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PROPRIÉTÉ


lut et à tous ses descendants : kibsuhd, xaTaxvpie-jrxaxs <vjt7|ç, subjicite eam, « soyez-en les maîtres. » Gen., i, 28. L’homme était ainsi constitué le propriétaire de la terre, c’est-à-dire de tout ce qu’il pouvait en atteindre par l’exercice de son activité. Les animaux furent également mis à sa disposition. Gen., i, 28 ; ix, 2, 3. Celte propriété devait-elle rester indivise ou se partager ? Dieu ne l’indiqua point. Il laissa à l’homme la liberté de disposer de sa propriété comme il le jugerait bon. De fait, ceux d’entre les hommes qui menèrent la vie nomade exercèrent leur droit de propriété sur le sol en l’occupant transitai rement et en exploitant ses produits spontanés pour leur usage et celui de leurs troupeaux. Mais déjà les pasteurs nomades possédaient une propriété personnelle, celle de leur troupeau. Abel offrait à Dieu les premiers-nés de « son troupeau », c’est-à-dire les prémices d’un bien qui était à lai. Gen., iv, 4. D’autres s'établirent à demeure fixe sur une partie du sol. Un fils de Caïn, Hénoch, bâtit une ville. Gen., iv, 17. Le terrain occupé et les demeures élevées sur son emplacement devenaient, de droit naturel, la propriété des bâtisseurs. De plus, pour subsister, il leur fallait aussi posséder des terres environnantes, soit pour les cultiver, Gen., IV, 12, soit pour y élever des troupeaux. La propriété se trouva ainsi constituée naturellement sous diverses formes, engendrées par des manifestations différentes de l’activité humaine.

2° En arrivant dans le pays de Chanaan, Abraham amenait avec lui les biens qu’il possédait. Ces biens consistaient surtout en troupeaux. Les Chananéens et les Phérézéens étaient alors établis dans le pays. Gen., xili, 7, Abraham et Lot n’en faisaient pas moins paître leurs troupeaux ici et là sans être inquiétés. Ayant constaté qu’ils ne pouvaient rester ensemble, Lot s’en alla dans la plaine du Jourdain tandis qu’Abraham demeurait en Chanaan. Il existait donc alors des espaces considérables, sur lesquels les habitants du pays ne songeaient à revendiquer aucun droit de prepriété, ou dont, tout au moins, ils laissaient le libre usage aux nomades. Dieu toutefois se réservait le droit de disposer de la propriété du sol, puisqu’il dit à Abraham : « Tout le pays que tu vois, je le donnerai â toi et à tes descendants pour toujours. » Gen., xiii, 15. Sur ce sol occupé d’une manière générale par des peuples sédentaires, il y avait des propriétés particulières. À Hébron, Éphron, fils de Séor, possédait un champ, et, au bout de ce champ, la caverne de Macpélah. Abraham désirait cette caverne pour y inhumer Sara et en faire un lieu de sépulture à lui. Il fit marché avec Éphron et, pour quatre cents sicles d’argent, il acquit en toute propriété le champ et la caverne, avec les arbres qui se trouvaient dans le champ et tout autour. Gen., xxiii, 16-18. Dans les pays inoccupés, les nomades creusaient des puits pour les besoins de leurs troupeaux, et, bien que disputés par les populations sédentaires du voisinage, ces puits demeuraient leur propriété. Gen., xxvi, 15, 18-22, 32. À Gérare, en pays philistin, lsaac put même faire des semailles et récolter abondamment. Gen., xxvi, 12. Les fils de Jacob allaient paître leurs troupeaux jusqu'à Sichem et Dothaïn, pendant que leur père résidait à Hébron, où Abraham avait acquis une propriété. Gen., xxxvii, 1, 14, 17. En somme, au point de vue de la constitution de la propriété, le pays de Chanaan apparaît déjà à peu près tel que les Hébreux le trouveront au moment de la conquête. La population forme des agglomérations qui possèdent les villes et les bourgs épars à travers le pays. Les membres de ces agglomérations comptent parmi eux des hommes qui sont propriétaires de champs situés dans les alentours. Puis, entre ces agglomérations, qui ont le haut domaine sur les habitations et la campagne environnante, s'étendent des espaces plus ou moins vastes, stériles ou inoccupés, sur lesquels les nomades. peuvent s'éta blir transitoirement, mais toujours à leurs risques et périls, comme le montre l’histoire de Lot, Gen., xiv, 12-16, et celle d’Isaac. Gen., xxvi, 16, 17, 20.

