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RAMSÈS II


appellation de celui qui la colonisa avec prédilection et en fit une terre administrée. Ce Ramsès est vraisemblablement Ramsès II, celui dont les cartouches s'étalent à peu près sur toutes les ruines de l’Egypte, de la seconde cataracte aux bouches du Nil :

Ramessu ou Ramsès Meri-Amon ou Mïamon, ouser maat rà sotep en rà « Rà l’a enfanté, l’aimé d’Amon, riche de la vérité de Râ, l'élu de Rà. » De la première partie de son prénom, Ouser maat rà, les Grecs firent Osymandias. Autour d’un des surnoms de sa jeunesse, Sesturî ou Sessuri, l’imagination populaire et surtout la littérature grecque groupèrent plus tard les éléments dont se compose le roman ou la (reste de Sésostris. Cf. Maspero, La geste de SésostHs, dans le Journal des savants, 1901, p. 593-609, 665-683. Nous ne prendrons de sa vie, telle qu’elle ressort des monuments, que les faits pouvant éclairer nos conclusions.

I. Ses guerres. — D’après une chronologie approximative et reçue d’un grand nombre, mais contestable, voir Chronologie, t. ii, col. 721, Ramsès II régna de 1292 à 1225 avant J.-C. Dans une stèle d’Abjdos, Ramsès IV de la XXe dynastie se souhaite à lui-même les soixante-sept années de Ramsès II. Mariette, Abydos, t. ii, 1880, pi. 34-25, lig. 23-24. Et dans ces soixante-sept années n’entrent pas les années de co-régence avec son père Seti I er. Si, en effet, dans la Grande Inscription d' Abydos, Mariette, loe. cit., t. i, 1870, pi. 1, lig. 47-48, Ramsès II nous dit lui-même qu’il était encore « un enfant dans les bras de son père » lorsque celui-ci s'écria : « Qu’il reçoive la couronne royale pour que, moi vivant avec lui, je le voie dans sa splendeur ; » si, d’autre part, danslaStèfe de Kouban, Prisse d’Avenues, Monuments égyptiens, pi. xxi, lig. 16-17 ; cf. Chabas, Les Inscriptions des mines d’or, 1862, p. 24-25, il se vante d’avoir occupé une situation officielle et commandé les armées dès l'âge de dix ans ; toutefois il ne date que de l’an 1 les faits qui suivirent immédiatement la mort de Séli I er. Grande inscription d' Abydos, lig. 22, 26, 72. Cf. Maspero, La grande inscription d' Abydos et la jeunesse de Sésostris, 1869, p. 14, 17, 48. Resté seul maître du trône, , il se trouvait à la tête d’une Egypte tranquille au sud et au nord. Son pouvoir s’exerçait en Asie sur la péninsule sinaïtique, les oasis ^du désert d’Arabie, la côte phénicienne proprement dite, la Palestine, et son influence se faisait plus ou moins sentir jusqu’aux sources du Litany et de l’Oronte. Traité des Héthéens avec Ramsès II, dans Brugsch, Recueil de monuments, t. i, 1862, pi. xxviii, lig. 5-7, où il est fait allusion à un traité ancien et qu’on ne fait que renouveler. Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, t. ii, 1897, p. 372, 403. On est loin toutefois de l'époque où Thothmès III érigeait ses stèles au bord de l’Euphrate. Mariette, Karnak ; 1875, pi. xiii, lig. 17-18 ; E. dé Rougé, Notice de quelques fragments de l’inscription de Karnak, 1860, p. 17-18, 24-26. Et les Khétas, les Héthéens de la Bible, restent à craindre. Constitués en une puissante confédération, répandus de la Commagène à l’Oronte, tenant les villes de Carchamis sur l’Euphrate, de Kadesch sur le haut Oronte, de Khaloupou (Alep) et Hamath, ils avancent sans cesse dans la Cœlésyrie et intriguent contre les possessions égyptiennes. Aussi dès l’an IV Ramsès II pousse une pointe jusqu’au nord de Beyrouth, à l’embouchure du Nahr el-Kelb, le Lycus des anciens. Il y grave sur les rochers ses stèles triomphales. Lepsius, Denkmâler, t. iii, pi. 197 a-c La stèle 6 porte clairement la date de l’an IV. Breasted, Ancient Records of Egypt, t. iii, 1906, p. 125. Mais le prince des Héthéens, Moutalou, veut l’arrêter. J. de Rougé, Poème de Pentaour, lig. 1-3, dans Revue égyptolo gique, t. iii, p. 149 ; Breasted, loc. cit., p. 136. Une bataille décisive a lieu en