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TIMOTHÉE (PREMIÈRE ÉPITRE A)


Trophime à Milet, s’il s’agit du voyage de la troisième mission, quand on voit plus loin, dans les Actes, xxi, 29, que Trophime accompagne Paul à Jérusalem ? On ne voit pas non plus, si Paul n’est pas repassé à Troade depuis l’an 58, pourquoi il redemande des livres et un manteau laissés depuis près de huit ans chez Carpus. Est-il explicable que, parmi tant de messagers venus d’Asie Mineure ou de Macédoine, aucun n’ait eu l’occasion de les lui rapporter ?

VIII. Situation historique. — D’après le contenu de la lettre, Paul, allant en Macédoine, vient de passer quelque temps à Éphèse, en compagnie de Timothée, qu’il laisse à la tête de la communauté, avec mission de s’opposer aux diverses erreurs qui commencent à s’y glisser, i, 3. À peu d’intervalle de là, lui arrivent, de la métropole d’Asie, des nouvelles très fâcheuses. Timothée, avec son naturel timide, iv, 12, et un état de santé des plus précaires, rencontrait, dans l’exercice de sa charge, toutes sortes de difficultés. Paul lui écrit alors, pour le guider et le soutenir au milieu de l’épreuve, cette première lettre où il lui rappelle les directions qu’il lui a précédemment données. L’idée centrale de ces quelques pages est tout entière dans le ꝟ. 15 du chap. m : l’va EtSvjç ir<5 ; Stï èv oîxo> ©eoO àvxsTpé<pss6ai.

IX. Temps et lieu de la rédaction. — L’opinion sur ces deux points dépend, en grande partie, de celle que l’on adopte par rapport à l’authenticité de l’Épître elle-même. Or, d’après ce qui a été établi plus haut, il faut placer cette première lettre vers l’année 64 ou 65, c’est-à-dire dans la période d’activité apostolique qui sépare les deux captivités de l’Apôtre. On peut donc conjecturer qu’elle a été écrite en Macédoine, pendant la tournée pastorale qu’y fit Paul au sortir de son premier emprisonnement, 1, 3.

X. Intégrité. — Aucun soupçon ne s’est jamais élevé autrefois à cet égard. Les doutes ne commencent qu’avec la mise en cause de l’authenticité. Ceux qui cherchent à trouver dans ces lettres des billets authentiques adressés par saint Paul à Timothée distinguent, d’une façon plus ou moins arbitraire, les parties dues à la plume de l’Apôtre et celles qui ont été ajoutées, beaucoup plus tard, par une main étrangère. Le travail le plus original et le plus complet, à ce point de vue, est celui de Knoke, Comm. in den Past., 1889, qui croit avoir retrouvé des éléments primitifs de cette première lettre dans trois lettres antérieures, dont deux de Paul à Timothée et la troisième due à un auteur inconnu du IIe siècle, qui aurait fondu ensemble ces trois écrits, dans le but de mettre sous le patronage vénéré d’un Apôtre bien connu les institutions ecclésiastiques qui commençaient à fleurir dans les communautés chrétiennes de l’Asie. Harnack, Chron., p. 482, 484, pense que iii, 1-13 ; v, 17-20, sont des fragments qui ne peuvent être antérieurs à l’an 138. Ce ne sont que des affirmations sans preuves.

XI. Analyse du contenu. — r. prologue, i, 1-2. — L’en-tête de cette lettre’est simple, bref et sans phrase, comme on pouvait l’attendre d’un maître écrivant à un disciple et à un collaborateur de tous les instants. Le titre d’Apôtre se trouve associé au nom de Paul non dans un but apologétique, mais uniquement pour rappeler à Timothée à quel titre il doit recevoir cet ensemble de règles et de mesures administratives, surtout de quelle source dérive l’autorité qu’il lui a déléguée. Le Christ est appelé « notre espérance » pour écarter sans doute les fausses perspectives de ceux qui, amusant les fidèles avec des rêveries extravagantes, leur faisaient perdre de vue les grandes vérités du christianisme.

il. corps se l’épure, i, 3- vi, 19. — Sans prétendre enfermer les idées de la lettre dans un cadre trop rigide, il semble qu’on peut cependant y distinguer deux

parties principales qui s’appellent et se répondent. Dans l’une, il est surtout question de ce que Timothée doit faire sur-le-champ, à Éphèse, au nom de l’Apôtre et comme son délégué ; dans l’autre sont indiqués les devoirs habituels du même Timothée comme pasteur d’âmes.

