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VULGATE

canonicis Scripturis, de editione et usu sacrorum librorum, sess. IV.

Définition. — La Vulgate latine est composée d’éléments d’origine et de nature différentes. Il y en a de trois sortes : 1. les uns proviennent des anciennes versions latines, probablement de l’Italique, non révisée par saint Jérôme : ce sont les livres deutérocanoniques de l’Ancien Testament, à l’exception de Tobie et de Judith qui rentrent dans la troisième catégorie ; 2. les autres font partie de la révision que le saint docteur a faite des versions antérieures, notamment de l’Italique : ce sont tous les livres du Nouveau Testament et le Psautier dit gallican ; 3. les derniers enfin appartiennent à la version nouvelle que le même docteur a faite sur les textes originaux, hébreu ou chaldéen : ce sont tous les livres protocanoniques de l’Ancien Testament, sauf le Psautier, les livres de Tobie et de Judith et les parties deutérocanoniques de Daniel et d’Esther. La Vulgate latine est donc, dans sa majeure partie, l’œuvre de saint Jérôme.

II. Origine et caractères de ces divers éléments. — 1° Livres provenant des anciennes versions latines. — Saint Jérôme n’a retouché ni la Sagesse ni l’Ecclésiastique, ni Baruch, qu’il a laissé de côté à dessein, ni probablement les deux livres des Machabées. Voir t. iv, col. 99. La version antérieure de ces livres a donc continué à être lue et employée dans l’Église latine et elle est demeurée dans la Vulgate. Sur les caractères de cette ancienne version, voir t. iv, col. 97 sq., et sur les manuscrits et éditions de ces livres non révisés, voir ibid., col. 105-106.

Livres des anciennes versions revisés par saint Jérôme. — Pour la biographie de saint Jérôme, voir t. iii, col. 1305-1306. Durant son séjour à Rome auprès du pape saint Damase, dont il était le secrétaire, Jérôme fut chargé par ce pape de reviser la version latine qui était alors en usage à Rome. L’Église romaine n’avait pas de texte officiel et le plus grand désaccord existait dans les manuscrits au point que le saint docteur pouvait écrire : Tót sunt exemplaria pene quot codices, et il indiquait trois sources de divergences : 1. la multiplicité des versions dont quelques-unes étaient mauvaises ; 2. les corrections qu’y introduisaient des correcteurs présomptueux et malhabiles et qui les rendaient plus mauvaises encore ; 3. des additions ou omissions, faites par des copistes négligents. In Evangelia ad Damasum prœfatio, t. xxix, col. 525-527. La revision des Évangiles fut faite en 383 ; celle du reste du Nouveau Testament de 384 à 385. Epist. lxxi, ad Lucinium, 5, t. xxii, col. 671-672 ; De viris, 135, t. xxiii, col. 717-719. Saint Jérôme a pris pour base le texte italique du Nouveau Testament, voir t. ii, col. 115-118, dans la forme même (ou au moins dans une forme très semblable) du Codex Brixianus, f, et du Codex Monacensis, q, pour les Évangiles. Voir t. iv, col. 107, 109. Il l’a corrigé, non pas d’après des manuscrits latins, mais d’après des manuscrits grecs anciens. Or, Wordsworth et White ont déterminé, par la comparaison des passages corrigés, que saint Jérôme avait à sa disposition, pour les Évangiles, des manuscrits grecs de deux sortes : les uns semblables à N, B, L et partiellement à D, et les autres d’une famille différente, dont il ne nous est parvenu aucun représentant, et pour les Actes des Apôtres, non des manuscrits de la recension occidentale, mais des témoins de la recension orientale, semblables à ii, A, B, C. Novum Testamentum D. N. J. C. latine, t. i, fasc. 5, Oxford, 1898, p. 653-672 ; t. ii, fasc. 1, Oxford, 1905, p. x-xiii. Cf. E. Mangenot, Les manuscrits grecs des Évangiles employés par saint Jérôme (extrait de la Revue des sciences ecclésiastiques, janvier 1900). Saint Jérôme remplace des leçons italiennes par de meilleures leçons grecques, en empruntant peut-être parfois les termes latins aux autres versions latines qui avaient ces leçons. Toutefois il n’a pas appliqué partout sa méthode avec la même rigueur et la même perfection. Sa correction de l’Italique est complète dans les deux premiers Évangiles et dans la première partie du troisième. Dans la seconde partie de saint Luc et dans les premiers chapitres de saint Jean, il s’est borné à corriger le style et il a gardé les leçons du Brixianus. Dans le reste du quatrième Évangile, il a suivi une voie moyenne. L’Amiatinus et le Fuldensis sont les meilleurs représentants de sa version des Actes. Pour les Épîtres, l’auteur a adopté peu de leçons grecques et il s’est contenté de polir le texte latin et de le rendre plus élégant. Voir t. iii, col. 1306-1307.

