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SACRIFICE


démonstrations sensibles du sentiment religieux. Chez les Israélites en particulier, ces immolations solennelles, exécutées dans un unique et splendide Temple, suivant des règles scrupuleusement observées, à grands frais, par un personnel nombreux et choisi, avec un cérémonial majestueux, ne pouvaient qu’inspirer une haute idée de" la grandeur, de la puissance et de la sainteté de Dieu.

3° Valeur typique. — Les sacrifices de l’ancienne loi figuraient à l’avance le seul sacrifice agréable à Dieu, celui du Verbe incarné. « Le sacrifice par excellence est celui du Christ s’offrant à Dieu en agréable odeur, Eph., v, 2 ; aussi tous les autres sacrifices n’étaient offerts dans l’ancienne loi que pour figurer ce sacrifice principal, comme l’imparfait figure le parfait… Et comme la raison de la figure vient de l’objet figuré, ainsi les raisons des sacrifices figuratifs de l’ancienne loi doivent être demandées au vrai sacrifice du Christ. » S. Thomas, Summ. theol., I » II*, q. en, a. 3. C’est uniquement à cause de ce sacrifice, dont ils étaient la figure, que les sacrifices mosaïques avaient quelque efficacité pour remettre le péché. « Envisagés en eux-mêmes, ils ne pouvaient guérir aucun péché ; mais si l’on regarde du côté des choses dont ils étaient les types, on y trouvait la purification du péché. » S. Augustin, Quasst. xxv in Num„ t. xxxiv, col. 728. « Ils ne causaient pas la grâce, dit Eugène IV dans le Décret aux Arméniens, mais ils figuraient seulement celle qui devait être donnée par la passion du Christ. » La grâce ne pouvait donc procéder, pour les anciens, que du sacrifice de Jésus-Christ. « Comme le mystère de l’incarnation et de la passion du Christ n’était pas encore opéré, les rites de l’ancienne loi ne pouvaient renfermer en réalité la vertu qui découlait du Christ incarné et souffrant, commela renferment les sacrements de la loi nouvelle, et par conséquent ne pouvaient purifier du péché… Mais, au temps de la loi, l’âme des fidèles pouvait s’unir par la foi au Christ incarné et souffrant, et ainsi être justifiée par la foi du Christ. L’observation de ces rites était une sorte de profession de cette foi, en tant qu’ils figuraient le Christ. C’est pourquoi, dans la loi ancienne, on offrait des sacrifices pour le péché, non que ces sacrifices purifiassent du péché, mais parce qu’ils étaient comme une profession de la foi qui purifiait du péché… Celui-ci était remis, non par la vertu des sacrifices, mais grâce à la foi et à la dévotion de ceux qui les offraient. Lev., iv, 26, 31 ; v, 10. » S. Thomas, Summ. theol., I » II*, q. ciii, a. 2. — La valeur réelle des sacrifices dépendait donc de leur valeur typique, moyennant les dispositions inspirées par leur valeur symbolique.

IX. Abolition des sacrifices mosaïques. — Comme toutes les autres institutions particulières à l’ancienne loi, les sacrifices sanglants devaient prendre fin avec la mission du peuple auxquels ils avaient été prescrits. Le prophète Daniel fut chargé de l’annoncer. Parlant de l’Oint qui viendrait un jour et serait retranché, il ajoute : « Il concluera une alliance ferme avec un grand nombre pendant une semaine, et au milieu de la semaine il fera cesser le sacrifice et l’oblation, et sur l’aile des abominations viendra un dévastateur, et cela jusqu’à ce que la destruction qui a été décrétée se répande sur le dévasté. » Dan., ix, 27. Il ne s’agit plus ici d’une interruption du sacrifice perpétuel, comme pendant la persécution d’Antiochus, Dan., xi, 31 ; xii, 11, mais d’une cessation définitive résultant de la destruction de la nation. Malachie, 1, 11, prédit également qu’une oblation pure sera substituée aux sacrifices. La prophétie de Jérémie, xxxiii, 1 8, annonçant qu’il ne manquera jamais d’homme « pour offrir l’holocauste, pour allumer l’oblation et faire le sacrifice tous les jours, » ne concerne donc pas exclusivement le sacerdoce lévilique ; elle a son accomplissement parfait grâce au

