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POLITARQUE — POLITESSE

POLITARQUE (grec : πολιτάρχης; Vulgate ; princeps civitatis), nom local des chefs de la ville de Thessalonique. Act., xvii, 6, 8. On a retrouvé un certain nombre de leurs inscriptions. Voir Vigouroux, Le Nouveau Testament et les découvertes archéologiques modernes, 2e édit., p. 237-256. Leur nombre paraît avoir varié selon les époques. Une inscription en mentionne deux, une autre six, une autre sept, etc. On trouve des politarques dans d’autres villes de la Macédoine. Quand saint Paul prêcha l’Évangile à Thessalonique, les Juifs irrités voulurent s’emparer de sa personne et, ne l’ayant pas trouvé, ils traînèrent Jason chez qui il logeait devant les politarques ; ceux-ci ne laissèrent en liberté Jason et les frères qu’on avait arrêtés avec lui que contre caution. Act., xvii, 1-9.


POLITESSE, ensemble d’usages qui président aux bonnes relations des hommes entre eux. — Ces usages varient suivant les pays et suivant les temps ; mais la dignité extérieure a toujours été en grande estime chez les Orientaux, ce qui fait que parmi eux, même l’homme du peuple, le pauvre, le nomade, ne sont jamais vulgaires. Les Israélites avaient des règles de politesse auxquelles la Sainte Écriture fait assez souvent allusion.

1° En se rencontrant, on échangeait des salutations très expressives et parfois très cérémonieuses. Voir Salutation. En certaines circonstances, on donnait un baiser. Voir Baiser, t. i, col. 1383. On voit Joab saisir de la main droite la barbe d’Amasa pour le baiser. II Reg., xx, 9. Pour marquer un plus grand respect, on se prosternait, voir Adoration, t. i, col. 233, et Prosternement. À la rencontre d’un supérieur, celui qui était sur sa monture en descendait et se prosternait. I Reg., xxv, 23.

2° L’inférieur donnait à son supérieur le nom de seigneur et lui-même se déclarait son esclave, Gen., xviii, 3 ; xix, 2 ; xxxiii, 14 ; Jud., xix, 19 ; I Reg., xxvi, 18, etc. ; il parlait de lui à la troisième personne. Gen., xliv, 18, 19, etc. Une femme prenait aussi le nom d’esclave devant son supérieur, I Reg., i, 16 ; xxv, 24 ; IV Reg., iv, 2, 16, etc., cependant même un serviteur pouvait parler à sa maîtresse sans qu’aucun terme spécial de respect fût mentionné. I Reg, xxv, 14, 17.

3° On avait des égards particuliers pour les vieillards. La loi faisait une obligation de se lever devant eux. Lev., xix, 32. Le jeune homme devait garder une attitude modeste et réservée :

Parle, jeune homme, s’il y a utilité pour toi,
À peine deux fois, si l’on t’interroge.
Abrège ton discours, dis beaucoup en peu de mots.
Sois comme quelqu’un qui a la science et sait se taire.
Au milieu des grands, ne te fais pas leur égal,
Et, où il y a des vieillards, sois sobre de paroles…
L’heure venue, lève-toi sans tarder.

Eccli., xxxii, 7-10.

4° Quand on allait chez quelqu’un, on commençait par se tenir hors de la maison, et, si Ton arrivait chez un grand personnage, on se faisait annoncer. III Reg., 1, 23. Il eût été impoli d’entrer rapidement dans la maison, de se courber à l’entrée pour voir à l’intérieur et d’écouter à la porte. Eccli., xxi, 25-27. Voir Visite. Les visites comportaient différentes attentions mutuelles. Le nouvel arrivant pouvait apporter des présents, voir Présent ; son hôte lui donnait le baiser, lui lavait les pieds, voir Lavement des pieds, t. iv, col. 132, et le parfumait. Voir Onction, t. iv, col. 1810 ; Parfum, col. 2163. S’il y avait quelque festin ou quelques autres réjouissances, il fallait éviter de s’attribuer la première place, voir Première place, et ensuite prendre soin de se comporter convenablement. Voir Festin, t. iii, col. 2212 ; Repas. Quand le visiteur venait de loin, le devoir de l’hospitalité s’imposait envers lui. Voir Hospitalité, t. iii, col 760.

