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PHIHAHIROTH

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et sur les bords du canal se trouve un vaste emplacement romain, en partie recouvert par les lagunes. Il ne concorde pas tout à fait avec la distance de l’Itinéraire, mais l’Itinéraire ne mérite 'pas une confiance absolue. Là seulement put être le Sérapéum, et non à huit kilomètres plus loin, endroit que les ingénieurs français ont appelé de ce nom. Ce dernier endroit portait bien une stèle de Darius, mais s’il y a place pour une tour de garde, un migdol, il n’y a pas trace d’habitations. Store-City of Pithom, p. 25. Que ce soit bien là la situation de Pikeheret, les textes égyptiens et la version des Septante le confirment. La stèle de Philadelphe parle de taxes annuelles en chevaux ou en bétail affectées au sanctuaire de Pikeheret, pi. x, lig.17-20. D’autre part, le Papyrus Anastasi VI, pi. iv, nous a appris que sous Ménephtah les Shasou d’Atuma demandèrent à conduire leurs troupeaux dans les pâturages

qui appartenaient au domaine ou à la ferme I 8 C3

ah, de Pharaon, dans la terre de Socoth. Ce mot ah désigne un domaine avec pâturages où l’on élève et nourrit les chevaux et tout bétail. Si nous passons maintenanl à l’Exode, nous trouvons que les Septante ont rendu vis-à-vis de Phihahiroth, de l’hébreu et de la Vulgate, par ânevàvti ttjç litauXéo) ; , c< devant le domaine, la ferme », l'équivalent exact de l'égyptien ah. Ainsi, tandis que l’hébreu donne le nom propre du sanctuaire d’Osiris, les Septante nous parlent du domaine que le Papyrus Anastasi VI nous a fait connaître comme étant dans la terre de Socoth où se trouve Pikeheret. Nous avons ainsi le cadre du campement des Israélites : au nord-ouest, Phihahiroth-Pikeheret sur le lac Timsah, non loin de Phithom, proche de l’actuel Djebel Maryam ; au sud-est, Migdol ou Magdala, la butte marquée par la stèle des Perses, à peu de distance de l’actuelle station du Sérapéum sur le canal ; à l’est, la mer et, au delà, sur la rive asiatique, Béelsephon, l’actuelle colline de Toussoum. Voilà ce qui semble probable à M. Naville. Store-City of Pithom, p. 31.

2° La géographie de l’isthme, selon M. Naville, a contre elle le témoignage d’Hérodote qui vit l’Egypte sous les Perses. À lui tout seul cet auteur suffit à ruiner la thèse que nous venons d’exposer. Il dit du canal qu’il avait « quatre journées de navigation… On commença à le creuser, poursuit-il, dans cette partie de la plaine d’Egypte qui est du côté de l’Arabie. La montagne qui s'étend vers Memphis, et dans laquelle sont les carrières, est au-dessus de cette plaine et lui est contiguë. Le canal commence donc au pied de la montagne ; il va d’abord pendant un long espace, d’occident en orient, il passe ensuite par les gorges de cette montagne et se porte au midi dans le golfe d’Arabie. » ii, 158. « La signification du passage et l’intention de l’auteur sont visibles : Hérodote décrit les deux directions du canal, l’une de l’ouest à l’est dans le sens de l’Ouadi Toumilat, l’autre de l’est au sud, dans le sens des lacs Amers. La montagne dont il parle est le versant méridional delà chaîne qui longe l’Ouadi, et la gorge de cette montagne correspond à l’ouverture septentrionale du bassin qui contient les lacs Amers. La topographie de l’historien ne s’accorde en aucune façon avec la carte de M. Naville qui place l’ancien rivage de la mer Rouge entre Pikeheret et le lac Timsah, ne laissant ainsi aucun moyen de tracer le coude décrit par le canal de l’est au sud, ni de comprendre en outre, comment les vingt lieues de l’Ouadi Toumilat auraient exigé quatre jours de voyage, quand la journée de navigation, en Egypte, était de treize à quatorze lieues. — On remarquera que la description d’Hérodote est confirmée de plusieurs manières, et notamment par les traces du canal creusé ou recreusé par les Perses depuis les lacs Amers jusqu’aux environs de Suez. Entre ces deux points la Commission d’Egypte a

