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TENTE — TENTES (VALLÉE DES)

mettaient de suspendre différents objets, comme dans les anciennes tentes assyriennes. Judith, xur, 8. Voir t. ii, fig. 36, col. 99 ; t. iv, fig. 94, col. 287. Les nattes servant à s’asseoir et à dormir, ainsi que les différents ustensiles, reposaient sur le sol même. Aussi y avaitil inconvénient quand les épines envahissaient la tente. Ose., ix, 6. Anciennement, la tente n'était pas ouverte sur un côté entier ; mais elle avait une porte, c’est-à-dire un pan d'étoffe pouvant clore l’ouverture ou être écarté. Gen., xviii, 10. Les deux parois latérales s’appelaient « mains » ou côtés. Voir Main, t. iv, col. 582. Pour demeurer auprès de quelqu’un, on pouvait « fixer ses pieux dans ses parois et dresser sa tente contre la sienne. » Eccli., xvi, 24, 25. Les tentes étaient plus ou moins vastes, selon le nombre de ceux qu’elles devaient abriter. Il est probable que les plus grandes comportaient des divisions, pour les hommes, les femmes, les esclaves et souvent le bétail. Au désert, un Israélite avait introduit une Madianite dans sa qubbâh, xâ[ « vo ; , lupanar, l’arrière-tente, la partie la plus retirée, ce qu’on a appelé depuis, d’après le mot qubbâh, V « alcôve ». Num., xxv, 8. Les Arabes ont conservé, en ce qui concerne leurs tentes, les usages qui devaient être en vigueur chez les anciens Israélites. « Les Arabes n’ont point d’autres logements que leurs tentes, qu’ils appellent maisons ; elles sont toutes noires, d’un tissu de poil de chèvre, que les femmes filent, et dont elles sont aussi les tisserands. Ces tentes sont tendues d’une manière que l’eau de la pluie coule aisément par* dessus sans les pénétrer. Toutes leurs familles, leurs ménages et leurs écuries logent dessous, particulièrement en hiver. Celles de l'émir sont de la même étoffe, et ne diffèrent d’avec celles de ses sujets que par la grandeur… Lorsque l’hiver commence à revenir… ils campent dans des vallons ou sur le rivage de la mer, où il y a quelques arbrisseaux, à l’abri du vent, et sur le sable, pour n’avoir point l’incommodité des boues ; les hommes et le bétail logent alors tous pêle-mêle, pour être plus chaudement. » De la Roque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718, p. 173, 175. Les Israélites dressaient quelquefois des lentes sur le toit de leurs maisons, II Reg.. XVI, 22, pour s’y mettre à l’abri, comme on le fait encore en Orient.

Son établissement. — La tente constituait une habitation essentiellement mobile, qu’on déplaçait toutes les fois qu’il était utile. Ézéchias, menacé de mourir, dit que sa demeure est « enlevée comme une tente de bergers. » Is., xxxviii, 12. De là les expressions suivantes : ʿâṭaq, ἀπέστη, ἀπαράς, transgrediens, profectus, « lever sa tente », Gen., xii, 8 ; xxvi, 22 ; ʿâhal, ἐσκήνωσεν, habitavit, « établir sa tente », Gen., XIII, 12 ; yahêl, διἐλθωσιν, ponet tentoria, « dresser sa tente », Is., xiii, 20 ; nâtaʿ, πήξει σκηνήν, figet tabernaculum, n. fixer sa tente », Dan., xi, 45 ; tâqa', « fixer sa tente en clouant », ἔπηξε, ἔστησε, extenderat, fixit, Gen., xxxi, 25 ; Jer., VI, 3 ; etc. Au Thabor, saint Pierre parle de « faire des tentes », ποιήσωμεν σκηνάς, faciamus tabernacula, Matth., xvii, 4 ; Marc, ix, 4 ; Luc, ix, 33, parce qu’il s’agissait alors de fabriquer des tentes de toutes pièces. — Les tentes d’une même famille ou d’une même tribu formaient un groupement plus ou moins régulier. Voir t. ii, fig. 35, col. 93. Au désert, les tentes des Israélites étaient disposées de manière à constituer un camp aussi bien ordonné que le permettait la nature des emplacements. Voir Camp, t. ii, col. 94. Ce spectacle fit l’admiration de Balaam : « Qu’elles sont belles tes tentes, ô Jacob, tes demeures, ô Israël ! » Num., xxiv, 5 ; cf. Exod., xix, 2 ; Num., Il, 3-31 ; xm. 1 ; xxiv, 2. — L'établissement des tentes a inspiré plusieurs métaphores. Les auteurs sacrés parlent de la voûte des cieux comme d’une tente que Dieu a étendue au-dessus de la terre. Job, ix, 8 ; Is., xiii, 5 ; xliv, 24. « Il déploie les cieux comme une tente. »

Ps. civ (cm), 2. « Il étend les cieux comme un voile et les déploie comme une tente pour y habiter. » Is., xl, 22. Saint Paul compare le corps de l’homme à une tente qui sera détruite par la mort. II Cor., v, 1, 4. Saint Pierre reprend la même métaphore ; il tient à exhorter les fidèles « tant qu’il est dans cette tente, » qu’il saitdevoir quitter bientôt. II Pet., 1, 13, 14.

