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PRÉTOIRE


teur s’appuie principalement sur l’histoire, rappelant l’exemple de Sabinus, gouverneur de Syrie, qui, pendant un séjour à Jérusalem, occupa le palais d’Hérode, et celui de Gessius Florus, dont nous avons parlé plus haut. Cf. Josèphe, Bell.jud., II, ii, 2 ; Ant. jud., XVII, ix, 3 ; Bell, jud., II, xiv, 8. Il cherche une confirmation de sa thèse dans le fait suivant, rapporté par l’historien juif, Bell, jud.f II, ix, 4 ; Ant. jud., XVIII, iii, 2. Pilate, ayant employé l’argent du trésor sacré à la construction d’un aqueduc, souleva contre lui le peuple, qui, profitant de la venue du procurateur dans la ville sainte, assiégea son tribunal, t’o j3f ; | « .a, en poussant de grands cris. Prévoyant le tumulte, le gouverneur avait eu soin de mêler à la foule des soldats armés, mais vêtus à la manière du peuple, et leur avait enjoint de frapper les séditieux non avec le glaive, mais avec des bâtons. Sur un ordre qu’il donna du haut de son tribunal, la consigne fut exécutée, et un grand nombre de Juifs tombèrent sous les coups. Josèphe ne dit pas quel palais habitait Pilate à ce moment-là, mais il paraît clair à notre auteur que l’émeute ne put avoir lieu à PAntonia, où les soldats romains n’eussent pas laissé pénétrer la jnasse populaire ; on ne saurait non plus placer le Pt) [xx du procurateur sur la place du Temple, au-dessous de l’Antonia, d’où l’on descendait par des degrés. Il est vrai que la sédition soulevée à propos de saint Paul, Act., xxi-xxiii, éclata en cet endroit, et que le tribun mit l’Apôtre en sûreté dans la citadelle. Act., xxr, 34, 37 ; xxii, 24 ; xxiii, "10, 16, 32. Mais il n’est pas question ici du procurateur, qui à ce moment était à Césarée, et le théâtre de l’émeute est nettement caractérisé par la mention du Temple, du « camp », raips ; j.60Xï], c’est-à-dire de la partie de la citadelle qui servait de caserne à la garnison romaine, et des degrés, « votêaS(not, par lesquels on y montait. Act., XXI, 35, 40. Dans le récit de Josèphe, au contraire, le soulèvement est dirigé contre le gouverneur. Il va sans dire que le palais d’Hérode avait sa garnison comme l’Antonia, et que le procurateur y avait au moins sa garde du corps. Lors donc que saint Marc, xv, 16, parle de la cohorte convoquée dans la cour du prétoire, pour prodiguer les outrages à Jésus, il ne saurait être question de la garnison de l’Antonia, mais de celle du palais d’Hérode ou d’une partie de celle-ci, la garde du procurateur. Aussi les Synoptiques, dans l’exécution de la sentence capitale, ne mentionnent-ils pas un -/iXi’ap-/oç ou tribun, comme les Actes, xxi-xxm, mais seulement un xïvtupiwv, centurion. Marc, xv, 39. La présence d’une garnison dans le palais royal explique peut-être l’expression de saint Marc, xv, 16, i ttù.r, ô ètrriv irpatTtopiov ; aùXi) seul ne pourrait s’appliquer à l’Antonia, qui était une forteresse. Sans doute celle-ci, avec ses magnificences, pouvait être assimilée à un château royal, mais, par destination, elle était surtout une forteresse, le çpouptov du Temple, comme le Temple était le çpoùpiov de la ville, suivant le mot de Josèphe, Bell, jud., V, v, 8 ; aussi l’historien juif la désigne-t-il régulièrement SOUS les noms de itOpyo ; , Trup-josiÇ^ ; , tppoûpeov, non sous celui de a-JX^. Une ocjXyJ, c’est le palais du grand-prêtre, Marc, , xiv, 54, ou de l’empereur, (jaat-Xtxï ) aûXvj. Eusèbe, H. E., V, XX, 5. Josèphe lui-même, Bell, jud., Y, iv, 4, appelle le palais d’Hérode ^ toO (JaaiXéwç aOXrç. Contre cette théorie on a cherché à faire valoir l’expression à’ie.Tie.itysi, employée par saint Luc, xxm, 7, à propos du renvoi de Jésus devant Hérode. Comme àvaTOinteo signifie « envoyer en haut, faire monter », on en conclut que le palais d’Hérode Antipas était à un niveau plus élevé que la demeure actuelle de Pilate. Or, Antipas, pendant son séjour à Jérusalem, habitait le palais des Asmonéens, situé plus bas du côté de la vallée de Tyropœon. Donc Pilate ne pouvait occuper le palais d’Hérode le Grand. M. Kreyenbùh répond que le verbe àvansiiitEtv n’indique pas seule ment la direction vers un lieu plus élevé, mais’encore vers une personne supérieure en dignité et en puissance. Cf. Act., xxv, 21, et que, Luc, xxiii, 11, 15, il a même le sens de « renvoyer ».