A) 1° partie. — Le mandat confié à Timothée, i, 3m, 16. — 1° S’opposer aux fausses doctrines, i, 3-20.

— Les ordres à exécuter, de la part de saint Paul, ont été dictés par la situation grave où se trouvait l’Église d’Éphèse au moment où l’Apôtre se rendait en Macédoine. Les sombres pressentiments dont il avait fait part aux anciens, dans son discours de Milet, Act., xv, 29-30, ne s’étaient que trop réalisés. Des doctrines étranges circulaient dans la communauté. Il était de toute nécessité de s’opposer à leur diffusion. Timothée reçut donc comme première tâche de dénoncer le péril de ces nouveautés malsaines, dont le danger est ici, avant tout, d’ordre moral. Le reproche à leur faire est de volatiliser en chimères puériles la vertu sanctifiante de l’Évangile. En effet, elles s’éloignent de l’enseignement reçu dans l’Église (éTe ?o818aoxa), E ! v), se perdent en mythes et en généalogies interminables, peut-être au sujet de certains personnages ou de certains faits de l’histoire sacrée ; ce sont des légendes rabbiniques, dans le genre de celles du Talmud ; elles provoquent des discussions stériles (ÇriTTi<reiç), détournent la doctrine évangélique de son vrai but, qui est de promouvoir l’œuvre de Dieu, exaltent à tort et à travers la Loi ancienne, obscurcissent l’éclat de l’Évangile. Aussi l’Apôtre enjoint-il à son disciple, au nom même de la consécration solennelle qui l’a voué au saint ministère, de combattre ces erreurs pernicieuses et de poursuivre l’œuvre de préservation qu’il a lui-même inaugurée en rejetant de l’Église les deux principaux fauteurs de ces doctrines, Hyménée et Alexandre.

2° Veiller à la célébration du culte, ii, 1-15. — De la doctrine l’Apôtre passe à la réglementation du service religieux. Là encore il y avait à reprendre et à corriger. Une première recommandation semble s’inspirer des circonstances politiques du moment. Si l’on prescrit de prier pour les autorités romaines, c’est qu’on a pour cela, quelque part, des répugnances spéciales. On est à la veille de la guerre de Judée et au lendemain des massacres de Néron. Paul base son conseil sur les principes de son universalisme : l’unité de Dieu et l’unité du Sauveur. Si Dieu veut le salut de tous les hommes, des bons comme des méchants, des justes comme des pécheurs, nous n’avons pas à nous montrer plus sévères que lui. Il est prescrit aux hommes de n’élever vers le ciel que des mains pures, exemptes de souillure morale, ef de ne s’approcher de Dieu qu’avec des sentiments pacifiques, allusion discrète à des querelles intestines dans l’Église d’Éphèse. Aux femmes sont données des prescriptions qui rappellent, sur quelques points, celles qui avaient été adressées aux Corinthiens, I Cor., xi, 3-15, relativement à la tenue extérieure dans les assemblées liturgiques.

3° S’appliquer à bien choisir le personnel ecclésiastique, m, 1-13. — À cet effet, l’Apôtre trace la liste d’irrégularités qui doit servir d’indication à Timothée pour écarter les indignes des fonctions saintes. Les règles qu’il donne visent d’abord l’évêque (m, 1-7) qui, en raison de la grandeur de sa charge, doit être, pour tous, un modèle de perfection. Il doit avoir non seulement les qualités d’un pasteur d’âmes, mais aussi celles d’un intendant temporel. Celui qui brigue une si belle fonction doit être irrépréhensible tant aux yeux des fidèles qu’à ceux du dehors, n’avoir été marié qu’une seule fois, être sobre, chaste, aimable, hospitalier, capable d’enseigner. Il ne doit pas être violent mais, au contraire, se montrer doux, pacifique, désintéressé, exempt d’avarice. Sa famille doit être grave comme lui ;