M. H. von Soden est arrivé aux mêmes conclusions que les critiques anglais. Il les a complétées et mises en rapport avec ses vues personnelles sur le texte grec du Nouveau Testament. Voir col. 2122. Dans les Évangiles, saint Jérôme a amélioré l’Itala pour le style, quand cela lui a paru nécessaire, et pour le fond, quand, comparaison faite avec le texte grec, l’écart de la version latine lui apparaissait trop fort. Il a donc gardé des leçons de l’Itala. Il ne semble pas avoir pris en considération les textes latins africains. Le texte grec, suivi par lui, est celui de I H K. et non pas celui des recensions I, H, K. Saint Jérôme méprisait H et K et il ne voyait en elles que des perversions du texte grec. Præfatio ad Damasum, t. xxix, col. 527. On ne trouve dans son texte aucune des leçons propres à I. Si le saint docteur a connu le Diatessaron de Tatien, il lui a reconnu peu d’autorité. Le texte grec qu’il suivait était donc le meilleur texte qui ait eu cours alors. Quant au style, il choisissait de nouveaux, mots latins pour rendre les leçons grecques. Quelques traductions libres ont été rapprochées par lui du texte original. Enfin, l’orthographe a été modifiée. Le récit de la femme adultère, qui manquait dans les textes africains et italiens, aurait été introduit par saint Jérôme dans la version latine d’après les manuscrits grecs. Die Schriften des Neuen Testaments, § 350, 351, Berlin, 1906, t. i, p. 1524-1534. Pour les Actes des apôtres, le texte grec, suivi par saint Jérôme, est encore celui de IHK. Quand on trouve des leçons propres de K ou plus rarement de I, elles ne viennent pas de ces recensions, mais des anciennes versions latines. Ces dernières ont fourni encore des leçons qui portent des traces de l’influence des passages parallèles. Cependant quelques leçons particulières viennent de documents grecs. Ibid., § 442, p. 1798-1802. Dans les Épîtres de saint Paul, saint Jérôme a suivi principalement l’ancien texte latin, et quand il s’en éloigne, il est d’accord encore avec IHK. Il n’a pas eu ici un texte grec différent de celui qui nous est connu, et ce texte était parfois accidentellement d’accord avec K. Ibid., § 512, p. 2010-2011. Quant à l’Apocalypse, le texte de l’Itala est demeuré dans la Vulgate, et saint Jérôme a fait peu d’emprunts aux manuscrits grecs. Les leçons étrangères à IHK n’étaient pas dans l’œuvre du saint docteur ; elles ont pénétré dans les manuscrits de la Vulgate. Le texte de la Vulgate est donc, pour l’Apocalypse, un très bon témoin du texte grec répandu avant la formation des recensions de ce livre. Ibid., § 546, p. 2087-2088.

Vers le même temps, en 383-384, saint Jérôme revisa à Rome le Psautier sur le texte grec des Septante. Il le fit rapidement (cursim). Præfatio, t. xxix, col. 117-119. Ce texte fut adopté en Italie et dans la liturgie romaine jusqu’au pontificat de saint Pie V, et c’est pourquoi il a été nommé Psautier romain. Ses leçons se lisent aujourd’hui encore dans les anciennes Messes du missel, dans l’invitatoire, les antiennes et les répons du Bréviaire. On le récite encore à la basilique Saint-Pierre de Rome. Il n’est pas entré dans l’édition officielle de la Vulgate.

Plus tard, à partir de 387, saint Jérôme revisa à