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SABBAT


n’osent pas exercer leur trafic le jour du sabbat. Jérémie signale différentes infractions à la loi. On fait passer des fardeaux par les portes de Jérusalem en ce jour-là et l’on se permet certains ouvrages. Jer., xvii, 21-27. Aussi Dieu fera cesser les sabbats en Israël, Ose., ii, 11, et à Sion, Lam., ii, 6. Après le retour de la captivité, la loi fut encore très mal observée ; le travail et le commerce allaient grand train à Jérusalem. Néhémie se montra très énergique dans la répression de ces abus. Il fit fermer les portes de Jérusalem pendant plusieurs sabbats et interdit ainsi l’accès de la ville aux marchands tyriens qui y apportaient leurs denrées en ce saint jour. II Esd., xiii, 15-22. — À l’époque machabéenne, la célébration du sabbat fut interdite par Antiochus Épiphane, I Mach., i, 48 ; II Mach., vi, 6, et beaucoup d’Israélites devinrent profanateurs du sabbat. I Mach., i, 45. Par réaction contre l’impiété et zèle de la loi, le parti national, à l’exemple des Machabées, se montra fidèle observateur du précepte divin. Il poussa même l’obéissance jusqu’à un héroïsme exagéré. Les Juifs palriotes, réfugiés au désert, furent attaqués un jour de sabbat par les soldats syriens ; ils crurent que ce serait violer la loi du repos que de se défendre et ils se laissèrent massacrer au nombre de mille. Mathatbias comprit qu’un pareil exemple, s’il était suivi, entraînerait à bref délai la ruine de la nation et il décida

: jue désormais la loi du sabbat n’arrêterait pas la résistance.

I Mach., ii, 32-41. Cf. Josèphe, Ant. jud., XII, vi, 2 ; XIV, iv, 2 ; XVIII, ix, 2. D’autres Juifs, réfugiés dans des cavernes pour célébrer le sabbat, se laissèrent néanmoins brûler sans se défendre, pour ne pas enfreindre la loi. II Mach., vi, 11. Les ennemis s’efforçaient d’ailleurs d’attaquer les Juifs le jour du sabbat, comptant qu’ils n’oseraient pas combattre. I Mach., ix, 43 ; II Mach., v, 25 ; XV, 1. Cf. Josèphe, Ant. jud., XIII, xii, 4 ; XIV, iv, 2. Quand la nécessité ne les y obligeait pas, les Juifs cessaient de combattre à l’approche du sabbat. II Mach., viii, 26-27. Cf. Josèphe, Bell, jud., II, xxi, 8 ; Vita, 32. Pour gagner les Juifs à sa cause, le roi Démétrius I ar leur promit de leur assurer l’immunité le jour du sabbat. I Mach., x, 34. III. Le sabbat et la pratique juive. — 1° Les prohibitions. — À partir de l’époque où le formalisme pharisien exerça son influence sur l’interprétation de la loi, le précepte sabbatique fut l’objet d’une multitude d’explications de la part des docteurs. Leurs décisions se trouvent dans les traités de la Mischna Schabbalh, Erubin et Beza ou Yotn tob. Voir Mischna, t. iv, col. 1128. — a) Énuméralion. —Ils comptaient 39 « pères des œuvres » ou travaux principaux qui entraînaient des actes incompatibles avec le repos sabbatique. Ces travaux étaient les suivants : 1. semer, 2. labourer, 3. moissonner, 4. mettre en gerbes, 5. battre le blé, 6. vanner, 7. nettoyer le grain, 8. moudre, 9. tamiser, 10. pétrir, 11. cuire, 12. tondre la laine, 13. la blanchir, 14. la carder, 15. la teindre, 16. filer, 17. tramer, 18. faire deux points, 19. tisser deux fils, 20. détacher deux fils, 21. nouer, 22. dénouer, 23. nouerdeux points, 24. déchirer pour coudre, 25. chasser une bête, 26. la tuer, 27. l’écorcher, 28. la saler, 29. préparer la peau, 30. la racler, 31. la dépecer, 32. écrire deux lettres, 33. effacer pour écrire deux lettres, 34. bâtir, 35. démolir, 36. éteindre, 37. allumer, 38. se servir du marteau, 39. transporter d’un lieu à un autre. Schabbath, vu, 2. — 6) Commentaires : défense de moissonner, de nouer. — Chacun de cesarticles fournissait matière à nombreux commentaires. Ainsi la défense de moissonner était enfreinte si l’on cueillait deux épis. « Il n’est permis de couper ni une branche, ni un rameau, ni une fleur, ni même de cueillir un fruit. » Philon, Vit. Mosis, ii, 4, édit. Mangey, t. ii, p. 137. La défense de nouer s’interprétait ainsi. Sont prohibés les nœuds des chameliers et des bateliers ; il y a égale faute à les

