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TEXTE DU NOUVEAU TESTAMENT

les manuscrits anciens du ive et du ve siècle. Ibid., p. 94-231 ; Origène et la critique textuelle du Nouveau Testament (extrait de la Revue des questions historiques, janvier 1885, t. xxxvii, p. 1 sq.), Paris, 1885.

Maintenant que les citations du Nouveau Testament, faites par Origène, sont mieux connues, ayant été étudiées méthodiquement dans les manuscrits, et non plus dans les éditions imprimées, par E. Hautsch, De quatuor Evangeliorum codicibus origenianis, Gœttingue, 1907 (sur saint Marc et saint Jean) ; Die Evangeliencitate des Origenes, dans Texte und Untersuchungen, Leipzig, 1909, t. xxxiv, fasc. 2 a, il est plus facile de se rendre un compte exact du rôle d’Origène dans la critique textuelle du Nouveau Testament. En ne tenant pas compte des citations, faites souvent de mémoire et plus ou moins librement, parce qu’elles ne représentent pas toutes le manuscrit dont se servait cet écrivain, on se trouve en présence du texte reproduit dans les commentaires des livres du Nouveau Testament. Or, si on consulte les manuscrits, on constate que ce texte ne répond pas toujours aux explications du commentaire ; ce qui prouve qu’il a été modifié ou corrigé par les copistes. Dans l’ensemble, le texte d’Origène ressemble à celui des plus anciens onciaux et des meilleurs cursifs, mais on ne peut dire que ces manuscrits soient des recensions faites sur les commentaires d’Origène. M. von Soden a précisé davantage encore la situation. Pour les Évangiles, les nombreuses citations, faites de mémoire et librement, constituent des paraphrases du texte, des combinaisons diverses de passages parallèles et contiennent des modifications et des additions, nécessitées souvent pour relier le texte au contexte. Ces combinaisons sont fréquentes, surtout pour saint Matthieu et pour saint Marc. Elles varient de forme, et, quoiqu’elles changent le texte, elles modifient rarement le sens. Plusieurs combinaisons qui proviennent du mélange des passages parallèles et dont quelques-unes sont dues à l’influence, au moins indirecte, de Tatien, ont passé dans les manuscrits et chez des Pères postérieurs. On en trouve dans les trois recensions du IVe siècle, et elles y sont venues des livres d’Origène. D’autre part, Origène a fait lui-même des corrections en quelques passages des Évangiles. Le Père Lagrange a étudié tout particulièrement les trois leçons Βηθαϐαρᾶ, Joa., i, 28, Γεργεσηνῶνv, Matth., viii, 28, et la distance d’Emmaüs à 160 stades, Luc, xxiv, 13. Origène, la critique textuelle et la tradition topographique, dans la Revue biblique, 1895, t. iv, p. 501-524 ; 1896, t. v, p. 87-92. Mais, décompte fait de ces corrections, qui sont souvent arbitraires, et des combinaisons de passages parallèles, le texte des Évangiles, commenté et cité par Origène, est substantiellement le texte I-H-K, antérieur aux trois recensions du IVe siècle. Origène ne connaît aucune des leçons particulières de la recension H, exécutée à Alexandrie. Il a suivi le texte reçu de son temps ; il n’en a pas fait un, comme il l’a déclaré lui-même très explicitement. In Matth., tom. xv, 14, t. xiii, col. 1293-1 294. Quelques-unes de ses leçons propres représentent elles-mêmes le texte alors courant dont il est un bon témoin. Die Schriften des N. T., t. i, p. 1510-1520. Pour les Actes, les Épîtres catholiques et les Épîtres de saint Paul, Origène suit aussi, sauf de légères différences et de rares exceptions, le texte I-H-K, et il n’a pas connu d’autre recension. Ibid., p. 1836-1837, 1893, 1995-2007.

