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PSAUMES DE SALOMON


Au moyen âge, il n’est plus question des Psaumes de Salomon, et ils avaient depuis longtemps disparu, lorsqu’ils furent publiés à Lyon, en 1626, d’après un manuscrit de la bibliothèque de Vienne (Autriche), par le jésuile J.-L. de la Cerda, comme appendice à son ouvrage intitulé Adversaria sacra, in-4°. Voir 0. von Gebhardt, dans Texle und Vntersuchungen, t. xiii, fasc. 2, p. d-8.’Il ne faut pas confondre ces psaumes avec les cinq « odes de Salomon » que l’auteur de l’écrit gnostique Pistis Sophia a incorporées à son livre ; elles en diffèrent essentiellement. Voir Migne, Dictionnaire des Apocryphes, t. i, col. 955-958 ; Mûnter, Odse gnosticss Salomoni tributse, Havnise, 1812 ; A. Harnack, Texte und Vntersuchungen, t. vii, fasc. 2, 1891, p. 35-49 ; Ryle et James, Psalms of the Pharisees, p. xxm-xxvii, 155-161. Pendant très longtemps, on se contenta de l’édition princeps, fort imparfaite, publiée par le P. de la Cerda, Celle de J. A. Eabricius, imprimée en 1713 dans le Codex pseudepigraphus Veteris Testamenli, in-8°, 1. 1, p. 914-999, n’en est guère que la reproduction tant soit peu modifiée. La première édition scientifique fut celle de A. Hilgenfeld, dans la Zeitschrift fur wissenschaftliche Théologie, 1868, p. 134-168, et dans le Messias Judseorum, in-8°, Leipzig, 1869, p. 1-38 ; mais elle n’avait pareillement pour base que le manuscrit de Vienne, corrigé d’après des conjectures plus ou moins heureuses. Il en estde même des deux suivantes, préparéesl’uneparun savant catholique, Ephrem Geiger, Der Psaiter Salomo’s herausgegeben und erkldrt, in-8°, Augsbourg, 1871, l’autre parle D’Fritzsche, Libriapocryphi Veteris Testamenti greece, in-8°, Leipzig, 1871, p. 569589. Une sixième édition, par M. B. Pick, fut insérée dans la Presbyterian Review, 1883, p. 775-812. Celle de MM. H. E. Ryle et M. R. James, iPaXiioi 20).ojiwvTo : , Psalms of the Pharisees, conimonly called the Psalms of Solomon, in-8°, Cambridge, 1891, réalise de sérieux progrès, car ces savants purent collationner des manuscrits nouvellement découverts. Vint ensuite celle du D r H. B. Swete, dans l’ouvrage Old Testament in Greek according to the Septuagint, in-12, t. iii, Cambridge, 1894 ; 2e édit., 1899, p. 765-787. La plus récente et la meilleure de toutes est celle d’O. von Gehbardt, qui a pu consulter des manuscrits plus nombreux encore, découverts au mont Athos et ailleurs ; elle a paru dans les Texle und Vntersuchungen zxtr Geschichte der altchristlichen Lileralur, t. xiii, fasc. 2, in-8°, Leipzig, 1895, sous ce titre : Die Psalmen Salomo’s zum ersten Maie mit der Benulzung der Athoshandschriftenund des Codex, Casanatensis herausgegeben.

2° Forme extérieure. — La forme de ces poèmes est celle des Psaumes canoniques qu’ils imitent très ostensiblement sous le rapport des pensées, du style, de la marche générale, du genre poétique. Ils font defréquents emprunts à l’Ancien Testament, dont on entend sans cesse l’écho en les lisant. Ils sont très simples pour la plupart et dépourvus d’originalité, d’élévation poétique, bien qu’ils renferment quelques beaux passages. Voir en particulier les psaumes ii, iv, viii, xi, xvii et xviii. Chacun d’eux a son unité, son plan bien déterminé. Le parallélisme des membres, ce trait essentiel de la poésie hébraïque, y apparaît avec toutes ses nuances’; mais il manque habituellement d’art et de distinction. — À part le 1 er, les Psaumes de Salomon sont munis, comme ^eux du Psautier canonique, d’une petite inscription, qui en désigne l’auteur prétendu, tû 20Xm[i’Àv ; le sujet, « sur Jérusalem, contre la langue de ceux qui sont opposés à la loi, » etc. ; la nature, « psaume », « parmi les hymnes », « dithyrambe ». On trouve aussi, xvii, 31, et xviii, 10, l’expression 8c<n|jaXu.a, qui, dans les Septante, représente l’hébreu sélah et qui parait supposer un emploi liturgique des Psaumes qu’elle accompagne.

