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RAMSÈS II


ciens eux-mêmes servirent de carrière à ses ouvriers. Cf. entre airtres, Quibell, The Ramesseum, 1896, pi. xi et p. 15 ; pi. xin et p. 16. Voir dans Maspero, loc. cit., p. 408-423, le tableau de ses principales entreprises d’Ibsamboul à Memphis, en passant par Derr, Ès-Seboua, Kouban, Gerf-Hosséin, Bélt-Oually en Nubie ; par les deux rives de Thèbes, par Aoydos et Heracléopolis. Jamais la lièvre des constructions colossales ne fut si intense, jamais si nombreux les bras réduits à la corvée par « le roi maçon par excellence. » Le Delta oriental surtout attira son attention et toutes les cités qui en faisaient partie, « Héliopolis, Bubaste, Athribis, Patoumou, Mendès, Tell-Mokhdam… forment comme un musée dont chaque pièce rappelle son activité. .. Il fit de Tanis une troisième capitale, comparable à Memphis et à Thèbes… Il releva le temple et y ajouta des ailes qui en triplèrent l’étendue… son nom y encombre les murailles, les stèles renversées, les obélisques couchés dans la poussière, les images de ses prédécesseurs qu’il usurpa. Un géant de grès statuaire, assis comme celui du Ramesseum, s’échappait de la cour maîtresse et semblait planer haut par dessus le tumulte ; des [constructions. » Maspero, loc. cit., p. 423-424 et notes. C’est là que se trouvait la fameuse Stèle de l’an 400 découverte par Mariette et publiée par lui dans la Revue archéologique, nouvelle série, t. xi, 1865, pi. IV et p. 169-190. Ramsès II colonisa spécialement l’ouadi Tôumilat. Outre Pitum, voir Phithûm, col. 323-324, tous les tells environnants, Sopt, Rotab, Iiantir, Khataanéh, Fakous et Horbéit rendent ses statues et ses cartouches. Naville, The shrine of Saft el-Henneh and the Land of Goshen, 1887, p. 18 (mémoire V de YEgypt Exploration Fund). On les a retrouvés encore sur le bord du lac Timsah, au pied du Djebel Maryam, là où Naville, The Store city of Pithom, 4e édit., 1903, p. 25, n’avait vu qu’un emplacement romain. Au préalable, Ramsès avait canalisé l’ouadi. C’est sur ce fait que s’appuyèrent les auteurs classiques, ’Aristote, Meteorol., i, 14, Strabon, i, 1, 31, Pline, H. N., vi, 29, 165, pour lui prêter l’intention d’avoir voulu établir la communication entre le Nil et la mer Rouge, intention, disent-ils, qu’il ne put réaliser, comme le fit plus tard Néchao. Hérodote, ii, 158. Il releva ou agrandit les postes fortifiés qui commandaient à l’est du Nil les débouchés par où les nomades menaçaient les plaines du Delta oriental. Il en construisit de nouveaux. Et c’est encore ce qui lui valut la réputation d’avoir établi cette ligne de défense, Diodore, I, 57, ligne qui datait de l’Ancien Empire. Cf. Maspero, loc. cit., t. i, p. 351-352, 469 ; t. ii, p. 122, 409.

III. Ramsès et les Hébreux. — Si le chiffre de 430 ans de l’hébreu et de la Vulgate, Exod., i, 11, doit être accepté pour le séjour des Hébreux en Egypte ; si leur arrivée est à placer sous les Hyksos égyptianisés ; si l’Exode s’est accompli sous Ménéphtah, ou même un peu après lui, comme le veut Maspero, loc. cit., t. ii, p. 444, évidemment Ramsès II est à tout le moins le principal oppresseur des Hébreux. Or, le -, chiure de 430 ans nous semble le plus naturel si nous songeons que, « après la mort de Joseph et celle de tous ses frères, et de toute cette génération, les enfants d’Israël s’accrurent et se multiplièrent extraordinairement ; et étantdevenus extrêmement forts, ils remplirent toute la contrée. » Exod., i, 6-7. Et c’est au moment de cette multiplication accomplie que « s’éleva en Egypte un nouveau roi qui ne connaissait pas Joseph, » y. 8. Tout cela joint au temps de la persécution suppose un laps de temps considérable et l’on peut difficilement réduire à 250 ans le séjour enEgypte. "Voir Chronologie biblique, t. [il, col., 737. Cf. Lesêtre, Les Hébreux en Egypte, dans la Revue pratique d’apologétique, t. iii, 1906-1907, p, 225-228, qui est pour la réduction. Ajoutons que la persécution a dû commencer sousSéti I er

