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PIERRE (SAINT)


Évangile. En troisième lieu, il.eut probablement, tout é fait à la fin de sa vie, une nouvelle rencontre avec Simon le magicien. Bien que les détails qui entourent -cet épisode dans la littérature clémentine et dans les autres écrits apocryphes soient légendaires en grande partie, le fait même est attesté et regardé comme historique par des écrivains ecclésiastiques aussi anciens que judicieux, tels que saint Irénée, Tertullien, saint Hippolyte, Eusèbe, etc. ; c’est pourquoi divers critiques contemporains en parlent comme d’un événement certain, tout en le dégageant des fables dont il est environné ; d’autres, il est vrai, le rejettent totalement. Voir C. Fouard, Saint Pierre, p. 551, L. Duchesne, Les Origines chrétiennes, p. 87-113, etc. En tout cas, il est. bien évident que le prince des Apôtres, même après s’être installé à Rome, n’y séjournait pas perpétuellement ; il s’en allait parfois, lorsque les besoins de l’Église réclamaient ailleurs sa présence. C’est ainsi que nous le trouvons à Jérusalem, pour l’assemblée qui s’y tint vers l’an 50, Act., i, 15 et à Antioche un peu plus tard. Gal., ii, 11.

V. LES DERNIERS INCIDENTS DE SA VIE ; SON MARTYRE

et son tombeau. — 1° Rien n’est complètement certain lion plus sur les faits qui précédèrent immédiatement la mort de saint Pierre. Arrêté par l’ordre de Néron, il tut, d’après une tradition longtemps en honneur, mais aujourd’hui battue en brèche (voir Kraus, Real-Encyklopâdie der christl. Alterthûmer, t. ii, p. 611), jeté dans le cachot nommé Tullianum, dans d’obscur caveau de la prison Mamertine, au pied du Capitule. Voir H. Grisar, Histoire de Rome, trad. Ledos, 1906, t. i, p. 207-210.

2° Le théâtre de sa mort fut Rome : il n’y pas le moindre doute sur ce point. Nous en avons pour garants saint Clément pape, / ad Cor., v et vi, 1. 1, col. 217, 220 ; Cafus dans Eusèbe, H. E., II, xxv, t. xx, col. 209 ; S. Denys de Corinthe, ibid., Il, xxv, 8 ; Origène, ibid., III, i, 1, col. 216 ; Tertullien, Adv. Marc, iv, 5, t. ii, col. 375 ; Eusèbe, Demonstr. evang., III, v, 65, t. xxii, col. 209 ; saint Jérôme, De vir. ill., 1, t. xxiii, col. 608 ; de même les Acta Pétri et Pauli (Tischendorf, Acia Aposlolorum apocrypha, Leipzig, 1851, p. 35), la littérature clémentine. Voir Clementinse, édit. de Lagarde, Leipzig, 1865, p. 6. Le témoignage des Clémentines est remarquable ; en effet, les hérétiques qui les ont composées auraient difficilement songé d’eux-mêmes à faire mourir saint Pierre à Rome, si le fait n’avait pas été réel. Il est frappant aussi de voir que « si plusieurs Églises revendiquent l’honneur d’avoir été fondées par Pierre, aucune, sauf Rome, n’a revendiqué la gloire de son martyre. » A. Brun, L’Apôtre Pierre, p. 63, note 1. L’endroit spécial de Rome où le vicaire du Christ subit le martyre ne fut probablement pas l’emplacement actuel de l’Église San Pietro in Montorio, sur le Janicule, mais celui de la basilique de saint Pierre, sur la colline vaticane. Voir. Marucchi, Éléments d’archéologie chrétienne, t. i, p. 11.

3° Pierre subit le martyre pour son Maître, comme celui-ci le lui avait prédit (Joa., xxi, 22. Voir Denys de Corinthe et Caïus, l. c. ; Tertullien, Adv. Marc, iv, 5, t. ii, col. 375. Son genre de mort fut le crucifiement, ainsi que nous l’apprennent Origène, dans Eusèbe, H. E., III, I, 2, t. xx, col. 216 ; Tertullien, De prœscript., 56, t. i, col. 461, et Scorpiac, 15, t. ii, col. 151 ; saint Jérôme, De vir. ill., 15, t. xxiii, col. 631 ; Eusèbe, Dem. evang., III, v, 65, t. XXII, col. 209, etc. Origène et saint Jérôme ajoutent que, sur sa demande, le prince des Apôtres fut crucifié la tête en bas, pour n’être pas égalé à son-Maître. Sénèque, Consol. ad Marc, 20, mentionne en termes formels cette aggravation du crucifiement, comme étant usitée de son temps. D’après l’explication la plus naturelle, c’est bien le supplice de la croix qui est désigné dans la prophétie du Sauveur, Joa., xxi, 22 : « Tu étendras tes bras… » C’est ce que reconnaissait déjà Tertullien, Scorpiac, 15, t. i, col. 151 : Tune Petrus ab altero cingitur, cum cruci adslringitur.