II. Sujet. — Le sujet traité par ces poèmes a aussi une grande analogie, dans son ensemble, avec celui des psaumes et des cantiques de l’Ancien Testament. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire le sommaire de quelques-uns d’entre eux : I, Les péchés et le châtiment de Jérusalem ; iir, Contraste entre les justes et les pécheurs ; iv, Description et dénonciation de ceux qui cherchent à plaire aux hommes ; x, Les avantages de l’affliction ; xi, La future restauration d’Israël. Mais il a beaucoup moins d’ampleur, puisque les psaumes de Salomon sont si peu nombreux et qu’ils furent composés, on le dira bientôt, en vue d’une situation très particulière. Ils reviennent souvent sur les humiliations infligées au peuple juif, d’abord par un parti national puissant, anti-théocratique, puis par un envahisseur étranger qui a profané la capitale et le temple, et ils présentent ces humiliations, ces souffrances, comme autant de châtiments que les Juifs avaient mérités par leurs fautes. Sous ce rapport, ce petit psautier rappelle les psaumes canoniques de l’époque chaldéenne, qui décrivent les peines analogues endurées par Israël. À ce thème douloureux est rattaché l’éloge perpétuel de la justice divine, et aussi l’ardent désir de voir luire des jours meilleurs, et surtout de voir apparaître bientôt le libérateur promis, le Messie. Voir Wittichen, Die Idée des Reich’es Gottes, in-8°, 1872, p. 155-160.

Le portrait que les psaumes xvii et xviii tracent du rédempteur si impatiemment attendu a pour type les oracles messianiques de l’Ancien Testament. Il est remarquable en maint endroit, et dépasse tout ce que la littérature apocryphe contient en ce sens. Cf. A. Bousr set, Die jiïdische Apokalyptik, in-8°, Berlin, 1903, p. 12-13 ; H. Mon nier, La Mission historique de Jésus, in-8°, Paris, 1906, p. 20-21. Le Christ, le Xpitn :  ! > ; Kûptoç, comme il est nommé à deux reprises, xvii, 36, et xviii, 8, cf. Luc, ii, 11, appartiendra à la race de David ; il exercera lui-même la royauté, non-seulernent sur les Juifs, mais aussi sur les païens, qu’il soumettra à son sceptre très puissant. Il viendra à l’époque fixée par Dieu, xvii, 23, à la suite de grandes épreuves subies parla nation choisie, qu’il délivrera et purifiera de ses péchés. Il rétablira les douze tribus d’Israël et rendra à Jérusalem sa gloire antique, matériellement et spirituellement, xvii, 26-29. Il régnera par la sainteté et la justice, par la sagesse et par la puissance. Néanmoins, dans ces psaumes comme au livre d’Hénoch, le Messie ne semble pas être autre chose qu’un délégué de Dieu, bien qu’il porte lui-même le titre de « Seigneur », Il y a donc une différence étonnante entre ce Christ et celui des Évangiles, qui, d’ailleurs, sauve les hommes avant tout par ses souffrances et par sa mort. — Relativement à Dieu, nos psaumes enseignent, le plus pur monothéisme. Par rapport à la vie future, leur doctrine ne s’écarte pas non plus de l’Ancien Testament : les justes seront à jamais récompensés ; les méchants subiront une damnation sans fin.

Il existe une ressemblance frappante, assez souvent littérale, entre le Ps. xi de Salomon et le chap. v de la prophétie de Baruch. Plusieurs critiques protestants, entre autres MM. Ryle et James, The Psaiter of thé Pharisees, p. lxxu-lxxvii, et le D r Schûrer, Gesch. des jùdisch. Volkes, 3 a édit., t. iii, p. 154, en ont conclu que celui qu’ils nomment le pseudo-Baruch aurait connu et utilisé notre recueil. C’est le contraire qui aurait plutôt eu lieu, puisque le livre de Baruch est authentique et contemporain des oracles de Jérémie. Voir Baruch, t. i, col. 1475 ; E. Geiger, Der Psaiter Salomo’s, p. 137. D’ailleurs, la ressemblance en question est de telle nature, qu’elle peut s’expliquer fort bien aussi par une source commune, c’est-à-dire quelque prière liturgique déjà en usage à l’époque de Baruch.

III. Date de la. composition. — Elle était, il y a cin-