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PRÊT — PRÉTOIRE


affaires et à exercer en grand le commerce de l’argent, qui ne permettait pas de différer le paiement des dettes à la septième année. Les prêtres eux-mêmes participaient à ces opérations financières. Cf. Josèphe, Ant.jud., XX, ix, 2. Pour éluder la difficulté, le créancier acceptait l’argent de son débiteur à titre de cadeau, ou bien l’on excluait de l’ordonnance légale les dettes pour lesquelles le créancier avait un gage. Hillel imagina un autre moyen, la Kpoaoolr), qui consistait à lire à haute voix, devant le juge, une formule par laquelle on se réservait d’exiger son argent en tout temps. De la sorte, l’intérêt du commerce était sauf, mais non le texte de la loi. Cette déclaration prend le nom hébraïsé de prôz-bôl dans la Mischna. Cf. Schebiith, x, 3-7 ; Gittin, tv, 3 ; Pea, iii, 6 ; Moed Katan, iii, 3 ; Kethuboth, ix, 9 ; Vkzin, iii, 10. Les titres déposés dans les archives publiques de Jérusalem étaient vraisemblablement accompagnés de cette déclaration. Cf. Schûrer, Geschichte des jûdischen Volkes im Zeit. J. C, Leipzig, t, ii, 1898, p. 45, 363 ; F. Buhl, La société Israélite d’après l’A. T., trad. B. de Cintré, Paris, 1904, p.173, 174.

H. Lesêtre.
    1. PRÊTEUR##

PRÊTEUR (hébreu : nôsëk, de nâsâh, « prêter » ; Septante : SavsKjTrjç ; Vulgate : creditor, fœnerator), celui qui prête. — Voir Dette, t. ii, col. 1394. Le prêteur met de l’argent ou un objet quelconque à la disposition de quelqu’un qui, tant qu’il n’a pas rendu ce qui lui a été prêté, demeure son débiteur, lôvéh, SavsiWptEvo ? iuô’/pswç, xp£<oç£0, éTj] ; , debitor. Il y a des prêteurs impitoyables, IV Reg., iv, 1, d’autres qui sont miséricordieux. Luc, vii, 41. Ils sont les uns et les autres sous le regard de’Dieu. Prov., xxix, 13. On vendait au prêteur des esclaves pour acquitter ses dettes, Is., L, 1, ou lui-même prenait tout dans la maison de son débiteur. Ps. cix (cviu), 11. Au jour du grand jugement de Dieu, tous les hommes se trouveront dans la même situation, le prêteur comme l’emprunteur, le débiteur comme le créancier. Is., xxiv, 2. Voir Emprunt, t. ii,

col. 1764 ; Prêt, col. 617.

H. Lesêtre.
    1. PRÉTOIRE##

PRÉTOIRE (grec : zo npatitôptov), mot dérivé du latin prsetorium, lequel est passé en grec. Il désignait primitivement, chez les Romains, dans les camps de marche, la tente du général en chef (prsetor) : Cf. Tite-Live, vu, 12 ; x, 33. Il s’appliqua ensuite au conseil de guerre ou réunion des officiers supérieurs qui se tenait dans cette tente, Tite Live, xxvi, 15 ; XXX, 5 ; xxxvii, 5, et, dans les camps permanents, au quartier général du commandant en chef. Lorsque l’empereur devint théoriquement le général par excellence, l’iwiperator, sa résidence prit le nom de prsetorium, et, comme d’habitude il demeurait à Rome, il y eut, à côté de preetoria changeant avec ses déplacements, un prœtorium fixe dans la capitale. À la tête de ce dernier étaient les préfets du prétoire, prxfecti prsetorio, et les prœtoriani étaient spécialement chargés de le garder. Tacite, Ann., i, 20 ; ii, 11, 24 ; iv, 46. Mais, même alors, le mot continua à être employé, comme auparavant, dans le sens de « résidence du gouverneur » et particulièrement de « logement réservé au gouverneur dans ses déplacements, >. Cicéron, /n Verr., II, iv, 28 ; v, 35. Par une dernière extension, il devint synonyme de maison riche, palais, et même de maison d’habitation opposée aux constructions agricoles. Cf. R. Cagnat, Prsetorium, dans le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines de Daremberg et Saglio, Paris, t. vii, p. 640. — Ce nom ne se trouve que dans le Nouveau Testament. Dans les Évangiles, Matth., sxvii, 27 ; Marc, xv, 16 ; Joa., xviii, 28, 33 ; xix, 9, et dans les Actes des Apôtres, xxiii, 35, il désigne la résidence du gouverneur romain. Dans PÉpltre aux Philippiens, i, 13, il a un sens que nous aurons à déterminer.

