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TABERNACLES (FÊTE DES)


dernier texte montre aussi qu’on faisait des cabanes de feuillage sur les toits des maisons, dans les cours, dans le parvis du Temple et sur les places de la ville. La fête est mentionnée par Zacharie, xiv, 16-19, qui rappelle qu’on doit venir à Jérusalem pour la célébrer. Sous Judas Machabée, les Juifs empêchés une année de célébrer la fête, parce qu’ils se trouvaient dans des montagnes, la célébrèrent un peu plus tarda Jérusalem, « en portant des thyrses, des rameaux verts et des palmes, » sans qu’il soit fait mention de cabanes. II Mach., x, 6, 7.

II. Signification de la fête. — 1° Le souvenir du désert. — Cette idée est indiquée dans le texte même de la loi. Lev., xxiii, 43. Pendant quarante années, les Hébreux n’ont pas habité dans des maisons, comme un peuple sédentaire, maître du pays qu’il occupe. Ils ont passé à travers le désert en nomades, dans des abris provisoires appelés tantôt sukkôtfhev., xxiii, 42, 43, tantôt 'ohâlîm. Num., xvi, 26 ; xxiv, 5 ; Lev., xiv, 8 ; Deut., i, 27 ; xi, 6 ; Ps. cvi (cv), 25. Ce souvenir est donc rappelé aussi bien par des cabanes que par des tentes. Il n'était point triste et, pour le célébrer, on devait se réjouir devant Jéhovah, car le séjour au désert avait été le passage de l’Egypte, terre d’oppression, au pays de Chanaan, terre féconde et tranquille. Deut., viii, 1-18 ; XI, 8-12. Ce séjour avait d’ailleurs été marqué par de mémorables interventions de Jéhovah en faveur de son peuple, pour le diriger, le protéger, le nourrir, le désaltérer, le préparer à devenir une nation indépendante et prospère. Les sept jours passés dans les cabanes de feuillages rappelaient cette époque, durant laquelle Jéhovah s'était montré si bon pour les Hébreux et leur avait fait tant de promesses si merveilleusement tenues dans la suite des 1emps. Ils apprenaient par là combien Dieu méritait leur reconnaissance pour le passé et leur confiance pour le présent et l’avenir. — 2° L’action de grâces pour la récolte. — Cette fête arrivait à la fin de l’année, quand toutes les récoltes avaient été recueillies. Deut., xvi, 13. La récolte était un bienfait actuel, qui se renouvelait chaque année et dont jouissait chaque génération. En l’accordant, Dieu accomplissait encore une de ses promesses. Deut., viii, 7-14 ; xxviii, 3-6. La fête des Tabernacles complétait, à ce point de vue, ce qu’avaient commencé celles de la Pâque et de laPentecôte. Voir Fêtes juives, t. ii, col. 2218. Aussi était-elle la fête la plus joyeuse de toute l’année, celle qu’on appelait simplement hag, la « fête » par excellence, « la fête de beaucoup la plus sainte et la plus grande » et « la fête la mieux observée ». Josèphe, Ant. jud., VIII, iv, 1 ; XV, iii, 3. — 3° Le symbolisme des feuillages. — Ces feuillages étaient empruntés à des arbres remarquables, les uns par leurs fruits, les autres par leur verdure. Ils signifiaient pour les Israélites les fruits de la terre dont le Seigneur les comblait et le repos qu’il leur assurait sous les épais ombrages. L’habitation dans des cabanes construites avec ces feuillages marquait donc l’aisance, le repos, la sécurité qu’assurait à son peuple la bénédiction de Dieu. La diversité des feuillages symbolisait la multiplicité des bienfaits reçus. — 4° Le symbolisme des sacrifices. — En aucune fête, on n’offrait autant de sacrifices publics, ce qui faisait appeler le premier jour yôm hamm-arûbâh, « jour de la multiplication ». Menoxhoth, xiii, 5. Le grand nombre des animaux domestiques était encore un bienfait du Seigneur ; il convenait de l’en remercier par des holocaustes plus nombreux qu'à l’ordinaire. Le nombre sacré « sept » présidait au compte des victimes, puisqu’il y avait pour les sept jours 70 taureaux, 14 béliers et 7 fois 14 agneaux. Voir Nombre, t. iv, col. 1694. Le bouc offert chaque jour unissait l’idée de la pénitence à celle de la reconnaissance, les Israélites devant se rappeler que trop souvent ils s'étaient montrés infidèles et ingrats.

