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PROSTERNEMENT — PROSTITUTION


son tour, se prosterne devant son père. Gen., xlviii, 12. Achior se prosterne devant Judith, xiii, 30. Plus tard, le centurion Corneille se prosterne devant saint Pierre, Act., x, 25, et le geôlier de Philippes devant Paul et Silas. Act., xvi, 29. — 6° Devant celui qu’on sollicite. Il faut se prosterner devant celui pour lequel on a répondu, afin d'être délivré delà caution. Prov., vi, 3. On se prosterne devant le créancier pour obtenir remise de la dette. Matth., xviii, 26, 29. Abraham se prosterne devant le peuple d’Hébron afin d’obtenir qu’on lui vende la caverne de Macpelah. Gen., xxiii, 7. — Devant JésusChrist. Les Mages se prosternent pour l’adorer. Matth., u, 11. Saint Jean-Baptiste se reconnaît indigne de se prosterner devant lui pour détacher les cordons de ses sandales. Marc, i, 7. Devant lui se prosternent ceux qui demandent une faveur, le chef de la synagogue, Marc, v, 22 ; l’hémorrhoïsse, Marc., v, 33 ; Luc, viii, 47 ; la Chananéenne, Marc, vii, 25 ; le père du possédé, Matth., xvii, 14 ; le lépreux, Luc, v, 12 ; le démoniaque, Luc, viii, 28, et ceux qui veulent adorer et témoigner leur reconnaissance, Pierre, après la pêche miraculeuse, Luc, v, 8, et l’aveugle-né après sa guérison.

Joa., ix, 38.

H. Lesêtre.
    1. PROSTITUTION##

PROSTITUTION (hébreu : zenût, zenûnîm, laznût ; Septante : itopvsia ; Vulgate : fornicatio, prostitutio), genre dévie dans lequel on s’abandonne et on provoque à l’impudicité.

I. En Egypte et en Chanaan. — 1° Le climat égyptien et le caractère sensuel du culte rendu à une multitude de dieux et de déesses ne pouvaient que favoriser l’immoralité sur les bords du Nil. La Bible cite les exemples du pharaon contemporain d’Abraham, Gen., xii, 15, 16, et de la femme de Putiphar, Gen., xxxix, 7-12, dont la honteuse entreprise se trouve reproduite dans le conte des deux frères. Cf. Maspero, Les Contes populaires de l’Egypte ancienne, Paris, 3e édit-, p. 6. On sait quelles coutumes incestueuses présidaient aux mariages égyptiens. Voir Inceste, t. iii, col. 865. Hérodote, ii, 48, 60, 64, parle de l’immoralité qui régnait en Egypte ; mais il déclare que la prostitution ne s’y pratiquait pas dans les lieux sacrés, comme cela se faisait dans la plupart des autres pays. Cependant, dans les temples des dieux mâles, un véritable harem de femmes fournissait à la divinité des épouses, des concubines, des servantes, des musiciennes et des danseuses. Dans les temples des déesses, les femmes occupaient les premiers postes. Cf. Erman, Aegyplen und âgyptisches Leben, Tubingue, 1887, p. 399-401.

2° Chez les Chananéens, le culte d’Astarthé comportait partout la prostitution. Voir Astarthé, t. i, col. 1187. Non seulement des femmes, mais aussi des hommes exerçaient ce commerce infâme. Cf. Eusèbe, Vit. Constant., iii, 55, t. xx, col. 1120. Ce sont ces derniers que le Deutéronome, xxiii, 18, désigne sous le nom de kelâbîm, s chiens ». Les pires impudicités se commettaient en l’honneur de la déesse, à Byblos, à Aphéca, dans le Lihan, voir t. i, col. 734, et dans toute la Syrie, d’où son culte se propagea ensuite dans le monde grec Cf. Lucien, De dea Syra ; Dœllinger, Paganisme et judaïsme, trad. J. de P., Bruxelles, 1858, t. ii, p. 241244 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iii, p. 84-92. On trouve dans la Genèse les traces de l’influence exercée sur les mœurs des habitants par les exemples qui venaient des temples chananéens. À Sodome, ce sont tous les hommes de la ville, des enfants aux vieillards, qui se livrent au vice infâme et attirent sur eux la vengeance divine. Gen., xix, 4-9 ; II Pet., ii, 7. L’odieux inceste des deux filles de Lot avec leur père indique jusqu'à quel point le sens moral était oblitéré, même chez des femmes appartenant à la famille d’Abraham. Gen., xix, 30-38. Un peu plus tard, on voit Thamar, belle-fille de Juda, jouer le rôle de prostituée