faire et à les défaire. Il n’y a point faute à dénouer d’une seule main ; une femme peut nouer l’ouverture de sa robe, les rubans de sa coiffure, les bandes de sa ceinture ; on peut nouer les cordons de ses souliers et de ses sandales, les outres de vin et d’huile et le couvercle d’un pot de viande. Schabbath, xv, 1, 2. Quand la ceinture a été nouée, on ne peut la dénouer, même pour descendre un sceau à la fontaine ; il faut alors prendre une corde. Schabbath, xv, 2. — c) Défense d’écrire. — La défense d’écrire donne lieu à des explications des plus méticuleuses. Il y a faute à écrire deux lettres, soit de la main droite, soit de la main gauche, que ce soit deux fois la même ou deux lettres différentes, même avec deux encres distinctes ou en deux langues. On est coupable en écrivant deux lettres même par distraction, qu’on ait écrit avec de l’encre, de la couleur, de la craie, de la gomme, de l’acide, ou quoi que ce soit qui trace des caractères persistants. On l’est encore en écrivant sur deux parois ou sur deux tableaux dont le rapprochement permet de lire ensemble les deux lettres, ou en écrivant sur son propre corps. Il est permis d’écrire sur un liquide opaque, sur du jus de fruits, sur la poussière du chemin, sur le sable, en un mot sur toute matière qui ne garde pas l’écriture. Si quelqu’un écrit à l’envers ou avec le pied, la bouche, le coude, et qu’ensuite on ajoute des lettres ou qu’on superpose une autre écriture ; si quelqu’un a l’intention d’écrire un n et écrit deux tt, si on écrit une lettre sur la terre et l’autre sur le mur, ou sur deux murs de la maison, ou sur deux feuilles d’un livre, de manière qu’on ne puisse les lire ensemble, il n’y a pas de faute. Celui qui, par inadvertance, écrit deux lettres en deux fois, par exemple une le matin et l’autre le soir, est coupable d’après Gamaliel, mais sans faute d’après les docteurs. Schabbath, xii, 3-6. — d) Le chemin du sabbat. — Le chemin que l’on pouvait faire le jour du sabbat était rigoureusement déterminé. On l’appelait fehûni has-sabbâ(, « limites du sabbat », et aaêêizov 656 ; , sabbali iter, « chemin du sabbat ». Act., i, 12. Ce chemin comprenait deux mille coudées, ou environ un kilomètre hors de toute ville, petite ou grande, le chemin parcouru dans la ville même ne comptant pas. La longueur en avait été fixée parles docteurs Barachibas, Siméon etHillel. Cf. S. Jérôme, Epist. cxxi, 10, t. xxii, col. 1031 ; Josèphe, Ant. jud., XIII, viii, 4. On basait cette fixation sur la distance qui avait dû séparer le Tabernacle de l’extrémité du camp des Hébreux. Cf. Jos., iii, 4. La distance de Jérusalem au mont des Oliviers, appelée dans les Actes, i, 12, « chemin du sabbat », était d’après Josèphe, Bell, jud., V, ii, 3, de six stades, soit de 1064 mètres. Ailleurs, Ant. jud., XX, viii, 6, il estime cette distance à cinq stades, soit 887 mètres. On trouva moyen d’allonger ce chemin. Si, la veille du sabbat, on portait ses deux repas hors delà ville, mais dans les limites du chemin sabbatique, il était permis de compter les deux mille pas à partir de cet endroit. De plus si les habitants de maisons différentes convenaient de prendre leur repas en commun, ces maisons n’étaient censées former qu’un seul lieu, ce qui permettait de transporter les objets de l’une dans l’autre. Cf. Gem. Sabbath, xi, 2.

2° Les choses permises. — a) Loi liturgique. — Le service du Temple n’était pas interrompu le jour du sabbat. Les prêtres y remplissaient leurs divers offices comme à l’ordinaire, immolaient les victimes, portaient les fardeaux, allumaient le feu et les lampes, etc. Matth., XII, 5. D’ailleurs des sacrifices particuliers devaient être offerts le jour du sabbat. Num., xxviii, 9, 10. Si la Pâque tombait ce jour-là, on la célébrait conformément aux prescriptions légales, sans tenir compte des défenses contraires résultant du sabbat. Pesachim vi, 1, 2. On imposait également la circoncision, après