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PHÉNIGIE


(fig. 57), au delà des colonnes d’Hercule, sur le rivage de l’Atlantique, marque un nouvel élan et une hardiesse plus grande qu’auparavant dans les entreprises commerciales et dans le rayon d’action de la Phénicie. Ce furent les Tyriens qui effectuèrent les plus longs voyages, Hérodote, i, 1, et qui cherchèrent à nouer le plus de relations pour ouvrir à leur commerce toute espèce de débouchés. L’histoire sainte nous en fournit des exemples remarquables. Lorsque David fut acclamé roi à Hébron, Abi-Baal occupait le trône de Tyr (fig. 58). Dius,

57. — Monnaie de Gadès.

Tête d’Alexandre le Grand. — S|. Meba’alé Agadir. « Des citoyens de Gadès ». Deux poissons.

Fragm. n ; Ménandre, Fragm. i, dans Histor. Grœc. fragm., édit. Didot, t. iv, p. 398, 446. Cf. Josèphe, Cont. Apion., i, 17, 18. Il eut pour successeur son fils Hiram, âgé de dix-neuf ans. lbid. Celui-ci semble avoir discerné promptement les hautes qualités de David et le profit qu’il pourrait tirer de son alliance, Peu après la prise de Jébus par le jeune roi, il lui envoya des ambassadeurs avec des cèdres du Liban, des maçons et des charpentiers pour lui bâtir un palais. I Par., xiv, 1. Cf. II Reg., Vil, 2. Les bonnes relations durèrent

58. — Sceau en sardoine ayant appartenu bï3 >3 ! <S à « Abi-Baal. » Musée de Florence. Grossi au double.

pendant tout leur règne. III Reg., v, 1. Lorsque David prépara les matériaux pour la construction du temple de Jérusalem, les sujets d’Hiram, Sidoniens et Tyriens, « lui apportèrent beaucoup de cèdres. » I Par., xxii, 4. Sous son fils Salomon, les rapports devinrent encore plus étroits. À la mort de David, Hiram lui envoya une ambassade. III Reg., v, 1 ; Josèphe, Ant. jud., VIII, n, 6, et Salomon en profita pour lui demander son concours dans l’œuvre de la construction du Temple. Josèphe reproduit les lettres qu’il dit avoir été échangées entre les deux monarques en cette circonstance ; il assure qu’elles étaient conservées dans les archives de Tyr et de Jérusalem. Ant. jud., VIII, ii, 7-8. Il leur fut facile de s’entendre. Les Phéniciens avaient tout intérêt à vendre leur bois du Liban et à recevoir en x échange les denrées qui abondaient en Palestine, et dont la -Phénicie avait besoin pour sa nombreuse population. L’accord fut conclu à ces conditions : Salomon fournirait annuellement, pendant la durée du contrat, 20000 cors d’orge, autant de froment, 20000 baths d’huile et la même quantité de vin. III Reg., v, 3-12.

Les Phéniciens donneraient en échange les bois nécessaires et les ouvriers qui dirigeraient et exécuteraient les travaux de construction et de décoration. Hiram avait fait élever lui-même des temples à ses dieux, Melkarth et Astoreth, Ménandre, Fragm. i, p. 44<5 ; il envoya au roi d’Israël un excellent architecte qui s’appelait aussi Hiram.

La construction du temple de Jérusalem et au palais royal dura vingt ans. III Reg., vi, 38 ; vii, 1 ; cf. ix, 10. Quand tout fut achevé, Salomon, pour reconnaître les services que lui avait rendus Hiram, lui céda de son propre gré vingt villes de Galilée, dans le voisinage d’Acho, qui faisait probablement partie du royaume de Tyr. À cause de ce voisinage, elles semblaient donc devoir être à la convenance du roi phénicienn, mais elles étaient placées sur un plateau nu et désolé, qui déplut au prince tyrien ; il exprima son mécontentement en donnant au territoire le nom de Chabul, « rebut, balayures. » III Reg., ix, 10-13. Voir Chabul, t. ii, col. 473. Leur amitié mutuelle n’en fut pas d’ailleurs rompue pour cela. Saint Justin, Dial. curn Tryph., 34, t. xi, col. 549, reproche â Salomon d’avoir adoré les idoles à Sidon. Ménandre, Fragm. ii, p. 447 (dans Clément d’Alexandrie, Strom. i, 21, t. viii, col. 840), raconte que le roi de Tyr lui donna une de ses filles en mariage. Cf. III Reg., xi, 1 (Sidoniennes). Quoi qu’il en soit de ces faits, il est certain que les deux rois s’entendirent pour aller faire un commerce fructueux à Ophir. Voir Ophir 2, col. 1289. Les Phéniciens étaient les maîtres de la Méditerranée, mais il ne l’étaient pas de la mer Rouge. Ils fournirent des matelots au roi de Juda qui mit à profit leur habileté dans le golfe Persique, III Reg., ix, 26, ce qui les enrichit les uns et les autres.

Hiram mourut à l’âge de 53 ans, après un règne de 33 ans. Il eut pour successeur son fils Baléazar. Ménandre Fragm. i, p. 446. Après lui, le trône fut occupé par Abd.-Asboreth, qui périt de mort violente. Dans l’espace de 34 ans, trois rois moururent assassinés et la dynastie régnante fut changée trois fois, Ithobal ou Eth-Baal, en montant sur le trône, y ramena la tranquillité. Il était en môme temps grand-prêtre d’Astoreth. Il fit alliance avec Achab, roi d’Israël, et lui donna sa fille Jézabel en mariage. III Reg., xvi, 31. Ménandre lui attribue la fondation de Botrys, sur la côte, au nord de Gebal. Fragm. iv, p. 447. En fondant cette ville, Ithobal avait peut-être pour but de se défendre contre l’Assyrie qui était alors pour la Phénicie une menace perpétuelle.

Ithobal eut pour successeur son fils Balezor ou Baal-asar, et celui-ci, son fils Matgen ou Mattan. Tyr était alors divisée entre le parti aristocratique et le parti populaire. Justin, Hist. Phil., xviii, 5. Mattan craignait que le parti populaire ne l’emportât. Pour l’empêcher, il donna sa fille Élisa à son frère Sicharbas, grand-prêtre de Melkarth, qui épousa ainsi sa nièce et de la sorte devint l’héritier présomptif du royaume. À sa mort, Mattan laissait un fils appelé Pygmalion, âgé de 8 ou 9 ans. Le parti populaire le choisit pour son roi, et Sicharbas et Élisa rentrèrent dans la vie privée. Au bout de sept ans, le jeune Pygmalion fit tuer son beau-frère, qui était en même temps son oncle. Élisa (Didon), sa sœur, réussit à lui échapper et se sauva avec une flotte d’abord en Chypre, puis en Afrique où elle bâtit la ville devenue si célèbre sous le nom de Carthage, 143 ans après la construction du temple de Jérusalem, raconte Josèphe, "pont, Apion., i, 18. Sur ce récit, cf. la critique de O. Meltzer, Gesckichte der Karthager, 1870, p. 111-141 ; G. Rawlinson, Phœnicia, p. 122-126.

Voici la liste des rois de Tyr depuis Hiram jusqu’à Pygmalion, avec les années de leur règne, d’après Pietschmann, Geschichte der Phônizier, p. 299. Ménandre,