Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/1250

Cette page n’a pas encore été corrigée
2439
2440

VIRGINITÉ — VISION


mais parce qu’elle ne doit pas aboutir au mariage. L’idée de la virginité volontaire n’apparaît qu’avec l’Évangile, en la personne de Marie, Luc, i, 34, qu’imiteront ensuite les vierges chrétiennes. — Ézéchiel, xxm, 3, accuse les deux sœurs, Samarie et Jérusalem, d’avoir prostitué leur virginité. — La loi supposait qu’un mari pouvait contester la virginité de sa jeune épouse. Les parents de celle-ci produisaient alors, devant les anciens, les signes de la virginité de leur fille, appelés aussi befûlîm. La présentation de ces preuves, qui étaient déployées, entraînait pour le mari une amende de cent sicles d’argent à verser au père et à la mère, et la perte du droit de répudiation. Dans le cas où les preuves en sa faveur faisaient défaut, la jeune femme était lapidée. Deut., xxii, 13-21. Chez les Hébreux, comme chez d’autres peuples anciens, existait donc l’obligation, pour le jeune marié, la nuit même des noces, de transmettre aux parents de l’épouse, qui attendaientau dehors, un linge ensanglanté qui constituait une preuve de la virginité et que ceuxci pouvaient plus tard produire en témoignage. C’était une sûreté qu’aimaient à se donner les Orientaux et dont leurs mœurs s’accommodaient. Chez les Arabes, le nouveau marié, après avoir reçu sa femme dans sa tente, « sort avec un mouchoir ensanglanté à la main, qu’il va montrer aux parents et aux amis assemblés. » De la Roque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718, p. 226. Cf. de Hummelauer, In Deuteron., Paris, 1901, p. 400 ; Piérotti, La Palestine actuelle, Paris,

1865, p. 252.

H. Lesêtre.

VISAGE. Voir Face, t. ii, col. 2165.

    1. VISION##

VISION (hébreu : fyâzôn, lyâzât, Ifizâyôn, hîdâh, mahâzéh, mar’éh, mar’âh ; chaldéen : fypzév ; Septante : 8p « [ia, ôxcauta ; Vulgate : visio, visus), phénomène surnaturel au moyen duquel Dieu montre ce qu’il veut faire savoir ou faire dire.

I. Sa nature. — 1° Dieu communique de trois manières dillérentes, mais non exclusives l’une de l’autre, ce qu’il veut faire entendre. La vision peut être corporelle, quand un objet extérieur frappe les sens, comme quand Moïse voit le buisson ardent, Exod., iii, 3 ; imaginative, quand la représentation surnaturelle saisit l’imagination sans le secours des sens, comme quand Ézéchiel, I, 4-28, a la vision des quatre êtres à face d’homme, de lion, de taureau et d’aigle ; intellectuelle, quand la communication divine ne s’adresse qu’à l’intelligence, comme dans la prophétie des semaines. Dan., ix, 20-27. La vision intellectuelle peut subsister seule, mais les deux autres la supposent toujours ; autrement, elles seraient inintelligibles. Les trois formes peuvent d’ailleurs être liées ensemble. Ainsi, dans le mystère de l’annonciation, Marie a la vision sensible de l’ange, la vision imaginative de l’ombre du Saint-Esprit la couvrant pour la rendre mère, et la vision intellectuelle de la volonté divine qui attend son consentement. Luc, i, 28-38. Les mages ont la vision sensible de l’étoile et la vision intellectuelle de sa signification. Matth., ii, 2. Saint Pierre a la vision imaginative de la nappe pleine d’aliments divers et la vision intellectuelle de la volonté de Dieu par rapport à Corneille. Act., x, 11, 19, 20. — 2° La vision surnaturelle est essentiellement objective, c’est-à-dire ayant une cause réelle indépendante de l’esprit de l’homme. Elle produit en celui qui la reçoit la conviction que Dieu même est intervenu. Elle se distingue ainsi des visions que s’attribuent les faux prophètes, et qui ne sont que ténèbres et Snensonge, Mich., iii, 6 ; Jer., xxiii, 16 ; Zach’., jkiji, 4, des songes ordinaires, qui n’ont qu’une cause subjective, et de ces représentations fugitives et inconsistantes qui saisissent l’esprit pendant la nuit sans laisser ; de traces. Job, xx, 28 ;