II. Chez les Babyloniens. — 1° Le roi possédait de vastes domaines, à la tête desquels il plaçait des administrateurs. On trouve mentionnés les ministres du blé, les chefs des vignes, les chefs des troupeaux de bœufs, etc. Cf. Rawlinson, Cun. Inscr. W. As., t. ii, pi. 31, col. ii, 2 ; iii, 22 ; vi, 4. Aux temples des dieux étaient attribués des territoires, des troupeaux, des biens de toute nature, qui allaient sans cesse en s’accumulant et que se chargeaient d’amoindrir de temps à autre des voisins pillards ou des rois à court de ressources. En principe, la terre était le domaine imprescriptible des dieux ; il convenait donc que les détenteurs particuliers tinssent' compte de ce droit. Cf. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 676-678. Le roi accordait à ses officiers. des apanages comprenant maison, champ et jardin. Ces domaines restaient inaliénables et la vente en était frappée de nullité. Le concessionnaire ne pouvait les transmettre â sa femme ni à sa fille, qui n’avaient droit qu’aux biens propres de l'époux et du père. Celui-ci devait pourtant pouvoir transmettre à son fils les biens reçus du roi, à moins qu’ils ne fissent relour au donateur, ce sur quoi les textes ne s’expliquent pas. Cf. Seheil, Textes élamites-sémitiques, Code de Rammurabi, art. 35-41, p. 137. Les articles suivants, 42-65, p. 138-140, se rapportent à la gestion des propriétés particulières. Les contrats chaldéens démontrent que, dans la classe moyenne, chaque famille avait sa propriété qu’elle s’efforçait de conserver. La maison était léguée à la veuve ou au fils aine, à moins qu’elle restât indivise. Les terres, fermes, jardins et autres biens se partageaient entre les frères ou les descendants naturels. Au temple, à la porte du dieu, un arbitre présidait à la répartition, et quand celle-ci était acceptée, il n’y avait plus à y revenir. Ces partages amoindrissaient graduellement les fortunes ; au bout de quelques générations, l’avoir des héritiers devenait trop médiocre pour les faire vivre, et ceux-ci servaient de proie à des usuriers, s’ils ne parvenaient à relever leur situation. Cf. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 748-749. Les terres étaient limitées par des bornes. Voir Borne, t. i, col. 1854.

2° En Mésopotamie, Bathuel, père de Hébecca, était riche et possédait de grands troupeaux. Gen., xxiv, 25, 32. Laban, frère de Rébecca, élevait au même endroit de nombreux troupeaux, dont Jacob prit la garde pendant vingt ans. Gen., xxxi, 38. Mais Laban ne vivait pas en nomade ; il avait une maison, Gen., xxxix, 13, probablement avec des terres alentour, ce qui n’empêchait pas de conduire les troupeaux jusqu'à trois jours de marche, Gen., xxx, 36, dans des endroits dont l’usage restait libre à tous.

3° Quelques siècles plus tard, les Israélites furent transportés dans ce même pays. Pendant que leurs terres de Palestine étaient attribuées à des colons étrangers, eux-mêmes occupèrent celles qu’on leur assigna en pays chaldéen. II fieg., xvii, 6, -24. La propriété ne leur fut ni interdite, ni inaccessible. Voir Captivité, t. ii, col. 234, 235, 239. Aussi Jérémie, xxix, 4, pouvait-il dire aux exilés : « Bâtissez des maisons et habitez-les, plantez des jardins et mangez-en les fruits. »

III. Chez les Égyptiens. — 1° En Egypte, comme en Babylonie, une grande partie du territoire était la propriété des temples. Diodore de Sicile, i, 21, 73, dit que le tiers du pays appartenait aux prêtres. Son affirmation a été reconnue conforme â la réalité. Le roi et les seigneurs se chargeaient d’arrêter l’extension de ces biens en mettant la main de temps en temps sur les revenus des dieux. Il était de principe que, mise à part la propriété des dieux, le sol entier appartenait