Ses habitants. — La Sainte Écriture mentionne les tentes de Noé, Gen., ix, 21 ; de Sem, Gen., IX, 27 ; de Lot, Gen., xiii, 5 ; d’Abraham, Gen., xiii, 18 ; xviii, 10 ; etc. ; d’Ismaël, Gen., xvi, 12 ; d’Isaac, Gen., xxvi, 25 ; de Jacob, Gen., xxv, 27 ; xxxiii, 17 ; etc. ; des Israélites au désert, Exod., xvi, 16 ; xix, 2 ; etc. ; des lévites autour du Tabernacle, Num., i, 53 ; de Dathan et Abiron, Num., xvi, 24, 26, 32 ; d’Issachar, Deut., xxxiii, 18 ; des Madranites, Jud., vi, 5 ; des Arabes, Jud., viii, 10 ; de Saül, I Reg., xxvi, 5, 7 ; de David, I Reg., xvii, 54 ; des hommes de Juda en guerre, II Reg., xi, 11 ; des Syriens, IV Reg., vii, 8 ; d’Holopherne, Judith, x, 16 ; xii, 4 ; des Chaldéens autour de Jérusalem, Jer., vi, 3 ; de Cuschan et de Moab, Hab., iii, 7 ; etc. — Des tentes particulières sont quelquefois attribuées à des femmes, à Sara, devenue veuve, Gen., xxiv, 67, à Lia, à Rachel, aux deux esclaves Bala et Zelpha, Gen., xxxi, 33, à Jahel, Jud., iv, 18. La polygamie rendait nécessaire la distinction des tentes pour les femmes d’un même mari. La famille des Réchabites persista toujours à habiter sous des tentes. Jer., xxxv, 7, 10. Aux tentes des personnages aisés étaient attachés des serviteurs. Job, xxxi, 3L. — On se tenait assis à la porte de sa tente, de manière à jouir de l’ombre pendant la chaleur du jour. Gen., xviii, 1. On préférait parfois rester dessous. Gen., xviii, 9 ; xxv, 27. Au désert, quand la colonne de nuée descendait sur le Tabernacle, les Israélites se prosternaient à l’entrée de leurs tentes. Exod., xxxiii, 8, 10. Plusieurs fois, ils murmurèrent dans leurs tentes. Deut., i, 27. — Comme les tentes furent longtemps l’habitation des Israélites, les expressions suivantes restèrent en usage, justifiées d’ailleurs littéralement au cours des campagnes militaires : « renvoyer chacun dans sa tente », Jud., vii, 8 ; I Reg., xiii, 2 ; « retourner à sa tente », Jud., xx, 8 ; « fuir à sa tente », I Reg., iv, 10 ; II Reg., xviii, 17 ; xix, 8 ; IV Reg., viii, 21 ; xiv, 12. Le cri : « Chacun à sa tente ! » était le signal de l’abandon d’un parti. II Reg., xx, 1 ; III Reg., xii, 16. — Le sort des habitants d’une tente était attribué à la tente elle-même. Bien que la paix soit exceptionnellement sous la tente du brigand, Job, xii, 6, la tente des impies est vouée au malheur et à la destruction, Job, viii, 22 ; xv, 34 ; xviii, 6, 14, 15 ; xx, 26 ; xxi, 28 ; Dieu, en arrachera le méchant. Ps. lu (li), 7. Au contraire, le bonheur est sous la tente du juste, Job, v, 24 ; Dieu l’y visite, Job, xxix, 4 ; le fléau n’en approche pas, Ps. xcil (xci), 10 ; on y entend retentir les cris de joie, Ps. cxviii (cxvii), 15, et la tente des justes fleurira, c’est-à-dire verra toutes les prospérités. Prov., xiv, 11. Cependant malgré le soin qu’on prend d'écarter l’iniquité de sa tente, Job, xi, 14 ; xxii, 23, cela n’empêche pas qu’elle soit momentanément assiégée par les épreuves. Job, x, 12.

H. Lesêtre.

2. TENTE DE TÉMOIGNAGE (Vulgate : Tabernaculum testimonii). Voir Tabernacle, col. 1051.

3. TENTES [VALLÉE DES], (hébreu : ʿÊméq Sukkôṭ ; Septante : ἡ κοίλας τῶν σκηνῶν). La Vulgate traduit Ps. lix (lx), 6 ; cvil (cvm), 8, le nom propre Sukkôṭ par tabernacula, « tentes », lequel devait venir à cette vallée des tentes qui y avaient été dressées. Dieu prophétise à David qu’il partagera et divisera à son gré, comme le fait un propriétaire, Sichem et Soccoth. Ce Soccoth est, d’après les uns, le Soccoth à l’est du Jourdain,