Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/476

Cette page n’a pas encore été corrigée
933
934
RAGUËL — RAHAB


Moïse sa fille Séphora. Exod., ii, 21. Il eut pour fils Hobab, d’après Num., x, 29. Voir Hobab, t. iii, col. 725. Dans l’Exode, ii, 18, il est nommé comme le père des sept filles qni gardaient les troupeaux dans le désert du Sinaï et dont Moïse prit là défense contre les bergers qui les empêchaient d’abreuver leurs brebis. L’une de ces sept filles était Séphora qui devint la femme de Moïse. Or, Exod., iii, 1 ; iv, 18, le nom du beau-père de Moïse est Jethro et non Raguël. Cf. Exod., xviii, 1, 5, 12. Raguël et Jethro doivent donc être la même personne, quoique nous ignorions pourquoi elle est désignée sous deux noms diûérents et que les diverses hypothèses émises à ce sujet offrent toutes des difficultés. Voir Jethro, t. iii, col. 1521.

2. RAGUEL ('PayooîïX, nom identique à l’hébreu He'û'el), pieux Israélite de la tribu de Nephthali, Tob., vi, 11 ; cf. i, 1 ; vii, 3-4, qui joue un rôle important dans le livre de Tobié. Sa femme se nommait Anne ou Edna. Voit" Anne 3, t. i, col. 629. Il avait pour fille unique Sara, si cruellement éprouvée par le démon. Voir Sara 2. Il était apparenté à ïobie l’ancien, Tob., vi, 11, qu’il désigne tour à tour comme son cousin (Septante, àvc^iô ;  ; Vulgate, consobrinus), Tob., vu, 2, et comme son frère dans le sens large, Tob., vu, 4 (deux fois son frère, d’après le Cod. Sinaitic). Il était domicilié non pas à Rages, comme le dit inexactement la Vulgate, Tob., iii, 7, par suite d’une erreur des copistes, mais à Ecbatane. Voir Rages, col. 930. II offrit l’hospitalité au jeune Tobie et à l’ange Raphaël, son compagnon, lorsqu’ils se présentèrent chez lui, au cours de leur long voyage. Tob., vii, 1-9. Le jeune homme ne l’accepta qu'à la condition que son cousin lui accorderait la main de sa fille. Raguël donna son consentement, mais avec une très vive angoisse, car il craignait que Tobie n'éprouvât le sort des sept premiers maris de Sara. Malgré les encouragements de Raphaël, il était si peu rassuré, que le lendemain des noces, dès l’aurore, il fit creuser une fosse par ses serviteurs pour enterrer secrètement son gendre. C’est avec, une grande reconnaissance envers Dieu qu’il apprit que ses craintes n'étaient pas fondées. Tob., vir, 10-vin, 20. II donna la moitié de sa.fortune aux jeunes époux, et les retint auprès de lui tandis que l’ange Raphaël allait à Rages, pour recouvrer l’argent prêté à Gabélus par Tobie l’ancien, Tob., viii, 21-ix, 6. Raguël aurait ensuite voulu garder perpétuellement son gendre et sa fille à Ecbatane ; mais il ne put refuser de les laisser partir, lorsque le jeune Tobie lui eut décrit, en termes pathétiques, l’anxiété de ses propres parents à son sujet. Tob., x, 8-13. Après leur départ, il n’est plus question de lui. L. FilliON.

    1. RAHAB##

RAHAB, nom, dans la Vulgate, d’une femme de Jéricho et surnom de l’Egypte, mais dans le texte hébreu l’orthographe des deux mots est différente, 2m et : iii, Rdhâb et Rahab.

1 T

1. RAHAB (hébreu : Râhâb ; Septante : 'Paie, de même Heb., xi, SI, et.Tac, ii, 25 ; 'PaxàëdansMatth., ! , 5, où la lettre ii, le cheth hébreu, a été conservée), femme dé Jéricho, qui reçut chez elle et sauva les deux espions israélites envoyés dans cette ville par Josué, qui voulait connaître sa situation stratégique avant de l’attaquer. Jos., H, 1-21. Les deux étrangers furent bientôt reconnus et dénoncés au roi, qui fit porter à Rahab l’ordre de les lui livrer. Elle les cacha au contraire sous des tiges de lin, qu’elle faisait alors sécher sur le toit plat de sa maison, et fit croire à ceux qui les cherchaient qu’ils avaient quitté la ville depuis peu d’instants. Après le départ des messagers royaux, elle rejoignit ses hôtes, leur annonça ce qui venait de se passer et leur communiqua un plan de fuite très habile. Elle leur fournit