et que c’est lui peut-être le <t roi nouveau qui ne connaissait pas Joseph, » puisque c’est sous lui, Ramsès II étant déjà son associé au trône, que recommencent en Egypte les grands travaux, et que dès lors la corvée devient rigoureuse. En second lieu, l’arrivée de Jacob en Egypte à la dernière période des Hyksos nous est attestée par une tradition constante, voir Joseph, t. iii, col. 1657, Pharaon 3, col. 196-197, et l’avis des égyptologues, quel que soit leur sentiment sur l’oppresseur et sur l’Exode, est unanime sur ce point. Maspero, loc. cit., t. ii, p. 71 et n. 2 ; Erman, Zur Chronologie der Hyksos, dans Zeitschrift fur âgyptische Sprache, t. xviii, 1880, p. 125-127 ; Lieblein, The Exodus of the Hebrews, loc. cit., p. 217 ; Spiegelberg, Der Aufenthalt Jsræls invegypten, Strasbourg, 1904, p. 13, etc. En troisième lieu, l’Exode dans les premières années de Ménéphtah fut d’abord admise à peu près généralement par les premiers égyptologues. E. de Rougé, Examen critique de l’ouvrage de M. le chevalier de Runsen, 1846-1847, dans Œuvres diverses, t. i, 1907, p. 165 (Rîbliothèque égyptologique, t. xxi), et Moïse et les monuments égyptiens, dans Annales de la philosophie chrétienne, 6e série, t. i, p. 165-173 ; Chabas, Recherches pour servir à l’histoire de l’Egypte sous la XIXe dynastie et spécialement à celle du temps de l’Exode, 1873, p. 139 sq. ; Brugsch, Geschichte Aegyptens, 1877, p. 581584 ; Ebers, Durch Gosen zurn Sinai, 1872, p. 139, etc. Mais si aujourd’hui beaucoup retiennent cette opinion, Pétrie, Egypt and Israël, dans Contemporary Review, mai 1896, p. 617-627 ; Spiegelberg, (oc. cit. ; Sayce, The Egypt of the Hebrews, 3e édit., 1902, p. 91-100, etc., un certain nombre d’autres la rejettent à la suite de Lieblein. Nous y reviendrons. Pour le moment, et quoi qu’il en soit, il est à remarquer que les 430 ans du Séjour des Hébreux en Egypte confirment l’opinion traditionnelle. Cette durée remplit en effet tout l’espace compris entre Ménéphtah et les derniers Hyksos, 1225-1655. Et ceci nous ramène pour l’oppression au prédécesseur de Ménéphtah, à Ramsès IL La Stèle de l’an 400 nous y ramène également. Elle nous apprend que Ramsès II dépêcha son vizir Seti à Tanis avec l’ordre d’y ériger une stèle en l’honneur de Séti I er. Le vizir en prit occasioade faire sienne la stèle, y gravant ses prières au-dessous du protocole de son maître et la datant de la 400° année d’un roi Hyksos, Aâpehetiset-Noubti. Malheureusement l’année de Ramsès n’y figure pas et l’on ne peut que conjecturer d’après les 430 ans du séjour en Egypte, que l’érection de la stèle eut lieu vers l’an XL de ce pharaon. Eh tout cas, la période désignée par l’an 400 cadre avec nos autres données. Par l’un de ses extrêmes elle nous conduit aux Hyksos égyptianisés, car on ne peut supposer que Noubti servant de point de départ à une ère ne soit un de ceux-là ; par l’autre, elle nous fait tomber en pleine oppression des Hébreux, précédant l’Exode d’une trentaine d’années.

2° Le récit de l’Exode suppose un règne tranquille, un roi grand bâtisseur, pour qui les guerres à un moment donné ne fournissent plus de captifs, un roi inquiet du côté de l’est et d’un règne très long, un roi qui s’appelait Ramsès, qui colonisa et fortilia d’Ouadi-Toumilat. Or, sous Séti I er, sous Ramsès II surtout, la paix règne à l’intérieur de l’Egypte, le pouvoir est assez fort pour s’imposer brutalement et sans résistance. Cf. Lettre d’Ameneman, dans Papyrus Salliei- 1, pi. vi, lig. 2-8, et Papy>-us Anastasi V, pi. xv, lig. 8, xvii, lig. 2. À l’extérieur, si du vivant de Seti, puis durant les vingt-et-uneprernières années de Ramsès II, la guerre est menée presque sans répit, ce ne sont qu’excursions et rentrées triomphales dont le profit le plus net se chiflre par des milliers de captifs qui vont alimenter les chantiers. Cf. Hérodote, ii, 108 ; Diodore,