découvert des ruines et des inscriptions, surtout dans le voisinage de Chalouf, près de l’ancien canal (appelé aujourd’hui canal des Pharaons), qui fut retrouvé par le général Bonaparte. » E. Lefébure, Les fouilles de M. Naville à Pithom, dans la Revue des religions, t. xi, 1885, p. 322. Les traces de ce dernier canal semblent montrer que cinq cents ans avant J.-C. les lacs Amers et le lac Timsah étaient séparés et ne différaient guère de ce qu’ils sont aujourd’hui. — Strabon, XVII, i, 26, fait franchir au canal les lacs Amers : êtappet il y-où Sià twv urapôiv xaXou|iév<i)v Xifivwv. Et il nous k représente ces lacs comme dessalés par le canal soit qu’il prenne quelque partie pour le tout, soit qu’il confonde les lacs avec le canal lui-même, qui était large et poissonneux. » E. Lefébure, loc. cit., p. 323. — Pline, qui suit Strabon et d’autres auteurs, compile sans bien comprendre et semble même faire partir le canal de la mer Rouge pour venir aboutir aux lacs, usque ad fontes amaros. H. N., vi, 33. Quoi qu’il en soit, Strabon et Pline nous montrent le canal se prolongeant bien plus loin que l’Ouadi Toumilat à travers des lacs qu’ils distinguent de la mer Rouge. Philadelphe, dans la stèle de Phithom, parle du « Grand lac noir », Kemour, et du « lac du Scorpion » (Timsah actuel) comme étant navigables et communiquant par le canal avec la mer Rouge, ce qui permettait aux marchandises du pays des Troglodytes de venir débarquer dans le lac Timsah, pi. x. On ne peut donc accorder à M. Naville que le canal se soit borné à l’ouadi Toumilat. Les lacs Amers de Pline et de Strabon ne peuvent se placer que dans le site actuel de ce nom et ils correspondent, semble-t-il, au grand lac noir de Ptolémée II. Par conséquent, si plus loin Strabon, XVII, iii, 20, dit qu’Héroopolis est sur le golfe arabique, si Pline le répète avec lui, loc. cit., nous ne devons pas les prendre à la lettre, pas plus que nous ne prenons à la lettre Josèphe disant que la mer Rouge s'étend jusqu'à Coptos, qui est sur le Nil. De Bell, jud., IV, x, 5. « Les Anciens, qui appelaient nier toute grande étendue d’eau, ont regardé les lacs Amers et leur canal tantôt comme faisant partie et tantôt comme ne faisant pas partie de la mer Rouge. On ne peut même comprendre autrement le passage où Aristote dit que Sésostris, le premier, essaya de canaliser la mer Rouge, T-qv ÊpuSpàv Qâlavzav 2nsipiôri Siopijttîiv. Metereolog. i, 14. Les lacs Amers étaient une mer intérieure à peine séparée de l’autre, si bien que l’on pouvait les réunir toutes les deux sous un même nom, quand le sujet n’exigeait pas une précision d’ailleurs peu conforme aux habitudes de l’antiquité. » E. Lefébure, loc. cit., p. 324. Quant aux auteurs qui avec Artémidore font partir les navires d’Héroopolis pour la terre des Troglodytes, cela ne préjuge en rien la question des lacs. Héroopolis était la dernière ville d’Egypte, la plus connue, que l’on rencontrait avant de s’engager dans les lacs reliés à la mer Rouge. On pouvait donc dire que la navigation commençait à cette place. Il n’y a pas d’autre conséquence à en tirer. On ne peut rien tirer non plus du Clysma que la seconde inscription latine de Phithom place à neuf milles d’Ero. Clysma signifie port et pouvait convenir à bien des localités différentes, comme les mots Migdol et Sérapéum. Ce Clysma était quelque part sur le lac Timsah et différait de l’autre Clysma que l’Itinéraire d’Antonin place sur la mer Rouge à soixante huit milles d’Héroopolis. Reste le texte d’Agathémère qui pourrait recevoir la même explication que les autres textes. Mais il faut remarquer de plus que cet auteur copie Eratosthène. Celui-ci, dans Strabon, XVI, iv, 4, dit que l’on a à sa droite la Troglodytique quand on longe la côte depuis Héroopolis : oirsp ! <rtiv âv 8eE13 .aTroiiXéo’jffiv àno 'Hpwwv uôXeoiç. Il fait donc simplement Héroopolis le point de départ de la navigation, tandis qu’Agathémère change les mots concernant