Is., xxix, 7. — Elle se distingue aussi de la parole que Dieu adresse directement à quelqu’un, pour lui révéler ses pensées et ses ordres. Cette distinction est expressément notée au sujet de Moïse. « Si vous avez quelque prophète, c’est en vision que je me révèle à lui, c’est en songe que je lui parle. Tel n’est pas mon serviteur Moïse… Je lui parle bouche à bouche, en me faisant voir, et non par énigmes. » Num., xii, 6-8. — 3° Les visions se produisent habituellement la nuit, alors que l’attention de l’âme n’est pas distraite par le spectacle des objets extérieurs. Gen., xl vi, 2 ; Job, iv, 13 ; vii, 14 ; xxxiii, 15 ; Dan., vii, 7, 13 ; Act., xvi, 9 ; xviii, 9. Elles peuvent se présenter sous forme de songes d’origine surnaturelle, comme ceux du pharaon d’Egypte, Gen., xli, 1-7, et de Nabuchodonosor. Dan., ii, 3, 27, 28 ; iv, 7-15. D’autres fois, les visions sont précédées de l’extase. Act., x, 17 ; II Cor., xii, 1-4. La vision surnaturelle peut aussi apparaître à quelqu’un en plein jour. Luc, i, 22 ; Matth., xvii, 9 ; Luc, xxiv, 23 ; Act., xxvi, 19. Mais, pour l’ordinaire, il est parlé des visions sans qu’aucun renseignement soit donné sur l’état du sujet qui les reçoit. Dieu les accorde donc sans s’assujettir à aucune condition particulière. — 4° Les visions surnaturelles ne sont pas l’apanage exclusif des saints personnages. D’autres en peuvent recevoir, comme Balaam, Num., xxiv, 4, 16 ; Baltasar, Dan., v, 5, 6 ; Héliodore, II Mach., iii, 25, 26 ; la femme de Pilate. Matth., xxvii, 19 ; etc. — 5° Il peut se faire que la vision soit, pour celui qui la reçoit, purement corporelle ou imaginative, et que l’explication intellectuelle en soit donnée par un autre, comme il arriva pour les songes du pharaon et de Nabuchodonosor. Parfois, la vision demeure comme un « livre scellé », dont l’intelligence est impossible à cause de l’indignité de ceux qui devraient comprendre. Is., xxix, 11-12. Le prophète ne donne pas non plus toujours l’explication de la vision dont il a été favorisé. Tels Ézéchiel, i, 4-28 ; Daniel, x, 4-xi, 45 ; saint Jean, dans l’Apocalypse, etc.

II. Les visions bibliques. — 1° La Sainte Écriture raconte d’une manière anthropomorphique comment Dieu parle à Adam, Gen., ii, 16, 22, 23 ; iii, 9 ; àCaïn, iv, 6, 10, 15 ; à Noé, vi, 13. Il parla à Abraham en vision. Gen., xv, 1. — Abraham et Lot ont la vision corporelle des anges qui leur parlent au nom de Jéhovah. Gen., xviii, 1-xix, 3. Jacob a une vision à, Béthel pendant son sommeil, et voit l’échelle sur laquelle les anges montent et descendent. L’explication de ce symbole n’est pas donnée. Gen., xxviii, 12-15. Il rencontre ensuite des anges. Gen., xxxii, 1, 2. Il a plus tard une vision de nuit, dans laquelle il est encouragé à descendre en Egypte. Gen., xlvi, 2. — Moïse reçoit sa vocation dans la vision du buisson ardent. Exod., m, 3. Balaam contemple la « vision du Tout-Puissant », qui lui révèle les destinées d’Israël. Num., xxiv, 4, 16. Gédéon a la vision de l’ange. Jud., VI, 12. La mère de Samson a une vision semblable. Jud., xiii, 3. À l’époque d’Héli, la vision n’était pas fréquente. I Reg., iii, 1. C’est alors que Samuel a sa vision de nuit dans le sanctuaire et que le Seigneur lui indique le châtiment qui va fondre sur Israël. I Reg., iii, 4-14. À partir de ce moment, « Jéhovah continuait d’apparaître à Silo, et se manifestait à Samuel en lui faisant connaître sa parole. » I Reg., iii, 21 ; Ps. lxxxix (lxxxviii), 20. Nathan a une vision de nuit, qu’il est chargé de rapporter à David. II Reg., vii, 4-17. David a la vision de l’ange qui déchaîne le fléau sur son peuple. II Reg., xxiv, 17. Dans une vision à Gabaon, Jéhovah accorde le don de la sagesse à Salomon. III Reg., iii, 4-15. Dans une seconde vision, il lui promet la stabilité de son trône, s’il est fidèle. III Reg., viii, 2-9. — 2° Dieu multiplie ses visions aux prophètes. Ose., xii, 1. Il y a ainsi les visions d’Addo le voyant