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ROMAINS (ÉPÎTRE AUX)


dans une certaine mesure, au caractère propre de ces deux sortes de compositions.

"V. Authenticité et canonicité. — Avec la première Épître aux Corinthiens, cette lettre est, dans toute la correspondance de saint Paul, celle qui possède la plus riche tradition littéraire. On en trouve des citations non seulement dans les Pères apostoliques, mais dans le Nouveau Testament lui-même. Tout d’abord dans la I Pétri : ceci résulte de la comparaison des passages suivants : Rom., ix, 25, et I Pet., ii, 10 ; ix, 32, et ii, 6-8 ; xii, 1, et ii, 5 ; xii, 2, et i, 14 ; xii, 3, et iv, 7-11 ; xii, 9, et / i, 22 ; xii, 16, et iii, 8-9 ; xiii, 1, et ii, 13-17. De plus, I Pet., ’ii, 6, une citation de l’Ancien Testament, tirée des Septante, avec les mêmes variantes que Rom., ix, 32, des images semblables pour désigner le sacrifice, Rom., xii, et I Pet., ii, 5, certaines expressions caractéristiques, telles que avay/^ax’Xta^ai, âvuitôxptTo ; et des idées présentées dans le même ordre. Rom., xiii, 1-7, et I Pet., ii, 13-17. On note aussi une certaine ressemblance avec deux passages de l’Épître aux Hébreux, en particulier un passage du Deutéronome que les deux lettres rapportent en s’écartant de la même façon delà version des Septante. Rom., iv, 17-21, et Heb., xi, 11, 12, 19 ; xii, 19-x, 3. On pense aussi trouver une certaine analogie et peut-être une dépendance entre les deux derniers versets de l’Épître de saint Jude, 24-25, et le doxologie finale de l’Épître aux Romains, xvi, 25, 27. Dès le seuil de l’âge apostolique, les emprunts à notre Épître sont nombreux et indiscutables, d’abord chez saint Clément de Rome, Rom., i, 21, et Clem., xxxvi, 51 ; n, 24, et 47 ; iv, 7, 8, 9-50 ; vi, 1-33 ; i, 29, et 35 ; x, 4-32 ; xm, 1, 2, et 61 ; dans les lettres de saint Ignace ; Rom., i, 3, et Smyr., i ; ii, 24, et Trall., 8 ; iii, 27 ; Ephes., 18 ; vi, 4 ; Ephes., 19 ; vi, 5 ; viii, 17, 29, et Mag., 5, Trall., Q ; i, l, et Mag., 6 ; vii, 6, et Mag. 9 ; viii, 11, et Trall., 9 ; ix, 23, et£p/*., 9 ; xiv, 17, et Trall., 2 ; xv, 5, et Eph., 1, des points de ressemblance avec la lettre de Polycarpe, Rom., vi, 13, etPol., 4 ; xiii, 12, et Pol., 4 ; xii, 10, etPol., l ; xiii, 8, et Pol., 3 ; xiv, 10, et Pol., 6 ; des réminiscences dans Aristide et dans saint Justin. Même des hérétiques appartenant aux sectes de Valentin et de Basilide s’en servaient comme base d’argumentation. L’auteur des Douze patriarches paraît lui-même l’avoir utilisée. Rom., i, 4, et l’est. Lev. AS ; ii, 13, et Test. Aser, 4 ; v, 6, et Test. Ben}., 3 ; VI, et Test. Lev., 4 ; vi, 7, et Test. Sinu, 6 ; vii, 8, et Test. Neph., 8 ; viii, 28, et Test. Benj., 4 ; ix, 21, et Test. JVep/i., 2 ; xii, i, et Test. Lev., 3 ; xii, 21, etTest.Benj., 4 ; xiii, 12, et Test. Neph., H ; xv, 33, et Test. Dan., 5 ; xvi, 20, et Test. Aser., 7. Jusqu’ici, pourtant, aucune citation formelle. Marcion l’avait insérée, mais en la mutilant, dans son Apostolicon, après la seconde Épître aux Corinthiens. À partir de saint Irénée, tous les auteurs ecclésiastiques la citent comme desaintPaul et la regardent comme la base de la théologie chrétienne. Ainsi, en résumé, l’Épître aux Romains est connue et employée à Rome et même ailleurs : dans le premier quart du IIe siècle, elle fait partie de la collection des Épîtres pauliniennes dont on se sert déjà à Antioche, à Rome, à Smyrne, peut-être même à Corinthe ; au milieu du ip siècle, elle entre dans V Apostolicon de Marcion, et vers la fin du même siècle elle est partout reçue comme canonique. À ces témoignages externes se joignent des critères d’évidence interne si frappants que la critique radicale de Tubingue n’a pu les contester. L’Épître aux Romains est une des quatre lettres de saint Paul que la presque unanimité des critiques déclare inattaquable. Les opposants, depuis Évanson (1792), sont très peu nombreux. Les tentatives de Bruno Bauer, en 1852, contre l’authenticité de cette Épitre, sont restées sans résultat. Elles n’ont guère trouvé de crédit qu’auprès de certains théologiens de Suisse et de Hollande. Loman, professeur à Amsterdam, s’appuie sur le silence des Actes, de prétendues incohé rences dans le contenu de l’Épître, dans la variété des opinions sur l’origine de l’Église romaine, pour rejeter notre Épître. Quxstiones Paulionæ, dans Theologisch Tijdschrift, 1882, 1883, 1886. En 1888, Steck, professeur à Berne, fait de l’Épître aux Romains le premier manifeste d’un petit cénacle de philosophes chrétiens grecs établi à Rome au commencement du il" siècle. Der Galaterbrief nach seiner Echtheit uniersucht, Berlin, 1888. — À côté de ces négations radicales ont pris place diverses hypothèses, ^émergèrent diverses recensions, même de nombreuses interpolations dans l’Épître aux Romains. Weisse, Beitrâge zar Kritik der Paulinischen Briefe an die Gàlaten, Rômen, PMUppen und Colossen, Leipzig, 1837 ; Naber, Verisimilia, Laceram conditioner) ! N. T. èxhibentia, Amsterdam, 1886 ; Michelsen, dans Theologisch Tijdschrift, 1886 ; Vôlter, dans Theologisch Tijdschrift, 1889, p. 265 ; von Manen, De Brief aan de Romeinen, Leyde, 1891. L’ardeur de ces attaques n’a pas dépossédé notre Épître des marques d’indubitable authenticité qu’on n’a cessé de lui reconnaître dès l’origine.

