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PIÉTON — PILATE (PONCE)


haï et persécuté par ses propres concitoyens ; comment pourra-t-il tenir devant des ennemis plus forts, les

étrangers ?

H. Lesêtre.
    1. PIGEON##

PIGEON (Vulgate : columba). Voir Colombe, t. w, col. 846.

PILA, « mortier ». La Vulgate, Soph., i, 11, a traduit par Pila le nom propre hébreu Maktés, localité des environs de Jérusalem ou quartier de cette ville. Voir Macthesch, t. iv, col. 531.

1. PILATE (PONCE) (grec : IldvTio ; lifta™ ; ), procurateur romain de la Judée au temps de Jésus-Christ, Indépendamment des récits évangéliques relatifs à la passion de Notre-Seigneur, Matth., xxvii, Marc, xv, Luc, xxiii, Joa., xviii-xix, il est nommé plusieurs fois dans le Nouveau Testament : Luc, iii, 1, pour fixer l’époque à laquelle saint Jean-Baptiste inaugura son ministère ; Luc, xiii, 1, à propos d’un acte particulièrement cruel de son gouvernement, Act., iii, 13 ; IV, 27 ; xm, 28, et I Tim., vi, 13, comme responsable de la mort du Sauveur. Parmi les auteurs classiques, Tacite est seul à le mentionner. Ann., xv, 44. Philon et Joséphe parlent souvent de lui, le premier dans sa Legatio ad Caium, xxxviii, le second dans ses Antiquités et dans le Bellum judaicum. Voir plus bas, col. 430 et 431.

1° Son nom et son origine. — Son nom complet, qui n’apparaît qu’une seule fois dans le Nouveau Testament, Luc, iii, 1, est Pontius Piîatus. Il est possible qu’il ait appartenu, soit par son ascendance proprement dite, soit par adoption, à la gens Ponlia, d’origine samnite et célèbre dès le début de l’histoire romaine. Voir le P. Ollivier, Ponce Pilate et les Pontii, dans la Revue biblique internationale, t. v, Paris, 1896, p. 247. 254, 594-600. Pilatus n’était qu’un surnom, un cognomen, dont il est difficile d’expliquer la provenance. C’est à tort qu’on l’a rattaché parfois à pileus, bonnet de laine dont on coiffait les esclaves lorsqu’on les affranchissait ; en effet, dans ce cas, on eût dit pileatus. La véritable étymologie semble être plutôt pilum ou pila, « javelot, » de sorte que pilatus signifierait : « armé du javelot. » Cf. Virgile, &n., xii, 121-122. D’après sa fonction, Pilate devait appartenir à l’ordre des chevaliers romains.

2° Son titre et la durée de son administration. — Pilate porte, dans le texte grec de saint Matth., xxvii, 2, 11, 14, etc., et de saint Luc, xx, 20, comme aussi dans Josèphe, Ant., XVIII, iii, 1, le titre moins exact de f.yeiKûv. Cf. Act., xxiii, 24, 26, 33 ; xxiv, 1, 10 ; xxvi, 30. En latin, son titre officiel était, non pas prœses, comme nous lisons habituellement dans la Vulgate aux passages qui s’occupent de lui et d’autres gouverneurs de la Judée, mais procurator, dont l’équivalent grec était éitiTpoTtoç. Voir Tacite, Ann., xv, 44 ; Philon, Légat, ad Caium, xxxviii ; Josèphe, Bell, jud., II, ix, 2. Avant lui à partir de la déposition d’Archélaûs, par Auguste, l’an 6 de notre ère, quatre procurateurs s’étaient succédé en Judée et en Samarie, — car leur juridiction s’étendait aussi à cette seconde province. C’étaient : Coponius (6-9 après J.-C), Marcus Ambivius (9-12), Annius Rufus (12-15), Valerius Gratus (15-26). Il fut donc le cinquième, et il exerça ses fonctions entre les années 26 et 36 de l’ère chrétienne ; par conséquent pendant dix ans, comme le dit Josèphe en termes exprès, Ant. jud., XVIII, iv, 2. Il entra en fonction la douzième année de Tibère, Eusèbe, H. E., i, 9, t. xx, col. 107, laquelle correspond, non pas à l’an 27 après J.-C, comme on l’a dit parfois, mais à l’an 26. Cf. Ewald, Geschichte Christi und seiner Zeit, in-8°, 2e édit., Gœttingue, 1857, p. 36 ; T. Keim, Geschichte Jesu von Nazara, in-8°, 1. 1, Zurich, 1867 ; E. Schûrer, Geschichte des pidischen Volkes, in-8<>,

