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479 poésie hébraïque — poétiques (livres) de la bible 480

vu » siècle de notre ère. On ne la rencontre donc qu’accidentellement dans l’ancienne poésie hébraïque. La langue des Hébreux, par la sonorité des finales de ses mots et de ses flexions, fournit à la rime des ressources abondantes et le poète est amené tout naturellement à s’en servir et à répéter, sans les chercher, les mêmes terminaisons qu’il emploie nécessairement pour exprimer sa pensée. Il y a donc dans ce qu’il écrit des rimes inconscientes, mais elles sont aussi quelquefois un effet de l’art comme on n’en saurait douter lorsqu’elles réviennent d’une manière régulière et suivie et par conséquent voulue. Ainsi, par exemple, dans les vers suivants de Job, x, 9-18.

Zekor-na kî kahômèr’âêîtânî

Ve’él l dfâr leUbênî.

Hâlô" kékàlâb (afikênî

Vekagbinâh (aqpVèni.

_’Ôr ûbdiâr (albisêni

Uba’àsdmôt vegidîm (eiôkkênî.

Jfayîm vdhéséd’àêîlâ’immâdî

Ûfquddatkâ sâmrâh rûhi.

Ve’élléh sàfantâ bilbâbèka

Yâda’etî kî zô(’immâk, ’Im hâfa’ti usemartànî

Umê’âvôni l’ô penaqqênî.’Im rdsæfi’alelai li

Veiddaqlî l’ô’éssd’r’ôsî

Seba’qâlôn ure’êh’onyî.

Ve-ig’éh kassahal (esûdènî

Vefasob (ilpalld’bi.

TehaddêS’èdêka negdî

Veféréb ka’askâ’immâdî

Biàlifôf vesdbd’'immî.

Velâmmâh mêréljiém hôs’êlànî’Egeva ve’ain l’ô-(ir’êni.

Voir aussi le Ps. vi, dont une grande partie des vers sont rimes.

d) L’assonance, c’est-à-dire la reproduction fréquente du même son, est recherchée par les poètes hébreux. Elle se distingue.de la rime en ce qu’elle n’est pas placée régulièrement à la fin du vers mais arbitrairement à des endroits différents. Dans les 44 vers que contient le chap. v des Lamentations, la syllabe nû est répétée trente-cinq fois ; elle l’est douze fois dans les seize vers de Ps. cxxiv. Elle est autant un artifice de rhétorique qu’un procédé poétique, de même que l’allitération et les jeux de mots, mais tous ces moyens qui piquent l’attention et aident la mémoire du lecteur ou de l’auditeur sont familiers aux poètes d’Israël.

e) L’allitération est la répétition des mêmes lettres ou des mêmes syllabes. Les exemples en sont nombreux : èo’âh umeès’âh, « solitude et désert », qui se lit deux fois dans Job, xxx, 3, et xxxviii, 27, etc. — L’annomination est la répétition des mêmes mots sous des formes différentes ; Isaïe l’affectionne particulièrement.

Hinnèh Yahvéh metaltélqâ.

Taltêlâh gâber ve’ôtkâ’atôh

Çanôf isnofkd senêfdh. Is., xxii, 17-18.

Quant aux paronomases et aux jeux de mots, les poètes hébreux s’y complaisent, lreû rabbîm veîrâ’û. Ps. xl, 4. Veire’û saddiqim veîrd’û. Ps. LU, 8. Vehdyetah td&niyàh vëâniyâh. ls., xxix, 1, etc.’Voir Jevs ce mots, U III, col. 1525. Cf. aussi G. W. Hopf, Allitération, Assonanz, Reim in. der Bibel, in-8°, Erlangen, 1883 ; J. M. Casanowicz, Paronomasia in the old Testament, in-8°, Boston, 1894.

Sur la poésie hébraïque en général, voir l’historique et l’exposé des systèmes anciens et modernes sur la métrique hébraïque dans J. Dôller, Rythmus’, Metrik und Strophik in der biblisch-hebrâischen Poésie, in-8°, Paderborn, 1899 ; Ed. Konig, Stilistik, Rhetorik, Poe tik im Bezug auf die biblische Literatur, in-8°, Leipzig, 1900, p. 346 sq. Sur les strophes en particulier, voir D. H. Mùller, Die Prophetên in ihrer ursprûnglichen Form, 2 in-8°, Vienne, 1896 ; F. Perles, Zur hebraïschen Strophik, Vienne, 1896 ; J. K. Zenner, S. J., Die Chorgesânge im Bûche der Psalmen, 2 in-4°, Fribourg-en-Brisgau, 1896 ; D. H. Muller, Strophenbau und Besponsion, in-8°, Vienne, 1898. Voir aussi H. Grimme, Psalmenprobleme, Vntersuchungen ûber Metrik, Strophen und Pasekdes Psalmenbuches, in-4°, Fribourg (Suisse), 1902. F. Vigouroux.