5° La conversation était fort dans le goût des Israélites, comme de tous les Orientaux. Job, xxix, 9-11, etc. Mais elle devait respecter la convenance des assistants. Aussi était-il dit à l’adresse du vieillard qui assistait à un repas, Eccli., xxxii, 3-4 :

Parle, vieillard, avec justesse et doctrine, c’est ton rôle,
Mais sans faire obstacle à la musique.
Lorsqu’on (l’)écoute, ne te répands pas en paroles,
Et n’étale pas ta sagesse à contre-temps.

Il y a en effet « un temps pour se taire et un temps pour parler.» Eccle., iii, 7. Fleury, Mœurs des Israélites, I, xii, fait les remarques suivantes au sujet du langage des Hébreux : « Ils usaient volontiers, dans leurs discours, d’allégories et d’énigmes ingénieuses. Leur langage était modeste et conforme à la pudeur, mais d’une manière différente de la nôtre : ils disaient l’eau des pieds pour dire l’urine ; couvrir les pieds, pour satisfaire aux autres besoins, parce qu’en cette action, ils se couvraient de leurs manteaux, après avoir creusé la terre, Deut., xxiii, 14 ; ils nommaient la cuisse pour les parties voisines que la pudeur défend de nommer. D’ailleurs, ils ont des expressions qui nous paraissent fort dures, quand ils parlent de la conception et de la naissance des enfants, de la fécondité et de la stérilité des femmes ; et ils nomment sans façon certaines infirmités secrètes de l’un et l’autre sexe, que nous enveloppons par des circonlocutions éloignées. Toutes ces différences ne viennent que de la distance des temps et des lieux. La plupart des mots qui sont déshonnêtes, suivant l’usage présent de notre langue, étaient honnêtes autrefois, parce qu’ils donnaient d’autres idées… Les livres de l’Écriture parlent plus librement que nous ne ferions de ce qui regarde le matériel du mariage, parce qu’il n’y avait personne parmi les Israélites qui y renonçât, et que ceux qui écrivaient étaient des hommes graves et des vieillards pour l’ordinaire. » Les récits que font parfois les historiens sacrés et le langage que tiennent certains prophètes ne doivent donc pas étonner. Ils n’accusent nullement un manque de savoir-vivre et de délicatesse ; ils portent seulement la marque d’un temps et d’un pays où les choses ne s’appréciaient pas comme dans les nôtres, où la grâce de l’Évangile n’avait pas encore fait sentir son influence et où la politesse ignorait certains raffinements dont des civilisations plus avancées couvrent leurs vices. La simplicité des mœurs autorisait d’ailleurs celle du langage en bien des circonstances. — Il était considéré comme malséant de rire bruyamment. Eccli., xxi, 23.

6° Dans l’Évangile, on rencontre un bon nombre de formules de politesse très simples, mais d’autant plus expressives que souvent les interlocuteurs s’adressent l’un à l’autre sans se donner aucune appellation spéciale. Ceux qui parlent au Sauveur lui disent ordinairement « Seigneur », Matth., viii, 6, 8, 25 ; ix, 28 ; xv, 22 ; Luc, v, 8, 12 ; Joa., iv, 49 ; v, 7 ; xi, 21, 27, etc., ou « Maître, Rabbi, Rabboni », Malth., xxii, 16 ; xxvi, 49 ; Marc, iv, 38 ; ix, 16 ; x. 51 ; Luc, vii, 40 ; viii, 24 ; x, 25 ; xvii, 13 ; xviii, 18 ; xix, 39 ; Joa., viii, 4 ; ix, 2 ; xi, 8, etc. Lui-même, suivant les personnes auxquelles il s’adresse, dit ci mon fils », Matth., ix, 2 ; Marc, ii, 5 ; « homme », Luc.,-v, 20 ; « jeune homme », Luc, vii, 14 ; « femme », Matth., xv, 28 ; Luc, xiii, 12 ; Joa., viii, 10, même quand il parle à sa mère, Joa., ii, 4 ; xix, 26 ; « ma fille. » Marc, v, 34 ; Luc, viii, 48. Parfois, il interpelle directement quelqu’un par son nom. Matth., xvii, 24 ; Luc, vii, 40 ; x, 41 ; xix, 5 ; Joa, , xiv, 9 ; xxi, 15, 17. Dans les paraboles, le fils dit « mon père », Matth., xxi, 28 ; Luc, xv, 12, 21 ; le père dit « mon fils », Matth. 31 ; le serviteur dit à son maître « seigneur ». Matth., xxv, 20 ; Luc, xiii, 8 ; xiv, 22 ;