sacerdoce et au sacrifice de la loi nouvelle. — Notre-Seigneur ne réprouva pas les sacrifices mosaïques. Matth., v, 23 ; Marc, i, 44 ; Luc, v, 14. Mais il annonça à la Samaritaine que bientôt l’on n’adorerait plus ni au mont Garizim ni à Jérusalem, et qu’au culte ancien serait substitué le culte « en esprit et en vérité ». Joa., iv, 20-23. Les Évangélistes ne mentionnent aucun sacrifice offert par lui dans le Temple, ce qui toutefois ne prouve pas qu’il se soit abstenu systématiquement. Sur la lin de sa vie, il prédit la ruine dû Temple, Matth., xxiv, 1, 2 ; Marc, xiii, 1, 2 ; Luc, xxi, 5, 6, et par conséquent la cessation des sacrifices, qui ne pouvaient être offerts qu’en ce lieu.aÂ. sa mort, le voile du Temple se déchira en deux, Matth., xxvii, 51, marquant ainsi la fin d’un culte qui n’avait plus de raison d’être, — Pendant le siège de Jérusalem par Titus, le 17 du mois de Panémus (17thammouz, 10 juin 70), « le sacrifice perpétuel cessa d’être offert à Dieu, faute d’hommes, et le peuple en fut profondément affligé, » Josèphe, Bell, jud., VI, ii, 1, comme il a été dit plus haut. C’était la fin des sacrifices mosaïques. Depuis lors, les Juifs n’en offrirent plus.

X. Le sacrifice de la croix. — La mort de Jésus-Christ sur la croix est le sacrifice de la nouvelle alliance destiné à remplacer tous les autres. — 1° Ce sacrifice est annoncé dans l’Ancien Testament. Il en est dit au Psaume xxxix (xl), 7, 8 :

Tu ne désires ni sacrifice ni oblation,

Tu m’as percé des oreilles ;

Tu ne demandes ni holocauste ni victime expiatoire,

Alors j’ai dit : Voici que je viens.

Ces paroles sont appliquées au Christ entrant dans le monde par l’Épitre aux Hébreux, x, 5-7. Isaïe parle de la mort du Messie dans des termes qui supposent une immolation sanglante, volontaire et expiatoire :

Il a été transpercé à cause de nos péchés,

Brisé à cause de nos iniquités…

Semblable à l’agneau qu’on mène à la tuerie…

Il a plu à Jéhovah de le briser par la souffrance.

Mais quand son âme aura offert le sacrifice expiatoire,

Il verra une postérité, il vivra de longs jours.

Is., Lin, 5, 7, 10.

— 2° Notre-Seigneur dit formellement que son sang, qui va être répandu, est le « sang de la nouvelle alliance. » Matth., xxvi, 28 ; Marc., xiv, 24 ; Luc, xxii, 20 ; I Cor., xi, 25. Il établit donc une relation de similitude entre son sang et le sang des taureaux immolés au Sinaï, et dont Moïse a dit : « C’est le sang de l’alliance que Jéhovah a conclue avec vous. » Exod., xxiv, 8. De part et d’autre, il y a victime, immolation, sang versé, alliance scellée et, par conséquent, sacrifice. — 3° Les Apôtres parlent de la mort de Notre-Seigneur comme d’un sacrifice. Le Christ « nous a aimés et s’est livré lui-même à Dieu pour nous comme une oblation et un sacrifice d’agréable odeur. » Eph., v, 2. « C’est lui que Dieu a montré comme victime propitiatoire par son sang. » Rom., iii, 25. Nous avons été affranchis « par un sang précieux, celui de l’Agneau sans défaut et sans tache, le sang du Christ. » I Pet., i, 19. « Il est lui* même une victime de propitiation pour nos péchés, non seulement pour les nôtres, mais pour ceux du monde entier. » 1 Joa., ii, 2. Il estl’Agneau de Dieu, Joa., i, 29, c’est-à-dire celui qui a été choisi pour être victime, l’Agneau quia été immolé, Apoc, v, 6, 9, et qui l’a été dès la fondation du monde, Apoc, xiii, 8, dans la pensée divine, en vue et en figure duquel tous les autres sacrifices ont été institués. — 4° L’Épitre aux Hébreux fait plus particulièrement ressortir le caractère du sacrifice de Jésus-Christ, en le comparant aux sacrifices anciens. La première alliance avait son culte et ses sacrifices ; le Christ a aussi son sacrifice et son alliance nouvelle, non dans le sang des animaux, mais dans