auprès de son beau-père. Elle s’assied au bord du chemin et se voile le visage. À ce signe, Juda la prend pour ce qu’elle n’est pas, fait marché avec elle et convient de lui payer un chevreau. Celle-ci demande des gages qui lui sont accordés, et c’est à ces marques que Juda reconnaît ensuite celle à qui il s’est si facilement abandonné. L’acte qu’il s’est permis ne semble pas lui causer beaucoup de honte, car il en parle à un ami qu’il charge de porter le chevreau convenu. Il n’en songe pas moins à faire brûler Thamar, quand on lui dit que celle-ci s’est livrée à la prostitution. Gen., xxxviiꝟ. 14-25. La peine portée contre Thamar ne visait pourtant pas la prostitution elle-même, mais la prévarication que Juda, en tant que chef de famille, avait à reprocher à la femme veuve d’un de ses fils et promise à un autre. La courtisane Rahab avait sa maison à Jéricho. Jos., ii, 1. Samson alla chez une autre courtisane dans la ville philistine de Gaza. Jud., xvi, 1.

II. La législation mosaïque. — 1° Moïse devait prémunir les Hébreux contre les dangers qu’ils courraient dans la terre de Chanaan, au point de vue des mœurs. Aussi commence-t-il en ces termes les articles de sa législation du mariage : « Vous ne ferez pas ce qui se fait dans le pays d’Egypte où vous avez habité, et vbus ne ferez pas ce qui se fait dans le pays de Chanaan où je vous conduis. >> Lev., xviii, 3. Puis il défend le mariage entre frère et sœur, usité en Egypte, Lev., xviii, 9, les unions incestueuses et les actes contre nature que se permettaient les Chananéens, et parfois aussi les Égyptiens. Lev., xviii, 22, 23 ; xx, 16 ; cf. Hérodote, ii, 46. Ces abominations ont souillé le pays, ont rendu ses habitants dignes d'être chassés, et attireraient sur l’Israélite la peine du retranchement. Lev., xviii, 24-30 ; xx, 23. Il dit ensuite formellement : « Ne profane pas ta fille en la prostituant, de peur que le pays ne se livre à la prostitution et ne se remplisse de crimes. » Lev., xix, 29. Aucune pénalité n’est pourtant assignée contre les coupables. Quand il s’agit de la fille d’un prêtre, il en est autrement ; à cause du déshonneur qui rejaillit 9ur son père, la coupable est livrée au feu. Lev, , xxi, 9. La défense de la prostitution est répétée avec plus d’insistance et de détail dans le Deutéronome, xxiii, 17, 18 : « Il n’y aura pas de prostituée (qedèsâh, nôpvr„ meretrix) parmi les filles d’Israël, et il n’y aura pas de prostitué (qâdês, iropve’jwv, scortator) parmi les fils d’Israël. Tu n’apporteras pas dans la maison de Jéhovah, ton Dieu, le salaire d’une prostituée (zônâh, îripvrj, prostibulum), ni le salaire d’un chien (héléb, xûwv, canis) pour l’accomplissement d’un vœu ; car l’un et l’autre sont en abomination à Jéhovah, ton Dieu. » Les prostitués sont désignés par les mots qâdês, qedèsâh, « consacré, saint », qui étaient probablement en usage dans la langue d’un pays où la prostitution passaitpour une fonction sacrée. Les Grecs donnaient aux mêmes individus le nom de ÎEpiEouXot, « serviteurs sacrés », hiérodules. Le mot kélêb, « chien », désigne ici le qâdês. Dans l’Apocalypse, xxii, 15, les chiens sont également des impudiques. Parmi les fonctionnaires des temples phéniciens, l’inscription de Larnaca signale des kalabu, qui sont vraisemblablement les prostitués, scorta virilia, comme ont traduit les éditeurs du Corp. inscr. semit., t. i, p. 92-99. Cf. Lagrange, Etudes sur les religions sémitiques, Psivis, 190ô, p. 220. Le chevreau promis par Juda à Thamar, Gen., xxxviii, 17, était un de ces salaires de la prostitution qu’il n’eût pas été permis d’offrir en sacrifice.

2° Non contente d’interdire directement la prostitution, la loi la poursuivait encore dans ses moyens et dans ses effets. Il était défendu à l’homme et à la femme de prendre les habits l’un de l’autre. Deut., xxii, 5. Ce changement de costume favorisait les pires désordres ; souvent, dans les temples idolâtriques, les hommes et surtout les prostitués s’affublaient de costumes ferai-