aussi des informations importantes sur la situation in térieure de Jéricho, dont les habitants étaient livrés au découragement et à l’effroi, depuis qu’ils avaient eu connaissance des prodiges éclatants qui avaient accompagné la marche triomphale des Hébreux après leur sortie d’Egypte. Ne doutant pas que ceux-ci ne s’emparassent bientôt de la ville, elle demanda aux deux explorateurs la vie sauve pour elle-même et ses proches parents, lorsque leur peuple se serait rendu maître de Jéricho. Ils firent cette promesse sans hésiter, et il fut convenu que son père, sa mère, ses frères et ses sœurs se réuniraient dans sa maison au moment de l’approche des Israélites, et qu’elle suspendrait une corde écarlate à sa fenêtre, du côté de la campagne, pour la rendre très visible aux assaillants. Elle aida ensuite les espions à s'échapper le long du rempart, sur lequel sa demeure était bâtie, et ils purent rejoindre leur camp sans obstacle. Josué ne manqua pas de tenir la promesse faite par ses envoyés. Jos., vi, 22-25. Le narrateur termine son récit en disant que Rahab et ses proches « habitèrent dans Israël jusqu’au jour présent. » Sur tout ce passage, voir F. Keil, Josue, 2= édit., 1874, p. 19-24, 50-52.

Dès la première mention que le récit sacré fait de Rahab, il ajoute à son nom l'épithète de zôndh (Septante, itôpvy], Vulgate, meretrix), qui marque sa triste condition morale à l'époque de l’incident qui l’a rendue célèbre. D’assez bonne heure, quelques écrivains juifs essayèrent de réhabiliter sous ce rapport celle qu’ils regardaient justement comme la bienfaitrice de leurs ancêtres. Ils firent donc de Rahab, non pas une femme de mauvaise vie, mais une hôtelière, chez laquelle les deux espions israélites seraient tout naturellement descendus. Voir Josèphe, Ant. jud., V, î, 2.et 7, et les commentaires de Kimchi et de Jarchi sur Jos., [n, 1. Néanmoins, la littérature rabbinique reconnaît que Rabah n’avait été d’abord qu’une vulgaire meretrix, et c’est en ce sens que le Targum lui donne, In Jos., ii, 1, le nom de pandekîtd', transcription araméenne du grec pandokissa, « celle qui reçoit tout le inonde », mais ici en mauvaise part. Divers commentateurs chrétiens, mus par un scrupule analogue à celui des anciens interprètes juifs dont il a été question en premier lieu, ont adopté leur sentiment, et ils n’ont pas voulu, eux non plus, voir autre chose en Rahab qu’une hôtelière ordinaire. Pour cela, allant encore plus loin, ils ont fait violence aux mots zôndh etitôpvr ; , dont ils ont faussé l'étyuiologie, pour les ramener à la signification requise ; ou bien, ils ont donné à ces substantifs, pour la circonstance, le sens adouci de païenne, d'étrangère à Israël ou de femme illégitime. Voir Schleusner, Lexicon in Septuaginta, 1820, au mot Tt<5pvY), t. iv, p. 429 ; J. G. Abicht, Dissertatio de Rahab meretrice, in-4°, Leipzig, 1714. Mais il n’y avait pas d’hôtelleries proprement dites dans ces temps reculés, et, lorsqu’on en trouvait l'équivalent lointain, elles n'étaient jamais tenues par des femmes ; d’autre part, le mot hébreu zônâh ne peut pas être traduit autrement que par meretrix dans le sens strict. Aussi est-ce bien de la sorte qu’il est-pris dans toutes les traductions primitives de l’Ancien Testament, comme aussi Heb., xi, 31, et Jac, ii, 25, pour désigner la première partie de la vie de Rahab. Du reste, on a cessé depuis longtemps, à très juste titre, de recourir à de tels palliatifs, qui étaient inconnus aux anciens commentateurs chrétiens. On conçoit fort bien que les espions de Josué soient entrés de préférence chez une femme de ce genre, pour mieux dissimuler le but de leur séjour dans Jéricho et pour écarter les soupçons.

Autrefois, on aimait a discuter également, par rapport à la conduite de Rahab, sur le fait de son mensonge aux envoyés du roi de Jéricho, Jos., ir, 4-5, et sur celui de sa trahison à l'égard de son peuple. Us s’expliquent