Tels sont les arguments par lesquels on cherche à prouver que le Prétoire devait se trouver sur la colline occidentale. Cette théorie a le grand inconvénient d’être absolument contraire à la tradition. Nous avons vii, en effet, que les témoignages les plus anciens et les plus authentiques, jusqu’à l’époque des croisades, fixent nos regards du côté de la colline orientale, Le silence des premiers siècles jusqu’à l’an 333 n’est pas un obstacle, car, malgré les bouleversements subis par Jérusalem, les chrétiens n’avaient pas perdu de vue les principaux points de la ville sanctifiés par Notre-Seigneur et devenus l’objet de leur vénération, et cette tradition s’était transmise de génération en génération. Nous disons les principaux points, parmi lesquels il faut bien compter le Prétoire de Pilate, sans vouloir approuver pour cela la précision rigoureuse que la tradition a donnée plus tard et donne encore aujourd’hui à certains détails des scènes évangéliques. Si, au moment des croisades, les recherches se sont égarées du côté du mont Sion, cette fausse piste est due à certaines méprises et, " du reste, n’a pas fait oublier la vraie. Quant aux arguments historiques qu’on apporte, ils ne sont pas suffisants pour prouver que tous les procurateurs, et Pilate en particulier, aient habité le palais d’Hérode. Pilate aurait sans doute pu l’occuper, et l’exemple de Gessius Florus rendrait ce séjour vraisemblable, s’il n’y avait plus de vraisemblance encore à ce que, pendant les fêtes de la Pâque, en prévision des troubles, il n’eût choisi l’Antonia pour demeure. Les soldats romains d’ailleurs n’eussent pas plus laissé la foule envahir le palais de Sion que la citadelle, et la place sur laquelle le procurateur établit son tribunal, sans être celle du Temple, pouvait être au-dessous de l’Antonia, du côté de la ville. D’autre part, s’il n’est question que d’un centurion, Marc, xv, 39, il n’est pas nécessaire de ne voir dans la troupe qu’il commandait que la petite garnison du palais occidental, ou la garde de Pilate ; c’était un simple détachement de l’effectif plus nombreux de la citadelle. L’argument tiré de aiXïj est de nature à frapper davantage, mais le mot ne veut pas seulement dire « palais », il signifie également « cour ». S’il a le premier sens dans certains passages, comme Matth., xxvi, 3, 58 ; Marc, xiv, 54, etc., il a le second dans d’autres, comme Matth., xxvi, 69 ; Marc, xiv, 66 ; Luc, xxii, 55. L’expression de Marc, xv, 16 : ï| a-JXV), S èo-tiv Ttpauioptov, pourrait donc désigner la cour intérieure qui servait de prétoire. Cependant, M. van Vebber, Theologische Quartalsckrift, 1905, Heft II, « arrive, à la suite d’un raisonnement objectif et très serré, à ces deux équations : ta’HptiSou (3a<xi-Xeia = oîxc’a twv êmTpÔTtwv dans Philon, et tj aùXVî, S iattv itpatîfipiov de saint Marc = » | aûXi) 3a<nXot>î ou simplement « ûXioi que Josèphe applique uniquement au palais d’Hérode élevé dans la ville haute, tandis que pour lui la forteresse du Temple n’est que l’Antonia, le çpti-jpiov ou le itûp-fo ; . La distinction du Prétoire et de l’Antonia est d’ailleurs confirmée par d’autres passages de Josèphe. » Cf. Revue biblique, 1905, p. 650. Il y aurait donc là un argument sérieux en faveur de cette première théorie, si elle n’avait toute la tradition contre elle. Quant à l’objection tirée de àvéire( « }’£ v i nous sommes d’avis qu’il ne faut pas trop presser la signification étymologique du mot. Cette opinion est admise par un certain nombre d’auteurs, entre autres par E. Schûrer, Geschichte des jùdischenyolkes im Zeitalter Jesu Christi, Leipzig, 1901, t. i, p. 458, et dans Riehm, Handwôrterbuch des biblischen Altertums, Leipzig, 1884, t. ii, p. 1293. Elle est regardée comme probable par G. T. Purves, dans le Dictionary of the