l’an V sous les murs de Kadesch. Séparé du gros de son armée et surpris par les Héthéens, Ramsès II court un moment les plus grands dangers, mais grâce à sa valeur personnelle il tient tête à l’ennemi et, ses légions survenant, le jette dans l’Oronte. Voir Cédés 2, t. ii, fig. 114, col. 367. Cf. Maspero, loc. cit., p. 395-398 ; Breasted, loc. cit., p. 135-142. Le bulletin officiel de la bataille et les tableaux de ses phases diverses, au Ramesseum, premier et second pylône, à Louxor, à Ibsamboul, souvent reproduits, l’ont été de nouveau par Breasted, The baille of Kadesh, Chicago, 1903. Cf. Ancient records of Egypt, loc. cit., p. 142-157. De ce choc les deux partis restent épuisés et il s’ensuit une trêve tacite, laissant les choses au même point qu’avant la guerre. Peu après, et sans doute à l’instigation des Héthéens, la Palestine est en pleine révolte. Ramsès assiège et prend Ascalon. Voir Ascaxon, t. i, fig. 286, col. 1061. Cf. Champollion, Notices descriptives, t. ii, p. 195 ; Lepsius, Denkmâler, iii, pi. 145 c. En l’an VI11, il enlève Dapour près du Thabor et vingttrois autres villes de la Galilée. Lepsius, Denkmâler, t. iii, pi. 156 ; Mariette, Voyage dans la Haute-Egypte, 1893, t. ii, pi. 59 et p, 221. Cf. W. M. Mùller, Asien und Europa nach altâgyptischen Denkmâlern, 1893, p. 220-222 ; Maspero, loc. cit., p. 400, n. 1. C’est peutêtre à cette occasion qu’il rétablit l’influence égyptienne au delà du Jourdain, dans le Hauran, influence attestée par un monument connu sous le nom de Pierre de Job. Cette œuvre d’un représentant du pharaon se trouve au village moderne de Sahadîéh, à l’est du lac de Génésareth. Schumacher, Der Hiobstein, Sachrat Eijub, im Hauran, dans Zeitschrift des Deutschen PalâstinaVereins, t. XIV, 1891, p. 142 ; Erman, Der Hiobstein, ib., t. XV, 1892, p. 210-211. La guerre reprit ensuite de plus belle contre les Héthéens. Il y eut là, semble-t-il, cinq années de lutte. Tounip, aux environs d’Alep, est prise, Fragment du Ramesseum, dans Champollion, Notices descriptives, t. i, p. 888, la Mésopotamie envahie avec toute le vallée de l’Oronte, et Babylone, Assur et Cypre envoient des présents au pharaon. Mariette, Karnak, pi, 38 ; Abydos, t. II. pi. 2 et p. 13. Cf. Breasted, Ancient records of Egypt, t. iii, p. 161-162. Sur ces entrefaites, Khétasar avait succédé à son frère Moutalou. De part et d’autre le besoin de la paix se faisait sentir, et peut-être l’Hëthéen éprouvait-il la nécessité de recueillir ses forces contre l’Assyrien menaçant. En l’an XXI, son envoyé apporta au pharaon, dans la ville de Ramessès, écrit sur une tablette d’argent, un traité d’alliance offensive et défensive. Les choses en Asie étaient remises au point où les avait trouvées Ramsès II à son avènement : l’Egypte gardait la possession tranquille de la Palestine et de la Pérée transjordanienne, delà Phénicieméridionale, Tyr et Sidon jusqu’au Nahr el-Kelb, d’où une ligne allant couper la « Cœlésyrie en diagonale, du nord-ouest au sud-ouest, jusqu'à la pointe de l’Hermon, » Maspero, loc. cit., t. ii, p. 278, marquait probablement la frontière entre les alliés. Voir Maspero, loc. cit., p. 401-404 ; W. M. Mûller, Der Bùndnissvertrag Ramsès Il und des Chetiterkônigs, 1902 ; Breasted, loc. cit., p. 163-174. Les quarante-six dernières années de Ramsès II se passèrent dans une-çaîx profonde.

II. Ses constructions et ses travaiix"d’utilité publique. — La guerre asiatique, loin d’interrompre les grandes coustructions, leur fournit des milliers de bras dans la personne des captifs. Ramsès II avait poursuivi l’achèvement des travaux commencés par son père à Karnak, à Qournah et dans Abydos en s’y réservant une place considérable ; partout ses propres monuments sortaient de terre ; il les multiplia encore pendant la paix, s’appropriant dans une large mesure colosses, obélisques, tout ce qui dans l'œuvre de ses prédécesseurs était à sa convenance. Les temples an-