Les manuscrits d’Adamantius ou d’Origène, que saint Jérôme mentionne à côté de ceux de Piérius et dont il signale de curieuses omissions, par exemple, neque Filius, Matth., xxiv, 36, In Matth., 1. IV, t. xxvi, col. 181 ; In Epist. ad Gal., iii, 1, ibid., col. 348, ne peuvent être que des manuscrits qu’Origène lui-même aurait annotés, ou que d’autres auraient corrigés d’après les commentaires de cet écrivain. Ainsi M. von der Goltza découvert et publié un manuscrit de l’Athos, du Xe siècle, qui, en dehors des scolies tirées d’Origène, reproduit le texte d’un manuscrit plus ancien, revisé sur le texte d’Origène. Eine textkritische Arbeit des zehnten bezw. sechsten Jahrhunderts, dans Texte und Untersuchungen, Leipzig, 1899, t. xvii, fasc. 4.

2. Les recensions réelles faites au IIIe et au IVe siècle. — Hug, op. cit., t. i, p. 168-191, outre la recension d’Origène déjà mentionnée, admettait deux autres recensions, l’une faite à Antioche par le martyr saint Lucien, l’autre à Alexandrie par le prêtre Hésychius. Comme tous ses arguments n’étaient pas probants, les critiques n’adoptèrent pas ses conclusions et se bornèrent à classer les documents en familles distinctes. Hort et Westcott, revenant dans la ligne de Griesbach, distinguèrent, outre le texte occidental et le texte neutre, qui avaient cours au IIe siècle, deux autres textes : le texte alexandrin et le texte syrien. Le texte alexandrin leur parut être l’œuvre d’une main savante et habile et avoir vu le jour au commencement du IIIe siècle, sinon même avant. C’est une retouche du texte neutre, faite principalement au point de vue du style et de l’orthographe. Il n’a aucun représentant qui soit pur. On le trouve dans les plus anciens onciaux, dans les versions coptes, surtout la memphitique, dans les citations de Didyme et de saint Cyrille d’Alexandrie, Le texte syrien, qui est formé des trois textes précédents, a des leçons mixtes ou confluantes. On n’en trouve pas de trace dans les citations des Pères anténicéens, mais il est cité par les Pères antiochiens du ive siècle, saint Chrysostome, Théodoret et Diodore de Tarse ; il est aussi dans la Peschito, qui est du même siècle. Il a été formé à Antioche avant 250, à ce qu’il semble, puis remanié peut-être avant 350. Il n’est pas prouvé que saint Lucien y ait mis la main. Au IVe siècle, les deux formes syriennes ont été mêlées, et ce texte, véritable amalgame d’éléments hétérogènes, a passé à Constantinople et a prévalu dans tout le monde grec. Il est reproduit dans les onciaux les plus récents et dans la majorité des cursifs. C’est un mauvais texte, d’origine récente, qui s’éloigne plus que tous les autres du texte original. The New Testament in the original Greek, Introduction, p. 130-443. Voir t. iv, col. 407.

Par l’étude comparée des textes dans les manuscrits, les citations des Pères et les versions, M. von Soden est parvenu à dégager trois recensions bien distinctes, qu’il a désignées par les sigles I, ii, K, et qui ont été faites au tournant du IIIe et du IVe siècle sur le même texte I-H-K, courant au ne et au me siècle, d’après des principes critiques différents. La recension K, ou Koivri, lui est apparue très distincte, dans les Évangiles, les Actes et les Épîtres. Dégagée des influences qu’elle a subies plus tard de la part des deux autres recensions, elle se présente avec ses leçons particulières exclusivement propres, et avec un caractère général bien déterminé. Au point de vue de la forme, elle a corrigé les barbarismes réels ou prétendus du texte I-H-K, en affectant de rapprocher le plus possible le grec néotestamentaire du grec classique. Des termes ont été changés pour que la phrase soit plus coulante ; les temps des verbes d’une même phrase ont été uniformisés, le style a été arrangé de façon à établir une sorte de parallélisme dans les propositions. On a évité la répétition des mêmes mots, même quand la clarté l’exigeait. D’ordinaire toutefois, le recenseur a cherché la clarté du sens et toujours la correction du texte. Quelques leçons propres des Évangiles ont une certaine relation avec le texte de l’ancienne version syriaque et il est possible qu’elle ait subi son influence. Sa ressemblance avec la Peschito est plus forte ; elle n’en dépend pas toutefois, et les points communs proviennent plutôt de l’ancienne tradition syrienne du texte. La Kamî ressemble notablement au texte que citaient saint