nécessairement des points doctrinaux communs à la Sagesse et aux écrits de Salomon, mais c’est tout ce qu’on peut affirmer. Peut-être même serait-on en droit d’affirmer que s’il était resté du sage roi quelque écrit ou quelque fragment important, Esdras ne l’eût point laissé dans l’ombre. »

3° J. M. Faber, Prolusiones de libro Sapientise, Anspach, 1776-1777, part., v, p. i-vi, a attribué la Sagesse à Zorobabel, parce que, en sa qualité de reconstructeur du temple de Jérusalem, il méritait d’être appelé un autre Salomon. On l’a attribué avec aussi peu de fondement à un essénien, à un thérapeute ou à d’autres auteurs imaginaires. Gfrœrer, Philo und die alexandrinische Theosophie, Stuttgart, 1831, t. 11, p. 265 ; Welte, Einleitung, 11, 3, p. 193 ; Schmidt, Das Buch der Weisheit, 1865, p. 24.

4° Saint Augustin avait cru d’abord, Dedoct. Christ., 11, 8, 13, t. xxxiv, col. 41, que la Sagesse pouvait bien être l’œuvre de Jésus fils de Sirach, mais il reconnut dans ses Retractationes, 11, 4, t. xxxii, col. 631, que c’était une erreur : Jn secundo libro de auctore libri, quem plures vocant Salomonis, quod etiam ipsum sicut Ecclesiasticuni Jésus Sirach scripserit, non ita constare sicut a me dictum est, postea didici, et omnino probabilius comperi, non esse hune ejus libri auctorem. L’auteur ne peut être, en effet, un juif de Palestine comme l’était ben Sirach.

5° Parmi les savants, un certain nombre se sont prononcés en faveur de Philon, soit Philon d’Alexandrie, soit Philon l’Ancien. — a) Nonnulli scriptorum veterum, dit saint Jérôme, Prsef. in lib. Salomonis, t. xxviii, col. 1242, hune [librum] esse Judsei Philonis affirmant. Quels sont ces anciens écrivains, nous l’ignorons : on ne trouve aucune trace de cette opinion chez les autres Pères. Mais elle a été soutenue par un certain nombre d’auteurs du moyeti âge et d’autres plus récents. Jean Beleth, Rationale divinorum officiorum, lix, t..ccit, col. 66, énumère parmi les livres de l’Ancien Testament : [Liber] Philonis, cujus principium est : Diligite justitiam : Sap., 1, 1. Jean de Salisbury écrit, Epist. cxliii, t. cxcix, col. 129 : Librum Sapientise composuit Philo, diciturque Pseudographus, non quia maie scripserit, sedquia maie inscripsit. Inscriptus est enim Sapientia Salomonis, cum a Salomone non sit editus, sed propter stylum quem induérit, et elègantiam morum, quam ei similiter informat, dicitur Salomonis. Luther a partagé le même sentiment. De même Bellarmin, De verbo Dei, 1, 13 ; Huet, Démonstr. évang., Du liv. de la Sag., 11, dans Migne, Démonst. évang., t. v, 1843, col. 371.

Philon ne peut être l’auteur de la Sagesse, par la raison que le livre inspiré enseigne une doctrine qui est tout à fait en opposition avec celle du philosophe alexandrin, comme c’est aujourd’hui universellement reconnu. Philon n’admet pas l’existence d’un prin-