    1. POÈTE##

POÈTE (grec : 7co ! 7|Tr, s). Ce mot, désignant un écrivain qui a composé des vers, ne se lit qu’une fois dans l’Écriture. Saint Paul, dans son discours de l’Aréopage, cite littéralement à ses auditeurs un vers d’Aratus qui était comme lui originaire de Cilicie. Voir ARATUS, t.l, col. 882. II ne le lui attribue pas d’ailleurs nommément, mais il s’exprime ainsi : « comme l’ont dit quelques-uns de vos poètes. » Act., xvii, 28. Cette manière de parler pourrait ne pas être prise à la rigueur de la lettre et s’entendre d’un seul poète, mais il est vrai que deux autres poètes grecs sont connus comme ayant écrit un vers semblable : ’Ex aov yàp flvo ; lir(ilv, dit Cléanthe, Hynm. in Jov., 15. "Ev àvSpûv, h 6ewv févoç, dit Pindare, Nem., 6. Voir Wetstein, In Act., xvii, 28, Novum Testam. gr., t. ii, 1752, p. 570.

Saint Paul cite aussi un poète Cretois, Tit., i, 12, également sans le nommer ; il l’appelle « un prophète » des Cretois. Voir Epiménide, t. ii, col. 1894. Dans I Cor., xv, 33, il reproduit un vers de la Thaïs de Ménandre, mais sans aucune indication. Voir Ménandre, t. iv, col. 960. Ce sont là les seuls poètes profanes cités dans le Nouveau Testament. — Dans l’Ancien Testament, on ne trouve qu’un mot qui, en hébreu, désigne les poètes en général, et encore ne s’applique-t-il directement qu’à ceux qui composent des mâSâl, poèmes gnomiques, didactiques et satiriques. Les Nombres, XXI, 27, rapportent les vers contre Moab, ꝟ. 27-30, en les attribuant aux môHîm ou poètes. La Vulgate n’a pas traduit ce mot ; les Septante l’ont rendu par oî a’tvtYJJiaiTKTTai’. — Il est possible que le mot nâbî’, « prophète », eut accessoirement le sens de poète, parce que les prophètes écrivaient souvent ou s’exprimaient en vers, mais ce n’était certainement, en tout cas, qu’une signification secondaire et dérivée. Ben Sirach fait l’éloge des poètes sacrés (bwn >Nin : i). Eccli., XLIV, 5.

F. Vigouroux.

PŒTIQUES (LIVRES) DE LA BIBLE. 1° L’Écriture contient un certain nombre de livres écrits en vers et des morceaux poétiques se trouvent aussi dans plusieurs des livres écrits en prose. Voir t. iii, col. 487. Les grammairiens hébreux n’ont noté que trois livres avec les accents poétiques, Job, les Psaumes et les Proverbes, mais on range aussi aujourd’hui parmi les livres poétiques le Cantique des Cantiques et les Lamentations. Plusieurs y ajoutent l’Ecclésiaste et l’Ecclésiastique dont une partie a été retrouvée dans le texte original. — Deux recueils de poésies qui contenaient des morceaux profanes avec des morceaux religieux, le Livre des Guerres du Seigneur, Num., XXI, 14, et le Livre des Justes ou du YdSâr (Jos., IX, 13, etc. Voir Justes (Livre des), t. iii, col. 1873. Cf. Livres perdus, 1°, 2°, t. iv, col. 317), ne nous sont plus connus que par des citations. Il paraît avoir existé aussi un recueil d’élégies ou lamentions funèbres, qinôf. II Par., xxxv, 25.

On pourrait considérer également comme livres poétiques les écrits de plusieurs prophètes, qui se conforment en général aux règles de la poésie hébraïque, tels que Isaïe, Osée, Joël, Amos, Abdias, Michée, , Nahum, Habacuc, Sophonie, etc. Cependant ils s’astreignent d’ordinaire moins rigoureusement aux exi-