4° La date de sa mort. — Suivant M^ Duchesne, Histoire ancienne de l’Église, Paris, 1906, t. i, p. 64, « c’est… en 64 qu’il convient de placer son martyre. » Le savant historien ajoute dans une note : « Eusèbe le met en 67 ou 68 ; cependant, comme il indique en même temps la persécution de Néron, son attribution n’est pas sans ambiguïté. La persécution de Néron… commença à l’été de 64. » Nous préférons nous en tenir à la date d’Eusèbe, et tout spécialement à l’année 67, la quatorzième du règne de Néron, qui est adoptée par saint Jérôme et par la plupart des historiens modernes et contemporains. Voir Gams, Das Jahr des Martyrtodes der Apostel Petrus und Paulus, Ratisbonne, 1867 ; A. Rartolini, Sopra Vanno 67 dell’era volgare, se fosse quel del martirio de’gloriosi apostoli, Rome, 1868. D’après saint Épiphane, Béer., xxvii, 6, t. xli, col. 373, c’est dès la douzième année de Néron (en 66), qu’aurait eu lieu le martyre de saint Pierre. Déjà le catalogue libérien cite le 29 juin comme le jour de cette glorieuse mort. Les Acta Pétri et Pauli font de même. Cf. Tischendorf, Acta Apostol. apocr., p. 39. On ne saurait faire rigoureusement la preuve ; mais d’assez nombreux critiques acceptent cette ancienne donnée comme véritable. Voir Erbes, Die Todestage der Apostel Paulus und Petrus, dans les Texte und Untersuchungen, nouvelle série, t. iv, I re partie, 1899.

5° Saint Pierre subit-il le martyre en même temps que saint Paul ? Plusieurs anciens auteurs le disent formellement ; entre autres, Denys de Corinthe, dans Eusèbe, H. E., II, xxv, t. xx, col. 209 : « Ils ont rendu témoignage à la même époque, » y.axà tôv aÙTÔv xatpôv. Cf. Eusèbe, Chronic, traduction armén., t. xix, col. 524, et traduct. de saint Jérôme, t. xxvii, col. 589. Saint Jérôme, De vir. ill., 5, t. xxiii, col. 617, dit, en parlant de Paul : Eodem die guo Petrus Romæ pro Christo capite truncatur. Les traditions romaines s’expriment dans le même sens. D’autres anciens écrivains, sans affirmer directement ce fait, le supposent : tels saint Clément pape, Caïus, Origène, Tertullien, l. c De nombreux historiens contemporains se rangent à cette opinion. Voir Funck, dans le Kirchenlexikon de Wetzer et Welte, édit. Kaulen, t. ix. col. 1863. Le poète Prudence, Peristeph., 12, t. lx, col. 556-557, 560, fait mourir saint Paul un an après saint Pierre. Cf. aussi saint Augustin, Serm., ccxcv, 7, et Serai., ccclxxxi, t. xxxviii-xxxix, col. 1352, 1683, qui ajoute cependant que le jour du martyre fut le même.

6° Le prince des Apôtres fut enseveli tout près du lieu de son supplice, sur la colline Vaticane, comme le disait déjà le prêtre romain Caïus, dans Eusèbe, H. E., ii, 25, t. xx, col. 207 : « Si tu veux aller sur le Vatican ou sur a voûte d’Ostie, tu trouveras les trophées (ra TpÔ71aia) de ceux qui ont fondé cette Église, y> c’est-à-dire les tombeaux glorieux de sjint Pierre, enterré au Vatican, et de saint Paul, enseveli près de la « via Ostiensis ». Saint Jérôme signale le même fait, De vir. ill., 1, t. xxiii, col. 607. Une tradition identique a été conservée par le Liber pontificalis, édit. Duchesne, p. 52-53, 158-159, et les Acta Pétri et Pauli, 84, édit. Lipsius, p. 216. C’est là que le pape Anaclet construisit la Memoria beali Pétri (Lib. pontif., édit. Duchesne, p. 55 et 125) ; là que Constantin bâtit une basilique, sur l’emplacement de laquelle s’élève aujourd’hui l’œuvre admirable du Bramante et de Michel-Ange.

V. Portrait moral et physique de saint Pierre ;

SON ENSEIGNEMENT D’APRÈS LES DISCOURS DU LIVRE DES

Actes. — I. caractère du prince des apôtres. — Il n’a pas toujours été décrit exactement. C’est ainsi que divers écrivains, soit catholiques, soit protestants, attribuent à l’apôtre trop de défauts naturels : les uns,