I. Dans les Évangiles. — Le prétoire, dans les Évangiles, soulève une question fort débattue de nos jours, à savoir l’emplacement qu’il occupait à Jérusalem au moment de la Passion du Sauveur. Commençons par examiner les données scripturaires.

i° Données évangéliques. — C’est de chez Caïphe que les Juifs conduisirent Jésus au prétoire, chez Pilate. Matth., xxvii, 2 ; Marc, xv, 1 ; Luc, , xxiii, 1 ; Joa., xviii, 28. « C’était le matin, et ils n’entrèrent pas eux-mêmes dans le prétoire, afin de ne pas se souiller et de pouvoir manger la Pàque. Pilate sortit donc au devant d’eux, c^XŒv… ë£w ; Vulgate : exivit… foras. » Joa., xviii, 28-29. Après leur avoir demandé quelle accusation ils portaient contre cet homme et entendu leur réponse, il « rentra dans le prétoire, et appela Jésus », qu’il interrogea sur sa royauté. Joa., xviii, 3337. « Il sortit de nouveau au devant des Juifs » et leur proposa de relâcher le prisonnier à l’occasion de la fête de Pâque ; mais ceux-ci réclamèrent Barabbas. Joa., xviii, 38-40. « Alors donc Pilate ordonna de saisir Jésus et de le flageller. Et les soldats (le conduisant dans la cour, qui est le prétoire, ïaa> t/jç a-ûÀîjç, fi àdTiv jrpaiTfipiov, Marc, xv, 16) tressèrent une couronne d’épines qu’ils lui mirent sur la tête, et le revêtirent d’un manteau de pourpre ; puis ils s’avançaient vers lui en disant : <i Salut, roi des Juifs ! » et ils lui donnaient des coups de verge. Pilate sortit de nouveau et leur dit : « Voici, je vous l’amène pour que vous « sachiez que je ne lui trouve aucun crime." » Jésus sortit donc, portant la couronne d’épines et le manteau de pourpre, et il leur dit : « Voici l’homme ! » Joa., xix, 1-5. Devant les cris de mort poussés par les Juifs, Pilate « rentra de nouveau dans le prétoire » et fit subir un nouvel interrogatoire à Jésus. Joa., xix, 7-11. Accusé de n’être pas l’ami de l’empereur, « Pilate fit sortir Jésus, ^aft’i ËSto, et s’assit sur le tribunal, êiul flrijjiaToç, à l’endroit appelé Lithostrotos, en hébreu Gabbatha. » Enfin « il le leur livra chargé de liens pour être crucifié. » Joa., xix, 12-16. — Voilà tout ce que nous apprend l’Évangile : le prétoire où demeurait Pilate, d’où il sortit, et où il rentra plusieurs fois au cours de ces différentes scènes, le lieu témoin de l’interrogatoire, de la tlagellation, du couronnement d’épines et de la condamnation de Jésus, était précédé d’une place où la foule des Juifs put se rassembler et d’un lieu « élevé » (Gabbatha) et « pavé en pierre » (Lithostrotos ) où le gouverneur établit son tribunal. Saint Marc nous parle d’une cour intérieure ou atrium, qur était le prétoire. Mais dans quel endroit de la ville se trouvait-il ? Le texte sacré ne nous le dit pas. Interrogeons l’histoire.

2° L’histoire. — Le prétoire, chez les Romains, n’était pas un édifice spécial, semblable à nos palais de. justice, affecté aux audiences et aux jugements du tribunal ; c’était, nous l’avons dit, la résidence du gouverneur de province, qui y jugeait cependant les cas soumis à sa juridiction et y rendait ses sentences, puisqu’il était non seulement le chef de l’armée, mais encore le chef du gouvernement. Les procurateurs de Judée n’habitaient pas ordinairement Jérusalem, mais Césarée maritime, où ils occupaient le palais d’Hérode, qui est appelé itpatrwptov toû’HpwSou, Act., xxiii, 35, à propos de la comparution de saint Paul devant Félix. Ils venaient dans la ville sainte à l’époque des grandes fêtes de l’année, lorsque la multitude des Juifs rassemblés à ces occasions pouvait amener et amenait souvent des émeutes. Pilate s’y trouvait donc à cause de la fête de Pâque. Mais où habitait-il ? L’histoire nous éclaire un peu en nous apprenant qu’il devait, comme à Césarée, occuper un des palais d’Hérode, mais elle ne nous dit pas lequel. Nous savons, en effet, qu’Hérode le Grand agrandit et embellit la citadelle Antonia, située à l’angle nord-ouest de l’enceinte du Temple. Il en fit non seulement une forteresse remarquable, mais