— 5° Le huitième jour. — Comme la Pàque, Deut., xvi, 8, la fête des Tabernacles se terminait par un jour appelé 'âsérét, è%6810v, cœtus. Lev., xxiii, 36. Seulement, ici, ce jour s’ajoutait aux sept jours de la fête. Il était lui-même considéré comme jour de fête, avec exclusion d "œuvres serviles et offrande de sacrifices différents de ceux des sept jours précédents, mais semblables à ceux des autres fêtes et des néoménies. Ce jour surnuméraire avait sans doute pour but de servir de conclusion à toutes les fêtes de l’année, qui se terminaient avec la fête des Tabernacles. En cette fête particulière, on résumait tous les sentiments d’adoration, d’actions de grâces et de repentir qui avaient inspiré les âmes dans les autres fêles, on complétait ce qui avait manqué et on réparait ce qui avait été défectueux dans les solennités précédentes. Cf. Biihr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii, p. 652-664.

III. Les additions juives. — Le traité Sukka de la Mischna traite de tout ce qui concerne la fête des Tabernacles. — 1° Réglementations diverses. — Les docteurs juifs ne manquèrent pas, tout d’abord, déréglementer jusque dans les moindres détails l’exécution des prescriptions légales. En ce qui concerne les cabanes de feuillages, ils avaient réglé la forme, qui pouvait d’ailleurs être très variable, la largeur, la hauteur, les ouvertures, etc. Les cabanes devaient être construites sous le ciel même, et non sous un arbre. La hauteur était au moins de dix, et au plus de vingt coudées. Les Caraïtes prétendaient qu’il n’y avait aucun compte à tenir de ces règles, étrangères au texte.de la Loi. — On portait à la main gauche une branche de citronnier, 'étrôg, y.iTpiov, et à la droite le lûldb, <poîvi ?, bouquet composé d’une branche de palmier, de deux branches de saule et de trois branches de myrte. Siphra, ꝟ. 258, 2. La branche de citronnier est quelquefois confondue avec le lûlâb, Menachoth, iii, 6, mais d’autres fois en est distinguée. Sukka, iii, 4 ; Gem. Sukka, 31, 2. D’après les Caraïtes, ces branches d’arbres n’avaient pas à être portées ; elles ne servaient qu'à la construction des cabanes. Cf. II Esd., viii, 16. — 2° La libation d’eau. — Voir Libation, t. iv, col. 236. On attachait une grande importance à cette cérémonie, qui se répétait chacun des sept jours de la fête, mais que les Caraïtes regardaient comme une institution purement humaine, parce que la Loi n’en fait aucune mention. On ignore à quelle époque elle fut introduite. Il est probable qu’elle avait pour but de commémorer les miracles par lesquels Dieu avait étanché la soif des Hébreux, en faisant jaillir l’eau du rocher. — 3° Les candélabres. — Afin de pouvoir continuer la célébration de la fête même la nuit, on disposait dans le parvis des femmes quatre grands candélabres d’or, hauts de 50 coudées (26 m 25). Ces candélabres portaient des récipients d’une contenance de 120 logs (34 lil 80) remplis d’huile et pourvus de mèches de lin provenant des vêtements sacerdotaux hors d’usage. On allumait ces lampes le premier jour, après le sacrifice du soir. Comme le mur qui entourait le parvis des femmes n’avait que 25 coudées (13 m 12) de haut à l’intérieur, Josèphe, Bell, jud., V, v, 2, la lueur pouvait être aperçue de divers endroits de la ville. — 4° Les réjouissances. — La loi ordonnait des réjouissances auxquelles devaient prendre part tous les membres de la famille, les esclaves, les lévites, les étrangers et les pauvres. Deut., xvi, 14. Il y avait donc partout des festins joyeux. Au Temple, pendant la nuit, des lévites et des prêtres descendaient dans les parvis en jouant de la trompette et en chantant des Psaumes ; des personnages notables, tenant des torches à la main, exécutaient des danses sous les yeux du peuple et prononçaient diverses formules de bénédiction. Cependant il n’y avait ni chants ni danses les deux nuits qui précédaient le sabbat et le huitième jour. Chaque jour, on faisait le tour de l’autel en tenant à la main le lûlâb ou