4e édit., Leipzig, 1904, p. 487 ; pour l’an 2 7, J. Belser Geschichte des Leidens und Sterbens des Herrn, in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1903, p. 332. Le gouvernement de Pilate eut donc, comme celui de Valerius Gratus, une assez longue durée, et c’est uniquement sous le règne de Tibère qu’il fut exercé. Or, Tacite, Ann., i, 80 ; iv, 6, et Josèphe, Ant. jud., XVIII, VI, 5, font remarquer que, par principe, ce monarque laissait longtemps ses magistrats en fonction dans les provinces.

3° Caractère général et quelques épisodes de son administration. — Ce qu’en racontent les auteurs sacrés et profanes montre, d’un côté, à quel point était pénible et difficile, à cette époque, la tâche d’un gouverneur de Judée, et, d’un autre côté, combien Pilate fit peu d’eflorts pour rendre son administration conciliante à l’égard des Juifs. La lettre d’Agrippa à Caligula, citée par Philon dans sa Legatio ad Caium, xxxviii, trace de lui un portrait peu flatteur, dans lequel il y a certainement quelque exagération, puisqu’il provient d’un ennemi juré, mais dont l’histoire ne constate que trop bien l’exactitude générale. Cette lettre dit de lui qu’il était « inflexible de caractère et dur avec arrogance ». Elle lui reproche ; < la corruption, les violences, la rapine, les mauvais traitements, les vexations, de perpétuelles exécutions sans jugement préalable, des cruautés sans nombre et insupportables ». Détestant les Juifs et ne comprenant rien à leur tempérament ni à leurs sentiments religieux, il prétendit les gouverner d’après sa propre volonté, et les faire fléchir en tout et malgré tout. Mais, aussi faible et irrésolu par moments qu’il était d’ordinaire intraitable, il contribuait lui-même à amoindrir son autorité ; aussi £ut-ii vaincu à plusieurs reprises par ceux dont il croyait pouvoir aisément triompher, et il finit même par être tout à fait brisé par eux. Son opiniâtreté et sa maladresse occasionnèrent plus d’une fois des mouvements de rébellion, qu’il dut ensuite étouffer dans le sang.

Dès les premiers mois qui suivirent son installation, il froissa jusqu’au vif les habitants de Jérusalem, et tous les Juifs de Judée par là même. Ses prédécesseurs, fidèles à la politique d’après laquelle Rome accordait habituellement une grande liberté aux provinces conquises, lorsqu’il ne s’agissait que de leurs affaires intérieures, s’étaient montrés fort accommodants sur certains points qui touchaient aux idées religieuses des Juifs. C’est ainsi qu’ils avaient fait enlever, sur les étendards du détachement militaire qui tenait garnison à Jérusalem, toutes les images et effigies qui présentaient un caractère idolâtrique. Pilate, au contraire, voulut que les soldats envoyés par lui dans la ville sainte y entrassent avec leurs enseignes munies de tous leurs emblèmes, Il ne prit d’autre précaution que de faire pénétrer hommes et drapeaux pendant la nuit. La colère des Juifs fut grande, lorsqu’ils s’aperçurent, le lendemain matin, de l’outrage qui leur avait été fait. En nombre considérable ils se rendirent à Césarée, où le procurateur avait sa résidence ordinaire, et, pendant cinq jours, ils protestèrent avec une telle énergie, que Pilate, qui avait d’abord pris le parti de les faire massacrer, dut céder, en voyant qu’ils étaient prêts à mourir tous, plutôt que de supporter cet affront. Cf. Josèphe, Ant. jud., XVIII, iii, 1-2 ; Bell, jud., II, ix, 2-4. — Plus tard, malgré cette leçon humiliante, H commit une faute toute semblable, en faisant suspendre dans le palais qui lui servait d’habitation lorsqu’il séjournait à Jérusalem, des boucliers d’or dédiés à Tibère et munis aussi d’inscriptions ou de symboles idolâtriques. Une insurrection faillit éclater. Averti par les Juifs, l’empereur ordonna lui-même d’enlever au plus tôt la cause du désordre. Voir Philon, Légat, ad Caium, xxxviii, édit. Mangey, t. ii, p. 590 ; Eusèbe H. E., ii, 6, t. xx, col. 154. — Plus tard encore, Pilate se permit de puiser dans le trésor sacré du temple de