VI. Intégrité. — Le texte grec de l’Épître aux Romains se trouve en entier dans les manuscrits suivants : A, B, L, S. Dans les autres codex, il y a des variantes ou des omissions. Les principales versions de l’Épître aux Romains sont les versions latines. Voir Sanday et Headlam, À critïcal and exegetical commentary on the Epistle to the Romans, p. lxiii-lxxiv.

Les objections contre l’intégrité sont peu importantes.

— 1° Les mots h 'Pu>|j.ri, i, 7 et 15, . manquent dans le texte grec et latin du manuscrit G ; omission renforcée par une note marginale du manuscrit xlvii, au ꝟ. 7, tô èv’Pcô(i.r| o’2t£ êvTij êÇriyr, (ret oû’ts év tû fltw (ivrijiovEÛet. Plusieurs en concluent, comme pour l’Épître aux Éphésiens, que l’original était une lettre encyclique qui devait circuler à travers les principales communautés : Rome, Éphèse, Thessalonique ; chacun des exemplaires destinés à ces églises laissait en blanc dans l’adresse, le nom de l’Église qui devait la recevoir. D’autres n’y voient qu’une fantaisie de scribe. La leçon Romse a pour elle la presque totalité des manuscrits.

2° Une autre variante concerne le plan de la doxologie finale, xvi, 25-27, dans plusieurs manuscrits. —’1. Les codex), , ’B, C, D, E, Origéne latin, la Vulgate, la Peschitto, la version hébraïque, la version éthiopienne, l’Ambrosiaster, Pelage la placent à la fin du ch. xvi. — 2, Le codex L, 200 manuscrits byzantins, les lectionnaires, la version syriaque de Thomas d’Héraclée, saint Chrysostome, Théodoret, saint Jean Damascène, la mettent à la fin du ch. xiv. — 3. Les onciaux À et P et les cursifs 5, 17, l’ont tant à la fin du ch. xiv, qu’à la fin du ch. xvi. — 4. Les codex F et G, à la suite de Marcion, l’omettent totalement, laissant en blanc la flnduch.xiv. Quelques-uns supposent, pour expliquer ces omissions, que dès une époque très ancienne, toute la portion du texte depuis xiv, 23, à xvi, 24, aurait été retranchée dans un certain nombre de documents. Rinck a même émis l’idée que des exemplaires mutilés par les Marcionites avaient été employés plus tard dans l’Eglise, sans qu’on ait pris le soin d’y replacer les ch. xv et xvi. Godet propose quelque chose de plus matériel. « On sait, dit-il, qu’un grand nombre de leçons propr.es au texte byzantin proviennent de modifications exigées par les besoins de, 1a lecture publique ; ainsi, par exemple, la substitution si fréquente du nom propre au pronom, au commencement des morceaux destinés aux lectures régulières. Or ce sont précisément les autorités byzantines, minuscules, lectionnaires cod. LI, qui présentent la ligne dont nous nous occupons ; Pourquoi ? Parce que la lecture publique avait uniquement en vue l’édification et que les ch. xv et xvi, ne contenant guère que des détails historiques, d’un intérêt local ^et temporaire, n’avaient que peu de prix à ce point de vue. Il